La Chronique Agora

Un normal anormal

▪ Les marchés sont revenus à la « normale » — enfin… ce qui passe pour normal à leurs yeux, c’est-à-dire à l’aveuglement volontaire, à l’appât du gain et à la politique du « les mauvaises nouvelles sont de bonnes nouvelles ».

Peu importe que l’économie aille (de plus en plus) mal, que le chômage augmente un peu partout, que les classes moyennes vacillent et que nos Etats-Providence sont au bord du gouffre : tant que les compères du capitalisme de copinage s’entendent comme larrons en foire pour faire monter les cours… c’est que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Mais mais mais… que voyons-nous là ? Se pourrait-il que derrière cette belle façade, la panique commence à se faire sentir dans les somptueux bureaux et les salles de réunion luxueuses ? Se pourrait-il que nos autorités soient désormais à court de « remèdes de cheval » — ou qu’elles aient atteint les limites des politiques actuelles ?

▪ C’est en tout cas l’avis du Dr Unger, comme il l’écrivait il y a quelques jours :

« La Fed veut revenir à une ‘normalisation’ de la courbe des taux mais une structure normale de la courbe des taux implique des rendements de 2% à 3% sur le marché monétaire et de 4% à 5% pour les rendements à 10 ans… Sauf que, avec un endettement international de 200 000 milliards de dollars (source : McKinsey), cela est inenvisageable !

Mais peut-être que la courbe actuelle des rendements est déjà devenue la nouvelle ‘normalité’ ! Peut-être que cette phase durera beaucoup plus longtemps qu’escompté jusqu’ici. Le prochain ralentissement économique semble déjà plus proche que la dernière reprise ».

La conclusion est implacable — et n’augure rien de bon pour les années qui viennent :

« Les banques centrales ont déjà loupé leur ‘fenêtre de tir’ pour un premier pas vers la normalisation. En raison du surendettement absurde dans le monde entier, la politique monétaire devient de plus en plus dépendante des marchés financiers. A long terme, la crise n’en devient que plus explosive ».

▪ Bill Bonner rajoutait quelques explications mercredi, soulignant le rôle des banques centrales dans l’attitude « après-moi-le-déluge » qui prévaut désormais sur les marchés :

« Depuis qu’Alan Greenspan a pris les commandes de la Fed en 1987, […] lui et ses successeurs se sont précipités chaque fois que l’édifice chancelait — supprimant le ‘risque’ du marché boursier. Bien entendu, ils ne pouvaient pas l’éliminer complètement. A l’occasion, les marchés chutent. Les investisseurs subissent des pertes.

Mais en faisant suivre chaque rupture boursière par une augmentation du crédit facile, la Fed a substantiellement réduit cette période […]. Dans l’exemple le plus récent, par exemple, les valeurs US ont perdu la moitié de leur valeur. Mais grâce aux efforts herculéens des autorités, les investisseurs ont retrouvé leur argent trois ans après seulement ».

Sauf que la donne est en train de changer, continue Bill, avant d’émettre une hypothèse :

« Voilà ce qui pourrait se passer : lors du prochain krach, les autorités viendront à la rescousse comme prévu. Mais avec des taux déjà proches du zéro, que peuvent-elles faire ? Peut-être n’auront-elles pas plus de succès que le Japon, où les actions ont perdu 80% après 1990… et ne se sont jamais remises… en dépit de taux frôlant le zéro ces 20 dernières années ! »

Si vous avez des actions en portefeuille, gardez ces données en tête. Personnellement, je ne vous recommanderais pas de tout vendre là tout de suite… mais assurez-vous de n’être positionné que sur des entreprises auxquelles vous faites pleinement confiance… et que vous seriez prêt à garder même en cas de krach boursier, dans la mesure où leurs fondamentaux sont solides et leur permettront de se remettre une fois les turbulences évacuées.

▪ Et… Jim Rickards attirait notre attention sur un fait intéressant, dans le dernier numéro de sa lettre Intelligence Stratégique :

« Aujourd’hui, pour la première fois depuis des décennies, l’or fait à nouveau l’objet de discussions en tant qu’instrument des réserves internationales. C’est parce que la Russie, la Chine, l’Iran et d’autres pays ont acquis des milliers de tonnes d’or qu’ils ont ajoutées à leurs réserves. Il est tout aussi important de noter que d’autres banques centrales possédant déjà de l’or, telles que l’Allemagne, la France, l’Italie et les Etats-Unis, ont totalement cessé d’en vendre.

On dirait bien que la ‘bousculade’ vers l’or est de retour après que les banques centrales s’en soient débarrassées officiellement pendant des décennies », conclut Jim.

Hmm… Faut-il compter sur un retour de la « relique barbare » sur le devant de la scène monétaire ?

A suivre…

Meilleures salutations,

Françoise Garteiser
La Chronique Agora

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile