La Chronique Agora

Trois décisions d’investissement… et une fortune faite

▪ Nous avons accepté d’écrire un livre sur « le patrimoine familial » — c’est-à-dire la manière dont les familles construisent et conservent leur fortune au cours des générations. Nous ne sommes absolument pas qualifié pour écrire un tel livre, parce que notre famille n’avait pas d’argent. Mais c’est tout de même un sujet passionnant… et plus nous faisons de recherches, plus nous écrivons sur le sujet, plus nous en arrivons à comprendre ce dont il s’agit. En l’occurrence, il ne s’agit pas de stratégies « sûres et conservatrices ». C’est plutôt un manifeste pour le capitalisme le plus dynamique de la planète.

Les riches ne sont pas comme tout le monde. Ils ne devraient pas essayer de l’être. La plupart des gens n’ont pas d’argent. Ceux qui en ont sont différents. Si vous voulez avoir de l’argent, il s’ensuit qu’il faut faire les choses différemment. C’est aussi simple que ça. Surtout si vous voulez avoir de l’argent sur plus d’une génération.

Par exemple : tout le monde essaie de trouver les actions qui vont grimper. Les gens veulent être des investisseurs alpha — le grand homme qui a mis son argent dans Google à ses débuts… ou celui qui a acheté Berkshire Hathaway dans les années 70. C’est là toute l’histoire, pensent-ils… la recherche de l’alpha.

L’alpha, ce sont les plus-values au-dessus de la moyenne que l’on peut obtenir en sélectionnant les bonnes valeurs. Le problème, avec l’alpha, c’est qu’il est aussi peu fiable qu’un adolescent pour son premier job d’été. Vous pensez que tout est réglé… et il ne vient pas travailler. Vous choisissez une action qui grimpe… puis deux qui ne grimpent pas. Ensuite vient une valeur vraiment cauchemardesque… et vous voilà ruiné. Sur le long terme — par définition et par observation — la plupart des investisseurs alpha ne peuvent battre les moyennes boursières.

Mais avez-vous vraiment le choix ? Prenez un investisseur moyen. Il a 10 ans pour transformer une petite épargne en fonds pour sa retraite. Il fait ses devoirs. Il prend des risques. Il croise les doigts.

Si l’on agit ainsi pendant assez longtemps, les succès et les échecs s’équilibrent à peu près. Parfois, on bat le marché ; parfois, le marché vous bat. Mais on n’a pas l’éternité devant soi. On ne peut obtenir une performance moyenne à long terme… parce qu’on n’a pas de long terme. On n’en a qu’un petit morceau… en espérant que ce soit le bon.

▪ Une famille sérieuse, avec une stratégie patrimoniale de long terme, en revanche, doit agir autrement. Elle sait que courir après l’alpha ne lui donnera qu’un rendement moyen au cours du temps. Elle sait que le rendement moyen à long terme est très limité. Elle veut faire mieux. Elle a le temps de son côté. Alors comment peut-elle faire mieux ? En se désintéressant totalement de l’alpha. Elle se concentre plutôt sur le « beta ».

Une stratégie beta est complètement différente. Au lieu d’essayer de battre le marché, on en fait son ami. On n’essaie pas de le battre — on veut simplement s’y joindre. Et le suivre. Mais il faut faire attention à son choix. On veut un marché qui nous mènera à destination… et il faut monter à bord au bon moment.

Nous avons déjà exploré ce sujet : comment vous auriez pu multiplier votre argent par 150 en prenant trois simples décisions d’investissement au cours des 40 dernières années. Et deux de ces décisions étaient exactement les mêmes ! Notez qu’elles ne consistent pas à chercher l’alpha. Ce sont des décisions beta : choisir le marché dans lequel on souhaite être… et attendre le meilleur moment possible pour y entrer.

Alors revenons en arrière. Vous vous rappelez que Richard Nixon a coupé le lien entre l’or et le dollar en 1971. Il ne fallait guère d’imagination pour voir ce qui se passerait ensuite. L’inflation allait probablement grimper… ce qui ferait inévitablement augmenter le prix de l’or.

Imaginons donc que vous partez avec 10 000 $. Au début des années 70 — avec des années d’opportunité devant vous — vous achetez de l’or. Pour que les calculs restent simples, nous dirons que vous l’avez acheté à environ 50 $ l’once.

A la fin des années 70, votre or planait au-dessus des 500 $ l’once. Vous aviez gagné 10 fois votre mise initiale. Vous ne saviez pas ce qui allait se passer ensuite, mais vous lisiez les journaux. Paul Volcker, chef de la Réserve fédérale, avait juré d’écraser l’inflation. Il semblait sérieux. Au début des années 80… il semblait même qu’il pourrait gagner sa bataille contre la hausse des prix à la consommation.

Là encore, inutile d’être un génie de l’économie pour réaliser qu’une baisse de l’inflation ne serait guère bénéfique pour l’or. En revanche, ce serait parfait pour les actions ou les obligations. Vous avez donc pris une deuxième décision. Vous avez vendu votre or et mis la somme ainsi obtenue sur le marchés actions. L’or a dépassé les 800 $, mais disons que vous avez verrouillé votre vente à 500 $. Là encore, vous aviez tout votre temps pour agir. Le prix de l’or est resté au-delà des 500 $ de la fin 1979 jusqu’en 1981.

Le marché boursier a pris son temps lui aussi. Mais c’est ainsi que fonctionne l’investissement beta. Une décision. Beaucoup d’attente. Après 1980, le Dow a traîné pendant cinq ans avant d’atteindre les 1 500. Disons que vous avez attendu cinq ans et acheté à 1 500. Puis vous avez encore attendu. Peu à peu, le Dow a grimpé. Et grimpé. Et grimpé.

A la fin des années 90, le Dow est passé au-dessus des 10 000 points. En janvier 2000, il était au-delà des 11 000. Ensuite, il y avait tant de sirènes d’alarme qu’il fallait être sourd pour ne pas les entendre. Le Dow avait dépassé les 1 000%. Les gens lançaient des sociétés dot.com sans rien. Pas de plan. Pas de ventes. Pas de profits. Ils gagnaient des millions en les vendant aux investisseurs. Quelque chose devait céder.

Que faire ? Vous auriez dû prendre votre troisième décision d’investissement en 30 ans : vendre les actions et racheter de l’or. Les actions étaient surachetées. L’or était survendu. Si l’on tient compte de l’inflation, l’or avait baissé de 80% à 90% par rapport à ses sommets de 1980. Les actions avaient été multipliées par cinq — en tenant compte de l’inflation — par rapport à leur plancher de 1980.

Si vous l’aviez fait, vous auriez encore multiplié votre argent par six. Vos 10 000 $ d’origine seraient devenus 300 000 $. Ensuite, en investissant dans l’or depuis 2000, vous auriez encore multiplié votre argent cinq fois — soit 1 500 000 $.

Mais disons que vous ayez manqué la sonnette d’alarme dans les années 2000, et que vous ayez gardé vos actions. En fait, après une brève chute, elles ont continué à grimper. Le Dow a finalement dépassé les 15 000 — vous donnant un total d’environ 500 000 $ à son plus haut. Pas trop mal, n’est-ce pas ?

C’est là toute l’efficacité de l’investissement beta. C’est ce que fait l’argent intelligent… le vieil argent… l’argent familial.

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