La Chronique Agora

Tous foutus !

▪ Nous reprenons notre discours aux jeunes diplômés américains — où ils découvrent qu’ils ont été piégés.

Chère Promotion 2014,

Un cursus universitaire peut faire plus de mal que de bien. Comme je l’ai expliqué il y a quelques jours, pour être enseignées, étudiées et apprises, les sciences humaines doivent être réduites à une caricature. Les gens sont transformés en ébauches. Des problématiques complexes sont transformées en narrations si simples que même un étudiant peut les comprendre.

Vous êtes jeunes. Maintenant que vous quittez l’école, vous pouvez commencer à apprendre. Il vous faudra de nombreuses années pour développer la profonde méfiance et le cynisme dont vous aurez besoin pour comprendre ce qui se passe vraiment. Mais je vais vous donner un petit aperçu :

Les forces armées américaines protègent la liberté des citoyens US, n’est-ce pas ? C’est pour elles que le Memorial Day a été mis en place. C’est en tout cas l’information qui est enseignée à tous les écoliers et répétée tous les ans dans tous les journaux du pays.

Le problème avec Memorial Day et l’éducation supérieure est similaire. Il faut fermer les yeux sur les points particuliers pour les apprécier. Supprimer les détails gênants. Effacer les faits embarrassants. Souvent, il ne reste plus que des absurdités stériles. Tous les articles sur le Memorial Day nous disent que les vétérans ont lutté pour "la liberté". Mais regardez les guerres américaines : pas une seule ne compte un ennemi qui se préparait à réduire la liberté du pays. Les Boches voulaient l’Alsace, pas la Pennsylvanie. Les pauvres Philippins n’avaient pas l’intention d’envahir l’Indiana. Et les Nicaraguayens ? Personne ne se rappelle des menottes qu’ils avaient l’intention de passer aux poignets américains. Mais après chaque victoire, il s’est toujours passé la même chose : les soldats sont revenus dans un pays où les impôts étaient plus élevés et les interdictions plus nombreuses.

Ce qu’on apprend à l’université, c’est la manière dont les choses sont "censées" fonctionner. Mais peu de choses, dans la vie réelle, sont aussi simplistes qu’elles sont "censées" l’être.

▪ Illustration : les gouvernements
Un gouvernement n’est pas administré pour ou par le peuple. Il s’agit simplement de la manière dont un groupe de gens — les initiés — exploite d’autres gens. On peut appeler ça une démocratie ou une dictature, peu importe. Elle peut être douce et largement tolérable ou brutale et généralement détestée. Ce qui en fait un gouvernement, c’est qu’il a un monopole sur l’utilisation de la violence ; en fin de compte, les initiés l’utilisent pour obtenir ce qu’ils veulent.

Quant à l’économie, vous avez appris que c’est un système capitaliste. On vous a dit qu’il doit être régulé par la SEC, la Fed, le département de la Justice, et autres agences nécessaires pour maintenir l’honnêteté des capitalistes. On vous a menti.

Ce n’est pas un système capitaliste ; les autorités en ont retiré le capital il y a 40 ans. A présent, il dépend du copinage et du crédit. C’est un système corrompu, en d’autres termes — le produit de la collusion entre l’industrie et les agences censées la réglementer. Son véritable but est de transférer plus de richesse et de pouvoir vers les initiés.

William Baumol comprenait. Il avait deviné que les prix des biens manufacturés baisseraient — parce qu’il y avait beaucoup de concurrence — tandis que les prix des services produits localement augmenteraient. C’est pour cette raison que nos télévisions sont si bon marché… mais que les soins de santé sont devenus si chers ; ils peuvent être plus facilement contrôlés et manipulés par les initiés. Ils sont largement protégés de la concurrence et faussés par les tierces personnes qui paient les factures — dont le gouvernement et les compagnies d’assurance.

Cela aide aussi à expliquer pourquoi une éducation universitaire est huit fois plus chère aujourd’hui qu’en 1978. Parce que, comme je l’expliquais il y a quelques jours, l’université était facultative pour avoir un revenu digne de ce nom dans les années 70. Aujourd’hui, elle est presque obligatoire.

Lorsque tout est truqué, ce sont les truqueurs qui ont l’argent et le pouvoir. Lobbyistes, avocats, comptables, administrateurs… Que vous vouliez introduire une entreprise en bourse — ou simplement construire une maison — vous êtes confronté à quelqu’un qui peut vous arrêter, avec de la paperasserie, des tours de passe-passe juridiques et de l’administratif à vous en donner la nausée. Vous aussi, vous devez jouer le jeu.

A suivre — avec notamment l’effet Cantillon… et la décoordination intertemporelle. Vous découvrirez ce qu’ils signifient (un indice : "vous êtes foutus")…

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile