La Chronique Agora

Que penser du livre de Thomas Piketty sur le capital et la croissance ?

▪ r>c.

Nous reviendrons à cette équation incendiaire dans quelques lignes, cher lecteur. Pour l’instant, observons que les marchés US ont baissé ces derniers jours, tandis que l’or a grimpé.

Il paraît que ce sont les tensions en Ukraine qui font évoluer ces deux marchés. Peut-être. Mais pourquoi la politique ukrainienne diminuerait-elle la valeur de Procter & Gamble, ou Nestlé, ou Boeing ? Pourquoi les actionnaires de Wal-Mart devraient-ils se soucier de qui gouverne (mal) les steppes d’Europe de l’est ?

Mais beaucoup d’investisseurs ne sont que des joueurs… qui parient sur une hausse ou une baisse des actions selon l’actualité du moment. Les grandes sociétés financières ont leurs propres parieurs… dont bon nombre sont très intelligents. Ils suivent l’actualité, et ils ont des programmes informatiques qui anticipent la réaction des autres joueurs… puis signalent leurs trades une fraction de seconde plus rapidement que les autres.

Nous conseillons à nos lecteurs de rester éloignés — tant de l’actualité que des paris. En dehors de la distraction qu’ils représentent, tous deux sont une perte de temps.

Maintenant, revenons-en à r>c.

▪ Pourquoi pas nous ?!
Thomas Piketty est la sorte d’homme que l’histoire aurait sans doute oublié. Il se pourrait aussi que la profession économique se porte mieux si elle ne l’avait jamais rencontré. M. Piketty est peut-être l’économiste le plus chanceux de la planète. Il a écrit un livre qui ne vaut probablement pas la peine d’être lu… un livre qui est apparemment erroné et de courte vue… un livre sans aucune idée originale…

Nous avons hâte de mettre la main sur l’ouvrage de M. Piketty pour voir s’il est à la hauteur de sa réputation

… C’est du moins ce que nous avons entendu dire. Nous sommes toujours dans la cambrousse. Il n’y a pas de librairie à des centaines de kilomètres à la ronde. Mais nous avons hâte de mettre la main sur l’ouvrage de M. Piketty pour voir s’il est à la hauteur de sa réputation.

En attendant, nous nous tournons vers Simone Wapler, à Paris, pour un point de vue franco-français sur la question :

"Le succès du livre de Piketty repose sur cette petite équation, ‘r>c’. Avec ça, on donne l’impression de savoir de quoi l’on parle lors des dîners en ville. Elle nous dit que lorsque le revenu du capital des rentiers, ‘r’, est supérieur à la croissance économique, ‘c’, c’est mal et qu’il faut alors prendre l’argent des rentiers pour rendre le monde meilleur. Bien sûr, ‘c’ n’est pas clairement défini… tout comme le ‘capital’, qui n’est que de la dette de nos jours, de toute façon.

Mais je dis cela uniquement parce que je suis jalouse. Moi aussi j’aimerais trouver une équation bien pratique et devenir riche !"

Rien de surprenant au sujet du livre de Piketty. Au contraire, c’est exactement ce à quoi on pourrait s’attendre — un regard du 21ème siècle sur la lutte imaginaire entre les riches capitalistes et les pauvres travailleurs.

Ce qui est stupéfiant, c’est qu’il est en tête des best-sellers Amazon aux Etats-Unis. Le LA Times nous en dit plus :

"Faites places, 50 nuances de Grey ! Au lieu de romance, c’est un livre de l’économiste français Thomas Piketty sur l’inégalité des revenus et le capitalisme qui est en tête des ventes sur amazon.com. Le capital au 21ème siècle, de Thomas Piketty génère tant d’intérêt parmi les économistes et les décideurs qu’Amazon est en rupture de stock temporaire aux Etats-Unis.

A près de 700 pages, ce n’est pas un livre de plage pour lecteur indolent — sauf si un mélange de données économiques denses et d’histoire vous passionne.

Piketty a examiné des décennies de statistiques économiques provenant de 20 pays pour comparer l’inégalité des revenus au cours du temps, et en a conclu que l’économie américaine a vu la richesse des 1% passer à des sommets vertigineux. La richesse ne s’écoule pas vers le bas de la pyramide comme l’affirment certains, déclare Piketty. De plus, avertit-il, les inégalités croissantes saperont la démocratie et engendreront le mécontentement".

Voilà qui nous fait nous poser des questions. Qu’est-ce qui ne va pas chez les pornographes… les romanciers… les spécialistes des régimes… et les menteurs politiques ? Comment ont-ils pu laisser un économiste à peine lisible, même pas de langue maternelle anglaise, leur damer le pion ?

Oui, cher lecteur, nous sommes jaloux nous aussi. Le livre de Piketty n’offre rien de neuf. De ce que nous pouvons en dire, il a mal compris la leçon la plus importante de l’économie. Pourtant, son livre a généré masse d’articles, a été acheté un peu partout et on a chanté ses louanges. Nos livres à nous sont à peine remarqués.

L’idée principale de l’ouvrage de Piketty semble être que les capitalistes ont gagné beaucoup d’argent ces derniers temps ; il faut y remédier

▪ Un problème qui se résout de lui-même
L’idée principale de l’ouvrage de Piketty semble être que les capitalistes ont gagné beaucoup d’argent ces derniers temps ; il faut y remédier. Surprise, surprise… il pense que les "inégalités" sont un problème… et que les économies de marché ont besoin de toute la sagesse des économistes, des politiciens et des banquiers centraux pour aider à lisser ça.

Nous n’avons que les articles de presse pour nous faire une idée. Mais personne ne mentionne d’effort sérieux, de la part de M. Piketty, pour comprendre comment les riches sont devenus aussi riches à l’origine. N’est-il pas possible que ces mêmes économistes et politiciens y aient quelque chose à voir ? Nous y reviendrons…

En attendant, il nous semble que son inquiétude concernant r>c est absurde. Lorsque ‘r’ est élevé, ça signifie que les investissements sont bons. C’est-à-dire qu’ils produisent plus de richesse qu’ils n’en coûtent. Plus ‘r’ grimpe, plus on crée de richesse. Si on investit dans une nouvelle technologie, par exemple, cet investissement ne produit de ‘r’ positif que si la technologie fonctionne. Plus on a de ‘r’, plus sa réussite est grande… et, en théorie… plus l’humanité s’enrichit.

Il faut également prendre en compte que lorsque ‘r’ est élevé, ça encourage les gens à épargner plus et à investir dans de nouvelles technologies et des secteurs plus productifs. La quantité de "choses" augmente… et les gens sont, dans leur ensemble, plus riches.

Il se passe autre chose également : lorsque plus de gens épargnent et investissent (motivés par le ‘r’ élevé), l’augmentation des investissements finit par réduire ce ‘r’. Les premiers investissements produisent des rendements élevés. Cela attire les investisseurs marginaux vers des investissements plus marginaux eux aussi… et le taux de rendement baisse. Le problème de M. Piketty se résout de lui-même… si on le laisse faire.

A suivre.

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