« Il semble que les économistes sont les seules personnes terrorisées par la perspective de salaires en hausse », remarquait mercredi dernier Jonathan Ferro, présentateur sur Bloomberg.
Ce constat est juste. Il mérite commentaire.
Les économistes sont du côté des pouvoirs en place. Ils en adoptent l’idéologie et les théories.
Les autorités monétaires ont, pendant plus de 10 ans, justifié leurs politiques par la volonté de produire une inflation de 2%.
Elles ont pour cela créé des milliers de milliards de monnaie tombée du ciel, monétisé les dettes des gouvernements, fait exploser les marchés boursiers, créé un monde de spéculation, creusé les inégalités, créé le populisme.
Maintenant que l’inflation arrive au rendez-vous, les décideurs veulent la limiter. D’abord, ils la minorent, puis ils disent qu’elle ne va pas durer, puis ils se décident à lutter contre elle.
L’inflation cesse d’être souhaitable quand elle gagne les salaires !
Pourquoi ont-ils peur de l’inflation qu’ils ont tant chérie ? Parce que les salaires ont commencé à monter et que les salariés commencent à récupérer un pouvoir de négociation, après 30 ans de faiblesse. Après 30 ans où la part du capital dans la valeur ajoutée a progressé, 30 ans ou les salaires ont stagné et 30 ans ou les gains de productivité ont été confisqués. Pour survivre, beaucoup de salariés ont dû s’endetter et se surendetter.
La « bonne » hausse des prix
L’échelle de perroquet des salaires et des prix se met en branle et les autorités ont peur.
Elles ont peur car ce qu’elles veulent, bien sûr, ce n’est pas l’inflation. Depuis 30 ans, ce qu’elles veulent, c’est la hausse des prix des biens et des services vendus par les entreprises. Elles veulent que les prix montent, mais que les salaires eux ne bougent pas. Il vaut mieux donner des chèques de quelques centaines d’euros ou de dollars plutôt que de voir les salaires monter !
Cela signifie que, ce qu’elles veulent depuis 30 ans, c’est la baisse du pouvoir d’achat de la classe salariée.
Elles veulent la baisse relative du pouvoir d’achat des salaires, la réduction des coûts salariaux et donc la hausse des profits.
Ils veulent continuer comme avant avec des taux d’intérêt bas qui permettent de ne pas rémunérer votre épargne et de déprécier votre retraite. Ils veulent que les cours de la Bourse restent très élevés, et que les gouvernements puissent continuer de s’endetter gratuitement.
Leur objectif n’est pas la bonne gestion pour tous, mais la bonne gestion pour une élite.
Ils veulent une croissance lente ou quasi nulle, la croissance Goldilocks qui leur permet de continuer de contrôler le système et ses tensions.
[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]