Si certains investissements sont à la mode et profitent d’un engouement passager, sur le long terme, ils ont peu de chances de faire mieux que des investissements motivés par des raisons beaucoup plus traditionnelles.
La vie humaine est toujours une lutte. Entre le bien et le mal… la comédie et la tragédie… la civilisation et la barbarie. Un va et vient… entre un commerce honnête et consensuel et la politique de la force brutale… entre ceux qui font ce commerce, et ceux qui le leur prennent.
Et entre la « coolitude » et la recherche du profit.
Il se peut que cette dernière idée choque les lecteurs. Elle nous a choqué. Mais, lorsque vous reliez les points, c’est ce que vous voyez : la chasse aux profits améliore le monde, la chasse à la coolitude non.
Ce que nous savons
Nous commençons en déclarant que nous ne sommes pas aussi « marginal » que nous le semblons.
Ce que nous savons, essentiellement, c’est que le dollar « falsifié » post-1971 (qui n’était plus adossé à l’or) a offert à l’Etat beaucoup plus de liberté que jamais auparavant pour trafiquer, magouiller, et produire de la richesse bidon.
Avec le pouvoir d’imprimer de l’argent, personne ne peut résister longtemps à la tentation. La réticence habituelle de la Fed a cédé, quand Alan Greenspan a décidé d’opter pour la coolitude. Il voulait voir son visage en couverture du magazine TIME, et il a eu ce qu’il voulait. Très cool.
Et ensuite, toute l’économie est devenue folle, avec tout ce crédit produit par la politique d’argent facile de la Fed.
A l’apogée de la gloire de l’empire américain – en 1999, à peu près – les Etats-Unis affichaient environ 28 000 Mds$ de dettes réparties entre les ménages, les entreprises et le gouvernement.
A présent, la seule dette du gouvernement s’élève à 29 000 Mds$. Tout compris, la dette atteint plus de 86 000 Mds$.
Delirium tremens
A présent, presque chaque enfant de la nation y est « accro ». Les prêts immobiliers, les cartes de crédit, la dette des étudiants, la dette des entreprises… et la dette « nationale », tous dépendent de taux d’intérêts artificiellement bas… lesquels dépendent des achats d’obligations de la Fed… lesquels dépendent de l’argent de la planche à billet.
Oui, c’est « l’inflation ou la mort ».
Soit la Fed continue à maintenir des taux bas et à imprimer plus d’argent, ce qui provoquera inévitablement une hausse de l’inflation, soit elle passe au sevrage et toute l’économie sombrera dans le delirium tremens.
En 2008-2009, Thomas Hoenig – gouverneur de la Fed et ex-dirigeant de la Fed de Kansas City – a essayé d’arrêter la musique.
Selon le Financial Times :
« Il a rompu avec le consensus traditionnel de la Fed et risqué l’opprobre (sans parler d’une déferlante de critiques de la part de ses pairs) en avertissant qu’une expérimentation monétaire aussi radicale – impliquant d’injecter des sommes inédites dans l’économie américaine – augmenterait les inégalités et encouragerait un comportement encore plus risqué à Wall Street. »
Monsieur Hoenig n’était pas cool. Quasiment invisible en 2009, il a totalement disparu de la Fed dès 2011.
Et à présent, dit Hoenig, « nous avons bâti un système économique tout entier autour des taux à zéro ».
Quelques expérimentations passées et proposées
La Fed a poursuivi son « expérimentation ». Elle a maintenu son taux directeur au-dessous de zéro (corrigé de l’inflation) tout au long de la dernière décennie, pratiquement. Tout le monde a emprunté. Et le gouvernement fédéral, le plus gros emprunteur, a augmenté sa dette à un rythme record.
Des riches aux pauvres… des entreprises aux ménages… la fête est devenue de plus en plus dysfonctionnelle. Plus chaotique. Plus inégale. Cela relève plus du mosh pit [NDLR : danse brutale des punks] que du fox-trot : quelqu’un va être blessé !
Ces derniers jours, nous avons vu que la part du lion de cet argent imprimé était partie dans la poche des gens les plus riches du pays… et que certains d’entre eux en redonneraient volontiers un petit peu, pour être plus cool.
Larry Fink invite les PDG d’entreprises à renoncer aux profits et à poursuivre l’objectif « zéro émission », à la place. M. Fink semble penser que, soit cela améliorera le monde, soit cela améliorera son propre statut au sein de ce monde, ou les deux.
Abigail Disney demande à l’Etat de taxer davantage les profits.
Dans le cas de M. Fink, nous ne savons pas du tout si les entreprises visant l’objectif zéro émission rendent service au monde ou non. Lutter contre le changement climatique, c’est cool aujourd’hui. Mais pour ce qui est de demain, nous n’en savons rien.
Dans le cas de Mme Disney, il n’y a pratiquement aucune chance qu’en prenant de l’argent aux riches et en le donnant au gouvernement, ce soit gagnant. Mme Disney pourrait récupérer quelques points de coolitude, mais tout bipède doué de sens – même si c’est par accident – pourrait probablement mieux investir son argent que l’Etat.
Du moins s’il est motivé par le profit.
Des tueurs primitifs
Et ici, nous nous permettons une petite devinette. Car profondément ancré dans le cœur des hommes, il y a un animal très primitif. Il est chasseur. Il est tueur. Et il vise la coolitude… C’est à dire pour tout ce qu’il veut, quand il le veut.
La « civilisation » le bride : elle l’habille avec des vêtements, lui donne des manières, brandit des « commandements » – comme autant de « stop » – lui disant de ne pas tuer, ni voler, ni convoiter l’épouse de son voisin.
Elle lui dit aussi d’oublier les politiques publiques cool et de s’engager plutôt dans la voie d’honnêtes profits.
Serait-il cool de cambrioler une banque ? Peut-être… mais il gagnera probablement plus d’argent s’il en crée une.
Serait-il cool de menotter ses employés à leur bureau ? Peut-être, mais dans un monde moderne, l’esclavage salarié est plus efficace et moins coûteux que l’esclavage d’autrefois.
Serait-il cool de regarder les gens mourir de faim… de laisser les enfants courir nus… et de les voir grelotter en hiver ? Peut-être. Mais pour gagner de l’argent, on peut tricoter des pulls, construire des maisons et planter des pommes de terre !
La recherche d’honnêtes profits a contribué à civiliser le monde.
Viser la coolitude, en revanche, revient toujours à faire un pas en arrière.