La Chronique Agora

Sur le CAC 40 comme sur le VIX, il y a du changement !

▪ Autant l’avouer d’entrée de jeu, nous avions ouvert des yeux grands comme des soucoupes vendredi à 17h35 en découvrant un CAC 40 en hausse de 2,25%. Nous continuons de chercher quelle bonne statistique ou quelle prévision optimiste avait pu provoquer cette bouffée d’euphorie à la veille du week-end.

Mais nous avons cru avoir effectué un saut dans la quatrième dimension ce lundi en découvrant après un quart d’heure de cotation ce même CAC 40 gagnant 1% à 3 745 points avec tout juste 100 million d’euros échangés.

N’importe qui ou n’importe quel hedge fund peut donc manipuler la bourse de Paris à sa guise — avec un budget représentant l’équivalent d’un petit hôtel particulier à Monaco ou d’un duplex avec vue sur Central Park.

Trois heures plus tard, le CAC 40 affichait +2,2% à 3 787 points avec 1,5 milliard d’euros échangés, soit un cumul de 4,5% de hausse en moins de 12 heures de cotation. Il s’agissait d’un score digne d’une performance trimestrielle (il faut théoriquement une succession de bonnes nouvelles économiques à jet continu pour gagner plus de 4% sur un trimestre) avec des niveaux d’activité dignes de la bourse de Budapest.

Mais cela ne résout tout de même pas la question : pourquoi une hausse univoque avec 95% de titres à la hausse vendredi soir puis lundi matin ?

▪ Toutes les réponses sont là !
Heureusement, l’inspiration nous est venue subitement — ce fut comme une illumination… ou comme on se rappelle soudain de l’endroit improbable où l’on avait égaré ses clés de voiture. Toutes les réponses nous attendaient sur un forum boursier, émanant d’un internaute à qui nous devons rendre un vibrant hommage.

Un observateur éclairé a en effet tout compris et analysé l’actualité du week-end d’une manière beaucoup plus efficace et synthétique que la nôtre. Voici donc sa liste des raisons imparables expliquant la flambée boursière :

– Dégradation de la notation de l’Angleterre par Moody’s
– Récession dans l’Eurozone en 2013
– Accroissement des déficits en France en 2014
– PMI chinois en baisse (de 52,3 vers 50,4)
– Pas d’avancées sur la question du fiscal cliff américain
– Hausse du chômage en Europe (dans les 27 pays)
– Chypre en faillite, nouveau président pro-austérité
– Violentes manifestation anti-austérité en Espagne
– Nouvel effondrement du yen lundi matin (sous 124,6/euro)
– Italie potentiellement ingouvernable (c’est maintenant avéré).

Notre internaute ne s’arrête pas là : non content d’avoir listé les 10 causes premières de l’euphorie ambiante, il posait le bon diagnostic pour les semaines, les mois et les trimestres à venir.

« Les marchés anticipent un règlement de tous ces problèmes pour 2014, le souci est qu’ils avaient déjà anticipé la même chose début en 2012. Et comme rien n’est résolu sur le fond — malgré le verbe magique de Mario Draghi — les investisseurs sont convaincus que les marchés anticiperont début 2014 un règlement pour 2015 ».

Un rêve éveillé… brutalement interrompu par une rechute de 180 points du CAC40 entre le plus haut du jour (inscrit vers 15h05) et un plus bas de 3 608 points sur le contrat mars. Voilà qui a de quoi pourrait troubler les esprits : un effondrement de 4,8% en quelques heures n’est pas chose courante. La question devient alors : comment a-t-on pu en arriver là ?

▪ Une séance emblématique
Une séance démentielle comme celle de lundi est très emblématique de la façon dont les choses fonctionnent.

Dès que le CAC 40 a débordé les 3 730 points, les carnets se sont littéralement vidés de leurs ordres de vente (pas grave, dans 95% des cas, c’était des ordres factices destinés de toute façon à être annulés). Les cours se sont mis à grimper sans opposition jusque vers 3 750 points puis 3 780 points… histoire d’anéantir deux séries de certificats turbo puts achetés en guise de couverture avant le résultat des élections italiennes divulgué à 15h00.

Si nous ne devions retenir qu’une hypothèse pour justifier la flambée du jour, c’est celle d’un potentiel délit d’initié concernant le premier communiqué faisant état de la victoire totale du parti de centre gauche de Pierre Luigi Bersani, crédité initialement d’une majorité dans les deux chambres (des députés et Sénat)… Le scénario rêvé des investisseurs qui avaient « payé le marché » dès vendredi.

Une pseudo-information manifestement connue d’avance par certains privilégiés qui n’ont pas fait dans la demi-mesure tant ils apparaissaient sûrs de leur fait.

Le succès tous azimuts du nouveau champion des marchés (un ex-communiste, ironie du sort) ne sera démenti qu’une heure plus tard par une nouvelle estimation de la RAI qui attribuait cette fois la maîtrise du Sénat à Silvio Berlusconi… Le cauchemar des investisseurs.

▪ Maelström en Italie, éruption volcanique sur les marchés
Le maelström électoral italien ne s’arrête pas là : les candidats regroupés sous la bannière « Cinq étoiles » de l’humoriste Beppe Grillo deviennent la première formation politique du Sénat (en nombre d’élus), balayant littéralement les supporters de Mario Monti.

Nous avions bien anticipé le risque d’un paysage politique tournant à la mascarade (et nous avions réitéré nos craintes hier en pleine euphorie boursière… mais le destin a souri aux optimistes lors de l’annonce initiale des résultats : les plus malins ou les mieux informés ont une heure pour vendre les indices au plus haut du jour, et même de l’année en ce qui concerne le CAC40 (revenu tester 3.790Pts).

Nous n’avons cessé d’affirmer sur le Téléphone rouge, que les marchés sont tellement manipulés, l’information est tellement biaisée et orientée (toujours dans le sens qui convient aux banques centrales qui ne font même plus mystère de tirer les ficelles), que le déclenchement d’une correction surviendra avec la brutalité de l’Etna rentrant en éruption avec la projection d’un geyser de lave de 500m de haut.

Les marchés se sont vu délivrer pendant des mois des rapports sismologiques falsifiés où pas un seul microséisme n’apparaissait sur les graphiques officiels, pas la moindre déformation des flancs du cratère… alors que le magma et les gaz se frayaient un chemin à travers la roche.

Les banques centrales et les médias ont invité les particuliers à venir déposer leurs économies à proximité du sommet du volcan des dettes souveraines en leur assurant que l’Etna était endormi pour plusieurs années… et soudain, l’enfer se déchaîne.

Le Dow Jones a inscrit un nouveau record annuel à 14 080 (il s’est approché à 83 points de son record historique de clôture du 9 octobre 2007), avant de subir sa plus lourde correction (-1,55%) depuis le 7 novembre dernier et la séance de correction qui a « salué » la réélection de Barack Obama.

Le S&P 500 a chuté de 1,8%, sous les 1 490 points, mais ce n’est pas le plus spectaculaire. Il faut compter avec le Dow Transport et le Russell 2000, qui ont dévissé de 2,2% après être revenus tutoyer leurs records absolus en tout début de séance.

De tels écarts ne sont guère impressionnants en regard des 4,8% reperdus par le CAC 40 entre 16h et 22h. Seul le VIX trahit la violence des forces telluriques en train de se libérer : le baromètre du stress associé au S&P 500 explose de 34% et bondit de 14,1 vers 19 — un écart intraday jamais observé depuis le début de l’automne 2011.

Le spectacle des prochaines séances promet d’être grandiose !

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