La Chronique Agora

Sur un air de pipeau

monnaie, inflation, bulle

Les bulles continuent de gonfler, tandis que l’inflation serait en train de se dégonfler. Quelque chose cloche dans cette partition.

De la même façon que le système financier tient parce que l’on ne peut plus sortir de la monnaie et des actifs financiers – c’est pour cela qu’ils ont tué l’or monétaire –, le système de représentation du monde tient parce que l’on peut de moins en moins sortir de l’imaginaire imposé par le système.

La faille dans l’imaginaire du système imposé par les élites, ce sont les réseaux sociaux. Là, la vérité peut encore remonter.

C’est pour cela que l’enjeu de la période, c’est le contrôle des réseaux sociaux. C’est vital pour les administrateurs du système ; il faut que les réseaux sociaux soient domestiqués, qu’ils rentrent dans le rang à la place qui leur est assignée, d’auxiliaires du Pouvoir. Il faut qu’ils cessent de proposer des paroles concurrentes ou alternatives. Tout comme il a fallu tuer toutes les autres monnaies pour imposer la fausse monnaie des Etats et des gouvernements.

Leur imaginaire, celui qu’ils ont fabriqué pour vous, vous êtes noyé dedans ; il vous traverse, il devient « vous » ; « vous » êtes cet imaginaire même. Il devient constitutif. Dépossession !

Fausse monnaie

Tout est faux, tout est bidon, et vous pouvez de moins en moins sortir de tout cela, vous n’avez plus accès ni à la vérité, ni à son sous-jacent, le réel, le fondamental, l’objectif. Vous habitez non pas le monde ou votre monde, non, vous habitez leur subjectivité.

Et bien sûr, la ligne de base de ces maîtres à ne pas penser c’est de dire que le réel n’existe pas. C’est relatif, cela dépend de la culture, des mémoires, il n’y a pas d’homme, pas de femmes, il n’y a que des constructions culturelles ; la monnaie c’est un jeton, une pure convention imposée par l’Etat, la monnaie ne renvoie à aucune richesse, à aucun travail à aucun effort, on en fait tomber du ciel.

La notion de bulle est une forme de cet imaginaire, une gestalt ou si on veut une structure.

Dans cet univers imaginaire qui n’est même plus envahissant mais qui a tout envahi, les bulles financières – que vous n’arrivez même plus à détecter car tout flotte et tant elles vous sont familières –, ces bulles financières ont pour homologués les bulles romancières qui vous enveloppent au plan militaire.

L’une des questions que je me pose d’ailleurs, est de savoir si l’éclatement d’une de ces bulles, la financière ou la militaire, provoquera ou non la réconciliation générale entre l’imaginaire et le réel. Le fameux atterrissage. La fameuse épreuve de réalité.

Chaque univers a ses armes destruction internes massives, mais est ce que ces deux univers sont solidaires, soudés à la hanche comme on dit ?

Ou bien est-ce que les éclatements resteront cantonnés ?

C’est mon interrogation.

Grand succès

Revenons sur Terre, ou du moins dans leur imaginaire, avec l’administration de l’imaginaire financier dans l’actualité.

Il s’agit de vous faire croire que la politique monétaire est un succès, que l’inflation est vaincue, que la rigueur monétaire est réelle et que la conjoncture va se modérer et devenir Goldilock, ni trop chaude ni trop froide. Donc on va pouvoir continuer à buller sur les bourses.

Mercredi 5 juillet 2023 : Ed Hyman de l’ISI s’exprimant sur Bloomberg Television :

« L’inflation diminue dans le monde entier. Ils viennent d’annoncer ce matin que l’IPP de la zone euro était désormais en déflation… La semaine dernière, l’IPC de l’Espagne est passé sous les 2% pour la première fois. J’essaie de relier les points du mieux que je peux, et il me semble que l’inflation est vraiment en baisse. Et avec ce contexte politique que j’ai mentionné, cela va continuer à baisser. »

Une recherche Google indique que M. Hyman est un « économiste légendaire » et « classé le meilleur économiste de Wall Street pendant 42 ans ». La réputation de M. Hyman parle d’elle-même. Il est largement reconnu comme l’éminent prévisionniste économique que tout le monde doit croire.

C’est écrit dans l’IA !

La masse augmente encore

Le consensus est haussier pour les actifs financiers. La contraction de la masse monétaire garantit que l’inflation n’est plus un problème ; la courbe des taux signale la fin prochaine du cycle de resserrement de la Fed ; et un ralentissement économique sera constructif pour les obligations et les actions.

Ben voyons !

Et en avant les histoires, comme disent les publicités Playmobil !

Vous parlez de contraction de la croissance de la masse monétaire M2 suggérant ainsi que l’argent est moins abondant, qu’il manque ?

Les actifs des fonds monétaires ont augmenté de 581 Mds$ (36% en rythme annualisé) au cours des 17 dernières semaines, avec une croissance sur un an de 917 Mds$, soit 20,1 %.

En fin de compte, la fourniture de liquidité de la Fed/FHLB en réponse à la crise bancaire de mars a totalement bouleversé le paysage financier, le pognon coule à flots !

Déjà, en 2006, Greenspan révélait le pot aux roses : « A notre époque, on ne sait plus ce que c’est que la monnaie » ! Alors, prétendre que les masses monétaires se modèrent, c’est du pipeau.

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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