La Chronique Agora

Qui se soucie encore de la Fed après Orlando ?

J’aurais voulu rédiger une chronique débutant banalement par un « voici une semaine placée sous le signe du FOMC de la Fed » (ou de la séance des « Quatre sorcières » de vendredi)… mais ce n’est pas ainsi que l’actualité s’impose à nous.

La tuerie d’Orlando rend bien dérisoire le débat sur quel adverbe, quel adjectif ou quel élément de langage résumera mercredi soir le diagnostic économique de la banque centrale américaine, qui maintiendra de toute façon son taux directeur inchangé.

Nous venons de revivre un scénario qui rappelle la tuerie du Bataclan, avec une prise d’otages de trois heures signant la mise en échec de la police et du FBI.

Peut-être cela fera-t-il taire de nombreuses voix qui se sont montrées très critiques outre-Atlantique à l’encontre du suivi d’éléments identifiés comme « radicalisés » (les fameuses fiches « S ») par nos services de sécurité intérieure français… Sans oublier une protection défaillante — absence de vigiles armés dans les salles de concert ou dans l’enceinte des stades — selon les tweets édifiants émis par Donald Trump au lendemain des tragiques évènements parisiens du 13 novembre.

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Les Etats-Unis ont pris conscience qu’ils sont plus vulnérables à une action individuelle ne demandant pratiquement aucune préparation logistique — seulement un permis de port d’arme en règle — qu’à une organisation avec chaîne de commandement et « sponsor » financier planifiant une action spectaculaire façons attentats de Bruxelles ou de Paris.

Changement de thème

Voilà qui place brutalement la campagne présidentielle américaine sur un terrain très éloigné des thématiques économiques et sociales développées par Bernie Sanders : celui des questions de sécurité intérieure et extérieure, dont Donald Trump et Hillary Clinton s’étaient emparés très tôt, et qui sont redevenues centrales depuis de ce week-end.

Qui se soucie que la Fed ait pataugé dans sa communication ces trois derniers mois ?

Qui se soucie que la Fed ait pataugé dans sa communication ces trois derniers mois ? Il ne sera désormais plus question de relever les taux tant que l’Amérique n’aura pas anéanti les menaces inspirées de l’extérieur puis trouvé le moyen de repérer les illuminés susceptibles de les exécuter depuis l’intérieur.

Cela signifie, comme en France, le renforcement des moyens légaux de surveillance des citoyens américains et la systématisation des techniques d’infiltration (une spécialité américaine qui consiste à inciter des suspects potentiels à passer à l’acte puis à les interpeller lorsqu’ils se retrouvent en possessions d’armes).

Les Etats-Unis vont très probablement annoncer incessamment une forte augmentation des budgets alloués à la sécurité intérieure mais également aux opérations extérieures visant à éliminer les cerveaux présumés de la « propagande radicale ».

Le pays ne pourra faire cette fois l’économie d’une enquête sur le « pedigree » de ces individus, sur les financements dont ils bénéficient, sur la provenance des armes dont ils équipent les combattants sur les théâtres d’opération au Proche-Orient.

Et si la lumière jaillit, elle risque ne pas convenir aux yeux de tout le monde.

Les coûts s’accumulent

Il est à peu près certain que de coûteuses opérations militaires vont s’intensifier en Irak, au Yémen en Lybie, en Syrie dans les tout prochains jours… Ne serait-ce que pour démontrer que les Etats-Unis ont la capacité de riposter et que la Maison Blanche et le Pentagone ne restent pas les bras croisés après le second attentat le plus meurtrier commis sur leur sol depuis le 11 septembre 2001.

Oui, tout ceci va coûter fort cher au budget américain.

La Fed ne va certainement pas prendre le risque d’alourdir la facture des intérêts de la dette en augmentant son taux directeur

Comme la croissance économique US est en train de ralentir (l’OCDE, la Banque mondiale et même Goldman Sachs le reconnaissent)… et comme les recettes fiscales — c’est trop rarement évoqué par les médias — sont en repli depuis l’été 2015, il faut s’attendre à un net gonflement du déficit budgétaire américain ces prochains mois. La Fed ne va certainement pas prendre le risque d’alourdir la facture des intérêts de la dette en augmentant son taux directeur dans un avenir prévisible.

Et certainement pas avant la présidentielle de novembre.

De quoi peut-être offrir à Wall Street un prétexte supplémentaire pour continuer à consolider à plat, quand les places européennes décrochaient de -2,5% la semaine dernière.

J’ose à peine évoquer la résilience des indices américains dans l’intervalle : le S&P 500 a corrigé de 0,92% vendredi, mais il préservait les 2 100 et n’a cédé que 0,15% en hebdomadaire.

La sérénité apparente des opérateurs véhicule une image trompeuse car le VIX (le baromètre du stress associé au S&P 500) a fait une embardée à la hausse. Il a enregistré une brusque remontée de 16,4% au-delà des 17, soit une envolée de 27% en hebdomadaire.

Comment Wall Street va digérer l’épreuve d’Orlando, ce sera le principal enjeu des séances qui nous séparent de ce vendredi 17, séance cruciale des « Quatre sorcières » qui va conclure ce premier semestre boursier.

Soit les supports techniques sur le Dow ou le S&P 500 seront défendus coûte que coûte — y compris en liquidant des positions au Japon, en Asie, en Europe pour se « faire du cash« … Soit la géopolitique s’impose comme prétexte justifiant une correction, pour des raisons extérieures à l’environnement économique et à la profitabilité des entreprises américaines.

Cela éviterait de parler d’éclatement d’une bulle boursière, ou de l’explosion d’une supernova obligataire, comme le redoutait Bill Gross vendredi dernier.

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