La Chronique Agora

Silicium Rally

** Investir dans les entreprises de traitement du silicium pourrait bien représenter le meilleur moyen de participer au boom de l’énergie solaire.

– Le silicium n’est pas un élément rare. En fait, c’est le second métal le plus abondant sur Terre. 25,7% de la croûte terrestre sont constitués de silicium. Et pourtant, le silicium raffiné est rare, suite au boom du secteur du photovoltaïque.

– Le processus de raffinement du silicium est plutôt cher. Pour commencer, toutes les impuretés doivent être purgées. L’oxygène est extrait du silicium grâce à une réaction au carbone. Ce processus est généralement effectué par l’ajout d’une forme de charbon ; on chauffe le produit ainsi obtenu dans un four spécial, à des températures entre 1 400 et 1900° Celsius. Le silicium qui en ressort est pur à 98%.

– Pour fabriquer du silicium adapté aux semi-conducteurs, d’autres traitements sont nécessaires. Il doit être mélangé à du HCl, ce qui élimine des impuretés comme l’aluminium et le fer. L’étape finale prend du SiHCl3 et le fait réagir avec de l’hydrogène durant 200 à 300 heures à 1 000°C, afin de produire une forme très pure de silicium. 

– Le silicium pur est ensuite coulé en barres mesurant deux mètres de long et 30 centimètres de diamètre. Ces barres sont coupées en tranches épaisses d’un demi millimètre — et nous avons là le produit final, utilisé pour les cellules photovoltaïques.

– Il est facile de voir pourquoi les coûts de l’énergie nécessaire pour la fabrication du silicium sont si élevés. Et le processus lui-même n’est pas le seul à être très cher : il coûte également cher d’augmenter la capacité de raffinement.

– Prenons le raffineur allemand Wacker Chemie, par exemple. La société s’est lancée dans un projet visant à étendre sa capacité de raffinement, la faisant passer de 5 500 à 9 000 tonnes. Prix de ce projet ? Plus de 270 millions de dollars. Le coût élevé du raffinement et des capacités de raffinement peut freiner les entreprises souhaitant se lancer dans le silicium… et c’est d’ailleurs exactement ce qui s’est passé.

– Il faudrait un gigantesque choc de la demande pour faire passer les prix du silicium à des niveaux suffisamment élevés pour rentabiliser une augmentation de la capacité de production.

** Mais c’est bien là l’idée fondamentale motivant un super-cycle des matières premières. Dans un tel cycle, augmenter l’offre pour répondre à la demande croissante prend du temps et de l’argent. Il faut évaluer le marché, lever des fonds, obtenir des permis, et, enfin, le projet doit être lancé et mené à bien. Ce délai est meublé par un déficit d’offre, lequel est compensé par une hausse des prix. La pénurie et l’augmentation des prix peuvent également être évaluées ou prédites par la taille du choc de la demande. Et le choc de la demande pour le silicium est très significatif.

– La question qui ne manquera pas de suivre, c’est pourquoi ce choc sera si considérable ? C’est très simple : là où vont les énergies renouvelables… on peut entendre les pas des subventions gouvernementales non loin derrière.

– Regardons quelques chiffres concernant la croissance de l’énergie solaire. Entre 1000 et 2004, le nombre d’installations photovoltaïques a quasiment quadruplé. Durant la même période, le prix du silicium est passé de 9 $/kg à près de 30 $/kg.

– On estime que le marché du silicium solaire représente environ 2,3 milliards de dollars par an actuellement. D’ici 2010, les installations photovoltaïques devraient quadrupler une nouvelle fois, tandis que le marché du silicium solaire devrait grimper à 10,4 milliards de dollars. Alors que l’énergie solaire prend un pourcentage de plus en plus élevé du marché du silicium, on peut s’attendre à voir une corrélation encore plus forte entre la croissance du marché de l’énergie solaire et l’augmentation du cours du silicium.

– Envisageons une situation hypothétique concernant le marché du silicium : les installations photovoltaïques ont été multipliées par quatre entre 2000 et 2004, comme je le disais plus haut. L’augmentation du prix du silicium, sur la même période, a été de 230%. Mais il est intéressant de constater qu’en 2000, il y a avait en fait un excès de capacité de raffinement. L’augmentation de la demande a été absorbée par cette capacité inoccupée, mais les cours ont tout de même grimpé de 230%. Que se passera-t-il si les installations photovoltaïques quadruplent une nouvelle fois… et que cette fois-ci, la capacité ne peut répondre à la demande croissante ?

– Je ne sais pas plus que vous ce que sera le prix réel. Mais j’imagine que la pénurie de silicium, due à une explosion de la demande sur le marché de l’énergie solaire et une capacité de raffinement sans la moindre marge de manœuvre, entraînera des mouvements spectaculaires sur le marché du silicium.

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