▪ En vieillissant, notre civilisation est devenue obsédée par le fait d’ériger des garde-fous économiques, de tendre des filets de protection, d’aplanir les courbes et de légiférer pour entourer de papier-bulle presque tous les accidents qui pourraient arriver. Résultat : le système financier est confiné, étouffé par d’innombrables réglementations et « protections ».
Nous ne supportons plus l’adversité économique… même lorsque cette adversité est au service d’un objectif économique essentiel. Nous voulons l’été sans l’hiver ; la victoire sans vaincus ; le succès sans l’échec.
Ce ne sont là pas de bonnes nouvelles pour la libre entreprise. Les défauts et les faillites sont le produit d’économies qui prospèrent à long terme. « Le capitalisme, ce n’est pas que des réussites — c’est là la partie facile », observe James Grant, chroniqueur au Grant’s Interest Rate Observer. « C’est également des échecs — les reconnaître, les traiter, les éliminer et les valoriser correctement ».
Schöpferische Zerstörung signifie « destruction créatrice » en allemand. Aux Etats-Unis, nous en avons oublié la signification. Dorénavant, à cause de la Réserve fédérale et d’autres créations destructrices du gouvernement, le processus de destruction créatrice ne prend plus que rarement racine dans le sol américain.
Wikipedia explique : « à son niveau le plus fondamental, la ‘destruction créatrice’ décrit la façon par laquelle le développement économique capitaliste naît de la destruction d’un ordre économique antérieur… Depuis les années 1950, le terme de ‘destruction créatrice’ — parfois aussi appelé ‘tempête perpétuelle’ selon la formule de Schumpeter — est devenu plus aisément identifié grâce à l’économiste austro-américain Joseph Schumpeter. Ce dernier l’a adapté et popularisé comme une théorie de l’innovation économique dans Capitalisme, Socialisme et Démocratie (1942) ».
La partie destructrice de la ‘destruction créatrice’ joue un rôle essentiel, thérapeutique. Mais les dirigeants financiers des Etats-Unis et de la Zone euro n’apprécient guère la destruction créatrice. Chez eux, c’est plutôt le déni créatif qui est à l’ordre du jour. Ils injectent des milliers de milliards de dollars de nouveaux crédits dans des banques insolvables comme un fluide d’embaumement dans un cadavre. Mais le crédit frais ramène rarement à la vie ces cadavres financiers. Il leur permet simplement d’être encore là et d’empuantir l’atmosphère.
La Réserve fédérale devrait abandonner son fluide d’embaumement et acheter à la place du ciment. Si la Fed était véritablement sérieuse quand elle affirme vouloir faire revivre la croissance économique long terme, elle attacherait aux pieds des grandes banques américaines insolvables des ‘chaussures de ciment’ et les pousserait dans l’Hudson.
▪ La destruction est nécessaire et importante
La destruction créatrice n’est pas uniquement une affaire de destruction mais essentiellement de création des opportunités d’investissement qui en résultent. Lorsque les entreprises se soldent par un échec, une nouvelle génération de capitalistes peut descendre dans l’arène pour gagner la génération suivante de fortunes.
C’est ainsi que fonctionne le monde… ou du moins qu’il devrait fonctionner. L’histoire récente des défauts souverains et des dévaluations de monnaie illustre très clairement ce phénomène.
Quelques années après un défaut ou une dévaluation, la plupart des pays entrent dans une nouvelle phase de croissance forte. Ce processus n’est pas facile et ne va pas sans douleur mais il est extrêmement efficace pour liquider les parties avariées afin que de nouvelles entreprises puissent s’épanouir.
▪ Quelques exemples…
Le gouvernement russe a fait défaut en 1998. Imaginons un investisseur qui a attendu un an après le défaut que les choses se calment, puis a acheté des actions. Au bout d’un an, il aurait doublé son argent. Au bout de trois ans, le bénéfice aurait été de plus de 200%. Au bout de cinq ans, de plus de 400%.
Cet exemple hypothétique n’est pas une exception : il est la règle. Un investisseur qui avait acheté des actions un an après la dévaluation du baht thaïlandais ou de la roupie indonésienne en 1997 ou celle du peso argentin en 2002 aurait dans chaque cas plus que doublé son investissement au cours des 12 mois qui ont suivi.
Le défaut du Brésil en 1990 fut une exception. Un investisseur aurait perdu de l’argent au début. Mais en bout de deux ans, cet investissement aurait également très bien rapporté.
Comme le montre ce graphique, ces cinq « achats de crises » auraient doublé en moyenne la mise d’un investisseur au bout de deux ans et l’auraient triplé au bout de cinq ans — dépassant de loin les indices boursiers sur des références internationales et sur des marchés émergents au cours de ces même laps de temps.
Le message est on ne peut plus clair : la destruction peut être très créatrice.