La Chronique Agora

Sauvetages, faillites et cécité

** Rappelez-vous notre hypothèse : l’inflation provoquée par les autorités monétaires sera bien plus visible pour l’or et les marchés de matières premières que pour les marchés boursiers… et la déflation endommagera bien plus les prix des actions et de l’immobilier que le cours de l’or.

* Cette semaine n’a pas prouvé grand’chose, mais elle a fourni une bonne illustration.

* Alors que les actions ont à peine bougé… l’or, le pétrole et les matières premières ont tous atteint de nouveaux records.
 
* L’or est désormais si près des 1 000 $ qu’il peut en sentir l’odeur. L’indice CRB des matières premières a atteint un nouveau record, tandis que le pétrole a clôturé au dessus des 104 $.

* Alors que l’or, les matières premières et le pétrole grimpent, des millions d’Américains retrouvent la santé mentale grâce à la déflation sur le marché de l’immobilier. Ils réalisent enfin qu’ils ne peuvent pas s’enrichir en dépensant de l’argent qu’ils n’ont pas pour s’offrir des choses dont ils n’ont pas besoin.

* Les faillites ont grimpé de 18% en février. Thornburg, organisme de prêts hypothécaires majeur à Santa Fe, au Nouveau Mexique, a fait défaut sur un prêt de 320 millions de dollars. Les investisseurs ont vendu la valeur. Il y a une semaine de ça, c’était une action à 12 $. A présent, c’est une action à 3 $.

* Les prêteurs approchent les nouveaux prêts comme ils le feraient du bord d’un volcan actif… s’inquiétant de les voir leur exploser à la figure sans prévenir. Les rendements des financements à taux du marché monétaire pour les municipalités et les hôpitaux ont quasiment doublé. Et lorsque les choses tournent mal, c’est vraiment l’explosion. C’est ainsi que la Port Authority de New York s’est retrouvée à payer un taux de 20% sur de l’argent dont elle avait besoin.

** Tout cela tente les autorités ; elles veulent intervenir. Il faut voir les choses de leur point de vue : si elles ne font rien et que les choses empirent, on les accusera d’inaction… ou pire, d’insensibilité. Rien n’est pire que l’inaction. Les gens la maudissent. Les professionnels la haïssent. Partout et toujours, tout le monde ou presque déteste l’idée de ne rien faire. En matière de mariage, c’est un motif d’annulation. Dans une entreprise, c’est la cause de licenciements. Et durant une guerre, c’est un aller simple pour la cour martiale.
 
* Bien entendu, une économie n’est jamais inactive. Elle fait toujours quelque chose — tandis que des millions et des millions de gens vaquent à leurs affaires du mieux qu’ils peuvent. Lorsque les autorités "font quelque chose" à une économie, ce n’est pas comme si elles écrivaient sur une feuille de papier vierge. Non, elles effacent les poèmes écrits par des citoyens individuels, et les remplacent par leurs propres vers de mirliton… poussant l’économie dans une direction qu’elle ne veut pas prendre. Parfois, ça marche — comme par exemple au début de ce siècle, lorsqu’un torrent de nouvelles liquidités et de crédit a produit la plus grande bulle immobilière du monde. Mais parfois, M. le Marché insiste pour aller où il veut.

* Après cinq baisses de taux et un programme de baisses d’impôt massives, les autorités se demandent désormais quoi faire. Le New York Times rapporte que Bush et Bernanke "glissent peu à peu" vers un sauvetage fédéral des propriétaires immobiliers. Bernanke a déjà demandé aux banques d’abandonner une partie des prêts hypothécaires. Et Barney Frank, membre du Congrès — qui écrivait il y a peu dans le Financial Times que le capitalisme et le laissez-faire étaient très bien… tant que les politiciens pouvaient dire quoi faire aux capitalistes –, a proposé que le gouvernement fédéral rachète les prêts en difficulté. George W. Bush, qui est prêt à approuver à peu près n’importe quoi, serait en train d’étudier la législation avec toute l’acuité visuelle d’Helen Keller.

* Oui, une opération de sauvetage va probablement arriver. Mais fonctionnera-t-elle ?

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