La Chronique Agora

Une petite prière pour les riches

▪ La semaine dernière, nous avons assisté à une conférence pour les 1%.

"Tout le monde croit que les riches ont une vie facile", a déclaré un psychologue/thérapeute familial. "Mais beaucoup de gens ne voudraient pas d’une telle existence. Les personnes riches sont souvent coupées d’une vie qui ait du sens… de la chaleur des relations normales… et de la gratification psychologique qu’il y a à simplement devoir gagner sa vie… De sorte qu’elles ont l’impression de ne pas avoir de raisons de vivre".

"Vous savez que le taux de suicide a nettement grimpé aux Etats-Unis. On compte plus de morts par suicide que dans des accidents de voiture. Et en ce qui concerne le meurtre, vous avez bien plus de chance de vous assassiner vous-même que quelqu’un d’autre".

"Mais aussi épouvantable que soit le suicide pour tous les autres, c’est pire pour les riches. A Aspen, dans le Colorado — qui est sous certains critères la communauté la plus riche des Etats-Unis –, le taux de suicide est cinq fois plus élevé qu’à l’échelle nationale".

"Je peux vous dire aussi que les taux de dépendance à la drogue, d’alcoolisme et de dépression sont également bien plus élevés dans les familles des 1% que dans d’autres familles".

Qu’en pensez-vous, cher lecteur ? On passe tant de temps et d’énergie à essayer de s’enrichir pour pouvoir emménager à Aspen ou à Palm Beach. Et une fois qu’on y est, la vie est si misérable qu’on préférerait être mort.

Que faut-il en déduire ? Peut-être que l’argent ne fait pas le bonheur, finalement. Ou peut-être que quand on devient riche, il vous arrive plus de tuiles.

▪ Que la vie est dure quand on est riche !

Pour commencer, ces pauvres crétins de riches sont détestés un peu partout. On s’en méfie… on les injurie. On veut les taxer plus lourdement — quand bien même les 1% les plus riches de la population américaine, par exemple, paient déjà 40% du total des impôts — bien plus que leur part équitable.

Ils fuient vers des paradis fiscaux… mais l’administration les poursuit. Les Américains riches sont en danger même s’ils n’ont pas mis le pied aux Etats-Unis. Et les riches de quasiment tous les pays sont harcelés par les inspecteurs des impôts.

En Union soviétique, les Koulaks étaient torturés jusqu’à ce qu’ils révèlent leurs caches de nourriture. Aujourd’hui, les riches sont assaillis un peu partout par des agents du fisc, des audits, des contrôles, des saisies. Partout où ils vont, le fisc est sur leurs talons, tentant de trouver leurs caches d’argent…

Mais l’administration n’est pas la seule à prendre les riches pour cible. Les avocats. Les comptables. Les architectes. Les décorateurs. Les agences de voyage. Les thérapeutes. Les gestionnaires de patrimoine. Les conseillers fiscaux. Les tailleurs. Les stylistes. Les artistes. Les organisations caritatives. Les politiciens. Les psychiatres. Tous se tournent vers les riches pour financer leurs entreprises, leurs projets et leur style de vie.

▪ Un monde sans riches ?

Sans les riches, les services et les produits de luxe disparaîtraient du marché. Qui achèteraient leurs maisons tape-à-l’oeil… leurs bolides automobiles… leurs tenues ridicules… leurs affreux tableaux ? Qui soutiendrait les projets caritatifs et paierait les campagnes électorales ?

Les Trump Towers seraient abandonnées… les Ferraris disparaîtraient… Les manteaux en vison, les montres Patek Philippe, les costumes Zegna — terminé ! Le monde serait bien plus gris sans les couleurs tapageuses des riches.

Des industries tout entières sont consacrées à séparer les riches de leur argent. On les flatte, on les trompe, on s’en fait des amis, on les invite à des fêtes, on les fait marcher, on les traîne en justice, on les évalue — parfois même on les épouse –… juste parce qu’ils ont de l’argent.

Leur richesse elle-même — ou la réputation de ceux qui la détiennent — est tachée, salie et souillée. Des auteurs populaires nous assènent que "derrière chaque fortune, il y a un crime". Les films montrent les riches comme étant superficiels, stupides, vaniteux et impitoyables. Quasiment tous les méchants font partie des 1%. Les héros, en revanche, sont tous pauvres ou issus de la classe populaire.

L’une des pires choses quand on est riche, dit notre ami Nassim Taleb, c’est qu’il faut fréquenter d’autres riches. Mais faut-il s’étonner que tant de riches deviennent méchants, irascibles, capricieux et insensibles ? L’étonnant, en réalité, c’est combien d’entre eux ne le sont pas. Les personnes que nous avons rencontrées la semaine dernière étaient toutes très polies. En dépit du fait qu’elles sont traquées et poursuivies, elles ont gardé leur dignité et une attitude parfaitement civile.

Selon notre expérience, ces 1% ne sont pas pires que les 99%… Ils sont même peut-être un peu mieux. Leur conversation est plus animée. Ils ont fait plus de choses. Ils sont allés à plus d’endroits.

Alors qu’on les lâche un peu. Faites une prière pour eux. Et soyez heureux de ne pas en faire partie.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile