La Chronique Agora

Retour à l’anormal

récession, immobilier, emploi

Une récession imminente, des entreprises zombies, des problèmes immobiliers et des courbes de rendement inversées…

« Le marché du travail a créé 236 000 nouveaux emplois en mars, soit le chiffre le plus bas depuis 2020 ; les économistes craignent que la récession soit imminente.

Alors que des vagues de licenciements déferlent sur le marché du travail qui avait été longtemps florissant, le rapport sur l’emploi publié vendredi par le département du Travail a montré un ralentissement continu de l’emploi. Cela s’ajoute à une série d’éléments qui indiquent que l’économie pourrait refroidir plus rapidement que prévu, ce qui risque de provoquer l’atterrissage brutal que les responsables de la Réserve fédérale ont tenté d’éviter jusqu’à maintenant. »

Qu’est-ce qu’ils craignent ? De quoi sont-ils inquiets ?

Demandez à n’importe qui, tout le monde vous dira qu’une « récession » est une mauvaise chose. La baisse des cours boursiers est également une mauvaise chose. Et des taux d’intérêt plus élevés ne sont pas non plus une bonne chose.

Ils doivent partir du principe que les investisseurs, les spéculateurs et les entrepreneurs ne font jamais d’erreurs, que tout le monde est vend des actions et n’en achète pas… et que les taux d’intérêt élevés sont une sorte de malédiction – comme la peste – et non seulement un moyen de faire en sorte que l’offre de fonds disponibles corresponde à la demande.

Remettre les pendules à l’heure

Les choses qui sont déréglées finissent toujours par remettre sur le droit chemin. C’est une autre façon de dire qu’il existe un état « normal » des choses… et que lorsqu’elles s’en éloignent trop, il y a fort à parier qu’elles reviendront bientôt à leur forme initiale à un moment donné. Les économistes parlent de régression statistique ; il s’agit de l’une des forces les plus puissantes de la finance.

Aujourd’hui, l’économie américaine a besoin de se redresser… elle a besoin de se remettre dans le sens de la marche. Les taux négatifs (inférieurs à l’inflation) de la Fed ont affecté presque toutes les transactions financières dans l’ensemble de l’économie. Les faibles taux hypothécaires ont provoqué une bulle dans l’immobilier résidentiel… et commercial. Ils ont également provoqué un énorme boom des emprunts – des ménages, des entreprises et des gouvernements. Ils ont financé des entreprises qui n’auraient jamais dû voir le jour… et ont permis à des entreprises zombies de dilapider des milliards de dollars de capital réel.

Ils ont aidé le gouvernement américain à financer des programmes qui n’auraient jamais dû voir le jour… et encore moins être imaginés… ils lui ont permis d’accorder des pensions, des subventions, des prêts et des mesures de relance qu’il ne pouvait pas se permettre… et d’imaginer qu’il pouvait réparer des erreurs commises il y a plus de 150 ans (réparations) ainsi que celles commises à l’autre bout de la planète (guerres en Irak, en Afghanistan et en Ukraine).

Une récession est nécessaire. C’est ainsi qu’une économie honnête se remet en ordre de marche.

Et la voilà qui arrive ! Outre la chute du marché de l’emploi, regardons le marché du logement. L’année dernière, les prix ont atteint un niveau record. Depuis, il y a eu sept mois consécutifs de baisse, ce qui représente une perte totale de 5% – soit la plus forte baisse sur sept mois depuis plus de dix ans.

Cinq pour cent, ce n’est pas beaucoup. Les prix des logements sont encore près de 40% plus élevés qu’il y a trois ans. Ils ont encore beaucoup de chemin à parcourir avant de revenir à la normale. Mais là encore, pourquoi un logement moins cher est-il une si mauvaise chose ? En 1971, il fallait à l’Américain moyen environ 36 heures de travail par mois pour payer l’hypothèque d’une maison moyenne. Aujourd’hui, ce chiffre est de 110 heures, soit trois fois plus. Une récession du marché du logement faciliterait grandement la tâche des gens qui veulent garder un toit au-dessus de leur tête.

Une correction périlleuse

L’immobilier commercial pourrait être confronté à une correction encore plus périlleuse. USA Today :

« Selon les analystes de Morgan Stanley, l’immobilier commercial se dirige vers une crise encore pire que celle de 2008.

[…] Un propriétaire de bureaux appartenant à PIMCO a fait défaut sur un prêt hypothécaire à taux variable pour sept immeubles de bureaux en Californie, à New York et dans le New Jersey ; les paiements mensuels ont augmenté en raison des taux d’intérêt élevés.

Brookfield, le plus grand propriétaire d’immeubles de bureaux du centre de Los Angeles, a choisi ce mois-ci de ne pas rembourser les prêts de deux immeubles, plutôt que de refinancer la dette en raison de la faible demande de bureaux.

Selon Morgan Stanley, plus de la moitié des 2 900 Mds$ de prêts hypothécaires commerciaux devront être refinancés au cours des deux prochaines années, ce qui donne une idée de ce qui se passera probablement à l’avenir.

‘Même si les taux actuels restent inchangés, les nouveaux taux de prêt seront probablement supérieurs de 3,5 à 4,5 points de pourcentage pour de nombreux prêts hypothécaires existants’, a écrit Lisa Shalett, responsable des investissements chez Morgan Stanley, dans un rapport récent. »

Et ce n’est pas la seule bonne nouvelle. Les prêts bancaires sont eux aussi en train de se remettre sur le droit chemin.

Bloomberg :

« Les prêts bancaires américains ont connu la plus forte contraction jamais enregistrée au cours des deux dernières semaines de mars, ce qui montre un resserrement des conditions de crédit dans le sillage de plusieurs faillites bancaires très médiatisées qui risquent de nuire à l’économie. »

Le temps, c’est de l’argent

L’indicateur de récession le plus important provient des taux d’intérêt eux-mêmes. L’un des signes précurseurs les plus sûrs d’une récession est une « courbe de rendement inversée », c’est-à-dire lorsque les taux sont plus élevés pour les prêts à court terme que pour les prêts à long terme.

Les risques augmentent avec le temps. Ainsi, normalement, le taux d’intérêt que vous payez lorsque vous empruntez à long terme est plus élevé que pour un prêt à court terme. Et lorsque les deux sont inversés, c’est le signe que quelque chose ne va pas. Reuters :

« Les commentaires optimistes du président de la Réserve fédérale Jerome Powell ont contribué à pousser la courbe des rendements du Trésor américain à son inversion la plus profonde depuis 1981 mardi, mettant une fois de plus l’accent sur ce que de nombreux investisseurs considèrent comme un signe majeur de récession imminente.

[…] Ils estiment que l’augmentation des coûts d’emprunt finira par nuire à l’économie, obligeant la Fed à assouplir ultérieurement sa politique monétaire. Ce phénomène est suivi de près par les investisseurs, car il a précédé les récessions passées.

Si l’on prend l’exemple des six dernières récessions, elles ont toutes commencé en moyenne 6 à 36 mois après l’inversion de la courbe, a déclaré [Anu Gaggar]. »

Comment l’inversion sera-t-elle corrigée ? Comment la bulle immobilière va-t-elle éclater ? Comment les sociétés qui gaspillent de l’argent seront-elles liquidées, les créances douteuses effacées et la discipline rétablies dans le monde de la finance ?

Une récession y contribuera.

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