▪ Outre le fait que le mois d’avril commence par de joyeux « poissons » (depuis dimanche, c’est Pyongyang qui s’y colle avec sa menace atomique), nous avons collecté toute une série de bonnes nouvelles au cours des dernières 24 heures. C’est à tel point que nous ne savons trop par quoi commencer.
Bon, comme nos amis américains ont repris le travail — malgré l’ultimatum nord-coréen — alors que nous finissons de digérer le gigot pascal, nous allons commencer par « le chiffre du jour ». Il s’agit de l’indice ISM manufacturier : il a enregistré une chute inattendue de 54,2 vers 51,3, alors que le consensus tablait sur un score inchangé de 54,2.
C’est doublement encourageant. D’abord parce que l’ISM demeure au-dessus du seuil d’expansion des 50… Ensuite parce que c’est tellement plus mauvais que prévu que Wall Street se voit conforté dans l’anticipation d’un QE3 éternel (comme si la série noire des indicateurs publiés jeudi dernier n’y suffisait pas).
Wall Street a cependant cédé du terrain en cette première séance du deuxième trimestre 2013. Mais la bonne nouvelle, c’est que le Dow Jones a inscrit un nouveau record absolu à 14 606 points au cours des premiers échanges — et comme il termine en repli de seulement 0,04% à 14 573 points, on se fiche bien de savoir que le S&P 500 a cédé 0,45% ou que le Russell 2000 ou le Dow Transport ont décroché de 1,45% en moyenne.
Les marchés étaient également ouvertes en Asie (Tokyo a perdu -1,65%) mais tous les yeux étaient braqués vers la Chine où l’indice PMI du secteur manufacturier en mars a rebondi (de 50,1 vers à 50,9). C’est bien moins que prévu puisque le consensus tablait sur 52 après des mois de janvier et février dont l’activité avait été ralentie par les festivités du Nouvel an chinois.
▪ Revenons en Europe…
Les perspectives continuent de se dégrader en Espagne ; les ventes de détail poursuivent leur effondrement, les ventes de voitures ont chuté de 15% en février. Madrid prévoit désormais une contraction du PIB de 1% en 2013 au lieu d’une contraction de 0,5% lors de ses précédentes prévisions.
Nombre d’économistes anticipent depuis longtemps une récession comprise entre -1,5% et -2% cette année. Le gouvernement de M. Rajoy est encore loin du compte mais il serait en train de négocier un nouvel objectif de déficit budgétaire de 6% du PIB en 2013 auprès de la Commission européenne, au lieu de 4,5% initialement.
Changeons un peu de registre avec l’Italie : PierLuigi Bersani s’est avéré incapable de construire une alliance qui sorte son pays de la crise politique. Face à l’impossibilité de former une majorité susceptible de voter la confiance à un gouvernement minoritaire, le président Giorgio Napolitano se propose de contourner les séquelles du vote démocratique. Pour ce faire, il nommerait deux personnalités chargées de proposer un ensemble de mesures transcendant les clivages politiques et susceptibles de recueillir un vote majoritaire des deux chambres.
Le véritable but serait de repousser une nouvelle convocation des électeurs devant les urnes afin que puisse se dérouler sereinement l’élection d’un nouveau président de la République.
Silvio Berlusconi, désormais en tête dans les sondages, ne manquera pas d’essayer de torpiller les manoeuvres politiciennes de l’actuel président Giorgio Napolitano.
▪ Chypre, ça n’arrête pas !
La meilleure nouvelle du week-end provient certainement de Chypre, cependant, où de nombreuses rumeurs font état de fuites massives de capitaux avant l’élaboration du « plan de sauvetage » européen puis durant la période de mise en rideau du système bancaire local.
Ouf, nous avons eu chaud ! Les médias et Bruxelles avaient tenté de nous faire croire que les « gros poissons » — notamment de gros déposants non-résidents — allaient enfin contribuer au renflouement de l’île… mais il y a tout lieu d’espérer qu’ils ont réussi à s’échapper, via Londres, vers d’autres paradis fiscaux comme le Luxembourg, la Hollande, la Lettonie ou tout simplement la Suisse.
Plus distrayant encore, d’autre rumeurs font état de transferts massifs de capitaux opérés fin février/début mars par des proches de l’ancien président mais également de celui récemment élu. Il y aurait également l’effacement inexpliqué de nombreuses dettes contractées par des hommes politique chypriotes auprès des banques locales… au prétexte que le remboursement ne leur était pas réclamé.
Voilà un moyen simple et efficace de toiletter les comptes bancaires ! Hop, d’un simple coup de gomme, on s’épargne des procédures de recouvrement fastidieuses et inutiles.
Si nous résumons la situation, les milliardaires fuyant le fisc russe et certaines catégories d’emprunteurs un peu « particuliers » vont certainement s’en tirer sans trop de casse. Ce sont les simples particuliers ou les entreprises chypriotes qui vont devoir financer la quasi-totalité du renflouement de l’état et du système bancaire.
Du coup, ce ne sont plus 30% qui vont être ponctionnés en moyenne au-dessus du seuil des 100 000 euros mais au minimum 60% — voire la quasi-totalité de leurs avoirs pour les déposants de la banque Laiki en liquidation (les économies de toute une vie pour nombre de retraités, ou la trésorerie de nombreuses entreprises qui vont pouvoir mettre la clé sous la porte dès ce mardi).
La bonne nouvelle, c’est qu’aucune succursale bancaire n’a été incendiée ce week-end et que le Parlement de Nicosie est encore en un seul morceau. Le président Anastasiadès félicite les citoyens pour leur sang-froid et le calme dont ils ont su faire preuve.
C’est sûr, lorsqu’on vient de prendre un K.O. et que l’on gît les bras en croix sur le carreau, on est très calme… C’est au réveil que la mauvaise humeur peut éventuellement s’emparer des victimes.
Nous imaginons déjà la tête de ceux qui verront disparaître 60% de leurs économies lorsqu’ils vont recevoir leur feuille d’impôt et se voir réclamer plus d’argent qu’il n’en reste sur leur compte… Mais ce n’est pas un problème car cela ne concerne que quelques centaines de contribuables sur une population de 850 000 personnes : le gouvernement est donc à l’abri de manifestations monstre.
Le seul problème… c’est que ce sont pratiquement tous les plus gros employeurs de l’île.
Prudent, le président Nicos Anastasiadès ne se risque pas au jeu des pronostics concernant l’ampleur de la récession qui va frapper l’île cette année et l’an prochain. Il a bien raison car en fait, ce qui va survenir s’appelle une dépression… et elle sera d’une ampleur telle qu’il n’en a plus été observé dans un pays occidental depuis la crise argentine au tout début du 21ème siècle.
La différence, c’est que Chypre n’a ni troupeaux, ni chutes d’Iguaçu, ni richesses minières, ni tango… mais l’île peut déjà opter pour le requiem.