La Chronique Agora

A quoi est vraiment due la remontée des taux américains ?

taux US

Personne ne semble savoir pourquoi les taux longs remontent, l’inflation dans l’économie réelle restant modérée.

S’il y a bien un sujet qui divise les commentateurs, c’est l’évolution de la hausse des taux longs US. Certains analystes anticipent une remontée progressive quand d’autres, comme Albert Edwards, attendent des taux… négatifs !

5 juillet 2017 : le jour du plus bas sur le 10 ans US… jusqu’à présent

Depuis le début des années 1980 et ce jusqu’en juillet 2017, le 10 ans US plongeait avec un premier plus bas à 1,404% en juillet 2012, alors que la dette de l’Etat fédéral américain faisait office de valeur refuge pendant que la Zone euro était en crise.

Le 10 ans US est ensuite vivement remonté et a connu un second plus bas à 1,367% le 5 juillet 2017, alors que le doute planait sur la santé du système bancaire italien.

Puis le taux est progressivement remonté, franchissant à nouveau la ligne Maginot des 3% ce 25 avril, avant de ramper entre 2,9% et 3%, pour finalement dépasser une nouvelle fois ce niveau le 9 mai, après que Trump a annoncé que les Etats-Unis se retiraient de l’accord sur le nucléaire iranien.

Source : tradingeconomics.com

C’est une augmentation de 120% du coût de la dette US en à peine 10 mois !

Quid de la suite ?

Chaque hausse de taux enclenche une dynamique déflationniste

N’ayant pas de boule de cristal, je me contenterai de vous dire que la seule chose certaine, c’est que chaque hausse des taux porte en elle le germe de la baisse de taux qui s’ensuit à court terme.

D’où le fait que l’évolution des courbes de taux ait lieu en dents de scie.

Alors, « Âge de glace » (Edwards), « marché baissier en hibernation » (Gross) ou remontrée des taux (Dimon & Hasenstab) ?

Malgré le bref passage au-dessus des 3%, Albert Edwards ne croit pas que les tauxont cassé leur tendance baissière de long terme. Pour ce grand déflationniste, nous sommes toujours dans la tendance entamée il y a 25 ans. Il faudrait que l’on passe durablement au-dessus des 3% pour qu’il remette en cause son objectif de taux négatifs sur le 10 ans US.

Bill Gross est récemment revenu sur son pronostic haussier pour les taux. Le 9 janvier dernier, la star de la gestion obligataire avait annoncé le début du retournement du marché obligataire, après 25 ans. Le 3 mai, le milliardaire a indiqué qu’il jetait temporairement l’éponge.

Il s’attend désormais à ce que le taux du 10 ans US erre entre 2,80% et 3,25% au cours du restant de l’année, dans ce qu’il appelle un « marché baissier en hibernation ».

D’autres analystes, comme par exemple Jamie Dimon (JP Morgan) ou Michael Hasenstab (Franklin Templeton), ont récemment averti le public que l’on pourrait bientôt être confrontés à des taux supérieurs à 4% sur le 10 ans US.

Les avis sont donc très partagés.

La fin de la « Goldilocks Economy » ?

La « Goldilocks Economy » fait référence au conte Boucles d’or et les Trois Ours des frères Grimm.

En deux mots, l’histoire raconte la visite d’une fillette dans une maison occupée par une famille composée de trois ours. Alors que ces derniers sont partis se promener, Boucles d’or pénètre dans la maison pour en goûter la nourriture (elle se régale de celle de l’ourson, ni trop chaude, ni trop froide), se reposer dans un fauteuil (elle casse celui de l’ourson, ni trop dur, ni trop moelleux) puis dormir dans un lit (comme il est parfaitement à sa taille, c’est sur celui de l’ourson qu’elle jette son dévolu). Vous vous doutez que nos protagonistes finissent par se rencontrer…

Quel rapport entre le conte des Grimm et nos affaires financières ? Vous le comprendrez sans mal en lisant cette définition que je vous traduis depuis Investopedia :

« Une économie Boucles d’or est une économie qui n’est ni trop chaude – sans quoi elle créerait de l’inflation –, ni trop froide – sans quoi elle se dirigerait vers une récession. Ce terme désigne une économie qui fonctionne à un niveau optimal en assurant le plein emploi et la stabilité économique. […] elle se caractérise souvent par un taux de chômage faible, des valeurs d’actifs en augmentation (actions, immobilier, etc.), des taux d’intérêt bas, une croissance du PIB vive mais prospère et une inflation faible ».

C’est à David Shulman que l’on doit la première utilisation de cette expression dans son livre The Goldilocks Economy: Keeping the Bears at Bay, paru en mars 1992.

Certains considèrent que 2017 a été le pic de cette configuration économique, avec un grand écart entre le développement de l’économie réelle et celui de l’industrie financière.
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Le 21 mars, la première réunion de la Fed sous Jerome Powell faisait ressortir que l’économie américaine allait presque trop bien, avec des taux de croissance révisés à la hausse, un chômage révisé à la baisse et pas d’inflation en vue.

Une vision qui a été confirmée lors de la réunion du 2 mai – même si la Fed a pris acte qu’avec une inflation annuelle à 1,9%, elle est très proche de son objectif de 2% – lors de laquelle c’est le statu quo qui a prévalu. Bref, un vrai conte de fées digne des frères Grimm !

Cependant, avec cette remontée des taux longs, certains s’interrogent…

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