** En Bourse, que faire quand les fondamentaux économiques ne sont pas terribles, quand les perspectives ne sont pas brillantes, quand la conjoncture est décidément morose ?
La réponse est toute simple : on se concentre sur les résultats des entreprises… et on fait ce qu’on peut avec ce qu’on a. C’est-à-dire pas grand’chose, mais ça a suffi à nourrir les marchés hier — avec un rebond tout à fait magistral du côté européen, et plus nuancé outre-Atlantique.
Le CAC 40 a ainsi grimpé de 1,88% sur la séance d’hier — repassant à 4 408 points à la clôture. Comme me le disait Philippe Béchade (qui n’est pas des nôtres aujourd’hui pour cause d’impondérables, mais devrait être de retour dès demain), "on a vu plutôt juste dans le timing du rebond". A Londres, le FTSE 100 faisait presque aussi bien, avec une hausse de 1,6%, tandis qu’à Francfort, le DAX progressait de 1,43%.
Les marchés tenaient donc la forme, avec seulement six valeurs terminant dans le rouge à la clôture pour le CAC 40. Les secteurs de l’automobile et des technologiques ont mené le bal… avec "des résultats conformes aux attentes" pour Yahoo! et "une perte moins importante que prévu" pour STMicroelectronics. Enthousiasmant, non ?
Mais qu’importe : la Fed et les autorités américaines sauveront Fannie Mae et Freddie Mac, le pétrole baisse (le baril de WTI New York est repassé sous la barre des 125 $, à 124,44 $ contre 128,42 $ mardi), le dollar se remet un peu (1,5689/euro, contre 1,5780 la veille)…
Bref, tout va bien, si si ! Regardez les marchés américains : le Dow Jones a grimpé de 0,26% sur la séance de mercredi, à 11 632,38 points, tandis que le Nasdaq s’adjugeait 0,95%, terminant à 2 325,88, et que le S&P 500 grappillait 0,40%, à 1 282,10. C’est la preuve, non ?
** La preuve de quoi, voilà ce qu’il faudrait déterminer. La preuve d’une vraie reprise, ou la preuve de l’aveuglement — volontaire ? — des intervenants sur les marchés ? Parce que parallèlement à l’accès de hausse des places mondiales, on apprend par exemple qu’en France, les industriels n’ont décidément pas le moral.
Si l’on en croit l’INSEE, citée dans La Tribune, "Selon les chefs d’entreprise interrogés en juillet, la conjoncture industrielle s’est à nouveau dégradée : l’indicateur synthétique du climat des affaires se situe désormais en dessous de sa moyenne de longue période".
L’indice concerné est passé à 98 points en juillet, contre 101 points en août… et ça ne devrait pas aller en s’arrangeant, comme l’explique La Tribune : "Les entrepreneurs de l’industrie manufacturière constatent une augmentation de leurs stocks, et une baisse de leurs carnets de commandes, ajoute l’INSEE, estimant qu »au vu des perspectives personnelles de production, l’activité continuerait à ralentir au cours des prochains mois’. ‘Les perspectives générales, qui représentent l’opinion des industriels sur l’activité de l’industrie dans son ensemble, se dégradent nettement’, poursuit l’Insee".
Et que voyons-nous là ? Toujours en France, la consommation des ménages recule : -0,4% le mois dernier pour les produits manufacturés. Pas franchement un ingrédient idéal pour nourrir une croissance saine et solide…
Sans parler des Etats-Unis, où la Fed a publié hier son Beige Book sur les tendances et perspectives du moment — et on ne peut pas dire que l’humeur soit des plus encourageantes : Bernanke & Co. s’inquiètent en effet d’un ralentissement économique généralisé, dans tout le pays : activité, consommation, industrie, immobilier… tout chute, dégringole, vacille, s’enlise, s’embourbe.
Mais ce qui semble surtout inquiéter la Réserve fédérale, c’est l’inflation : "’toutes les régions ont qualifié les pressions sur les prix de fortes ou en augmentation’, avec une hausse des prix des matières premières et du pétrole notamment. Les prix de détail ont ainsi ‘augmenté dans plusieurs régions’", cite La Tribune. Une indication quant à une future hausse des taux ?
En attendant, inflation + ralentissement économique (déflation) : on a la recette parfaite pour une belle période de stagflation. A suivre !