La Chronique Agora

Quand c’est flou…

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Les investisseurs sont désorientés par des signaux contradictoires et des prix erratiques. Autant de problèmes qui n’apparaissent pas par magie.

« En résumé, le problème est qu’entre le krach des dot-com, la frénésie d’impression monétaire qui a suivi et l’inondation de crédits des banques centrales en 2020, les bilans des banques centrales mondiales sont passés de 4 700 milliards de dollars à près de 42 000 milliards de dollars. Cette multiplication par 9 de la masse monétaire n’a entraîné qu’une multiplication par 2 du PIB. Le reste est allé dans les poches des élites et a créé des bulles d’actifs qui risquent maintenant d’éclater. »
~ John Dienner

M. Dienner décrit une « inflation » classique. Plus d’argent entraîne une hausse des prix. Mais attendez… où est l’inflation ?

CNN annonce :

« Le marché immobilier est entré en récession. »

On lit dans cet article que « les ventes de maisons sont en baisse de 20%, de juillet 2021 à juillet 2022 ».

Faillites immobilières

MoneyWise rapporte par ailleurs que « les acheteurs de maisons annulent leurs transactions au rythme le plus rapide depuis la pandémie ».

Bloomberg ajoute :

« Les prêteurs hypothécaires américains commencent à faire faillite.

Le secteur hypothécaire américain voit ses premiers prêteurs mettre la clé sous la porte après une hausse soudaine des taux d’intérêt, et la vague de faillites qui s’annonce pourrait être la pire depuis l’éclatement de la bulle immobilière il y a environ 15 ans.

On s’attend néanmoins à une série de faillites suffisamment importante pour déclencher un pic de licenciements dans un secteur qui emploie des centaines de milliers de travailleurs, et potentiellement une augmentation de certains taux de prêts. Une grande partie de l’activité est désormais contrôlée par des prêteurs indépendants, et avec la chute des volumes de prêts hypothécaires cette année, beaucoup d’entre eux luttent pour rester à flot. »

Cela ressemble plus à de la déflation qu’à de l’inflation. Et beaucoup de gens sont confus par la situation. Ceux qui ne le sont pas ne réfléchissent pas assez.

Comme John Dienner le souligne ci-dessus, les banques centrales ont « imprimé » beaucoup d’argent. Ce n’est pas une coïncidence, insinue-t-il, si les prix sont généralement en hausse.

L’« inflation » européenne est de 8,9%. Les prix à la consommation allemands augmentent au rythme le plus rapide depuis 70 ans. L’Argentine se débat avec un taux d’inflation de 90%.

Mais si l’« impression monétaire » par les banques centrales provoque des augmentations de prix, pourquoi les prix des logements, des actions, ou encore de la purée en poudre baisseraient-ils ?

Danger en vue !

Oh là là… oh là là… si seulement c’était plus simple ! En début d’année, les actions et les obligations ont connu l’un des pires semestres de leur histoire. Le baril de brent était encore à 122 $ en juin ; il est maintenant à 95 $. Désormais, les prix des maisons baissent aussi. Qu’est-il arrivé à tout l’argent de la planche à billets ?

De nombreux économistes et analystes de marché pensent que la menace est écartée. Ils voient le « pic d’inflation » derrière nous… et donnent leur « feu vert ». Maintenant, la Fed peut se détendre, disent-ils… le groupe peut s’accorder… et les actifs peuvent repartir à la hausse.

Selon le décompte officiel, les prix depuis 2009 ont augmenté d’environ 40%. Mais si la masse monétaire a augmenté quatre fois plus vite que le PIB, les prix n’auraient-ils pas dû augmenter quatre fois aussi ? Au lieu de 40%, ne devraient-ils pas augmenter de 400% ?

Et la Fed ne prête-t-elle pas encore de l’argent à un taux qui est bien inférieur à l’inflation des prix à la consommation ? L’IPC est de 8,5%. Mais la Fed prête à 2,5%. Un emprunteur réalise un gain de 6% simplement en prenant l’argent de la Fed. Comme cela encourage l’emprunt, cela encourage également les banques à créer de l’argent qu’elles peuvent prêter. Plus d’argent devrait entraîner des prix encore plus élevés.

Pourtant, de nombreux économistes et politiciens (comme Elizabeth Warren) soutiennent que cette hypothèse est erronée, que l’impression de l’argent n’a pas grand-chose à voir avec la hausse des prix à la consommation et qu’en augmentant les taux d’intérêt, la Fed fait plus de mal que de bien. Selon leur analyse, si on peut l’appeler ainsi, la Fed n’aurait jamais dû prendre la peine d’essayer d’enrayer l’inflation. Les diminutions de prix se feraient d’elles-mêmes, pensaient-ils, à mesure que les goulets d’étranglement et les problèmes affectant la chaîne d’approvisionnement seraient résolus.

Que se passe-t-il ? Les prix augmentent-ils ou baissent-ils ? Sommes-nous hors de danger ?

Hmmm… voyons voir.

Plus d’argent, plus de problèmes

Tout d’abord, le concept de l’inflation qui est largement accepté est celui-ci : si l’on ajoute de l’argent au sein d’une société, les prix augmentent. L’histoire ne s’arrête pas là, bien sûr, mais si vous entrez trop dans les détails, vous risquez de passer à côté de l’essentiel.

La majeure partie de l’impression monétaire de la Fed va à Wall Street (car la Fed utilise son argent frais pour acheter des obligations) ; là, elle fait grimper le prix des actifs.

Les actifs sont différents des biens de consommation. Si vous possédez une action d’une valeur de 100 $, vous avez un droit sur des biens et des services d’une valeur de 100 $. Si l’action passe à 200 $, vous pouvez acheter deux fois plus de biens et de services.

Le problème est que, comme nous l’apprend M. Dienner, la production de biens et de services est loin de correspondre à la quantité de dollars. Ainsi, à mesure que le prix des actifs augmente, de nombreuses personnes ont des créances sur des biens et des services qui n’existent pas.

La résolution de ce déséquilibre est la déflation… et/ou l’inflation. D’une manière ou d’une autre, les prix des actifs doivent être alignés sur les biens et services disponibles.  La baisse des prix des actifs (déflation) réduit les prétentions des investisseurs sur la production réelle (PIB).

Parallèlement, la hausse des biens de consommation contribue également à corriger le déséquilibre. Un taux d’inflation de 100 %, par exemple, réduit de moitié la valeur des prix des actifs chaque année.

Hausse des prix à la consommation d’un côté. Chute du prix des actifs de l’autre. Et les ménages, investisseurs et entreprises, écrasés entre les deux.

Mais pour combien de temps ?

A suivre…

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