La Chronique Agora

L’Etat a-t-il aussi détruit la famille ?

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Les statistiques mesurent que plus c’est mieux, sans jauger véritablement la qualité. La multiplication du crédit a conduit à gonfler de nombreuses données économiques. Mais où sont les emplois bien payés et la qualité de vie ?

Nous sommes toujours sous le choc de notre découverte d’hier, à savoir qu’en réalité, l’économie recule depuis 1989.

Comment le savons-nous ?

Nous venons de regarder les chiffres du gouvernement relatifs à la croissance du PIB, et nous les avons corrigés de l’inflation comme le Bureau of Labor Statistics l’aurait fait sous le mandat de Ronald Reagan.

Cela nous aide à comprendre pourquoi… 3 000 ans après l’invention de la vraie monnaie… 240 ans après que James Watt ait inventé le moteur à vapeur… et 30 après qu’Al Gore ait « inventé » internet…

… au sein de l’économie la plus avancée que le monde ait jamais connue… et disposant de 15 000 économistes employés à plein temps… de 24 000 psychiatres en activité… et de 70 000 ingénieurs fraîchement diplômés de ses universités chaque année…

…la famille moyenne américaine ne dispose même pas de 500 dollars en cas d’urgence. Et le « chef de famille » moyen gagne moins à l’heure actuelle, en termes « réels » (corrigés de l’inflation), qu’en 1973.

Nous avons déjà vu de quelle façon l’argent facile de l’Etat a perverti le système financier, ainsi que notre système politique. Mais qu’a-t-il fait à la famille ?

Avant les économistes…

De la proclamation de la République jusqu’au 19è siècle, et jusqu’au début du 20e siècle, l’économie américaine s’est rapidement développée.

Sans banque centrale. Sans politique des taux d’intérêt. Sans économistes salariés. Sans stimulus contra-cyclique. Sans rien de tout cela.

Ensuite, des économistes rusés ont élu domicile dans les chaudes et douillettes tanières de Washington et de Wall Street.

En 1913, le Système de la Réserve fédérale a été instauré en tant que discrète banque centrale.

Dans les années 1930, les économistes travaillant pour le gouvernement Roosevelt ont réussi à prolonger une dépression (qui, habituellement, ne durait que quelques mois) sur toute une décennie.

Ensuite, en 1971, le gouvernement Nixon s’est débarrassé de ce bon vieux dollar si fiable, adossé à l’or, pour créer à sa place un ersatz de billet vert adossé au crédit.

En 1978, la Loi Humphrey-Hawkins a chargé la Fed de maintenir le plein emploi, ainsi que la stabilité de la croissance et de la monnaie.

A partir de là… la croissance économique a ralenti.

Plus le gouvernement et la Fed pratiquaient de massages cardiaques… et augmentaient la puissance des défibrillateurs… plus l’économie fondée sur des fantasmes financiers devenait florissante. Et plus l’économie réelle déclinait.

« Ne luttez pas contre la Fed ». C’était la devise de Wall Street. Le « Greenspan put » [NDR : politique excessivement accommodante]… le « Bernanke put »… et à présent le « Yellen put »… étaient les meilleurs paris gagnés d’avance disponibles sur le marché.


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Autrement dit, les dés étaient pipés.

Une démarche de simple d’esprit : se fier aux chiffres pour mesurer la qualité

Mais nous nous méfions de toutes les statistiques, même de celles que nous modifions nous-mêmes.

Et vous le devriez également.

En revanche, comme l’a dit en son temps le légendaire Yogi Berra de l’équipe des Yankees [NDR : baseball], on peut voir beaucoup de choses, juste en regardant. Or lorsque nous regardons, nous voyons que l’économie a l’air étrangement mort.

Rappelez-vous que les économistes ne peuvent mesurer la qualité. Alors à la place, ils se concentrent sur la quantité. Ils peuvent faire augmenter leurs chiffres, mais ne savent pas du tout si quiconque s’en sortira mieux grâce à ça.

Et dans cette démarche de simple d’esprit visant à faire augmenter les chiffres, ils ont déformé et endommagé toute la société : notre économie, notre gouvernement… et même nos familles.

Regardez simplement autour de vous…

Les centres commerciaux où les gens font des achats à crédit. Les maisons achetées à crédit, dont la propriété n’est jamais véritablement acquise… mais toujours refinancée. Les voitures financées sur 84 mois sans intérêts. Les repas consommés dans les fast-foods (tout ce secteur est en grande partie le fruit du crédit ; lisez la suite) et payés avec du crédit. Les étudiants à l’université… pour la seule raison que, grâce au crédit, il est plus facile d’aller à l’université que de trouver un travail décent.

Et ce n’est pas étonnant. Les emplois décents – ceux qui permettent de « gagner sa vie » — sont difficiles à trouver. Seule 50% de la population en âge de travailler dispose d’un emploi à plein temps. Et seule la moitié gagne plus de 32 000 dollars par an.

Pourquoi ?

Parce que le système du crédit bon marché a permis de délocaliser aisément les bons jobs vers d’autres endroits… et compliqué la création d’emplois de meilleure qualité sur le territoire national.

De nouveaux emplois sont synonymes de nouvelles entreprises. Mais le pourcentage de nouvelles entreprises de moins d’un an… et de la main-d’oeuvre qui travaille pour elles… ne représente que la moitié, environ, de ce qu’il était en 1980.

Pourquoi ?

Parce que le nouveau système monétaire récompense les initiés solidement établis. Il pénalise les tout nouveaux concurrents qui créent des emplois.

Les secteurs peuplés de compères sont protégés par des milliers de réglementations qui augmentent le coût d’entrée. Et les compères du secteur financier contrôlent également le flux du crédit.

Il est facile d’obtenir de l’argent si vous êtes une grande entreprise. Mais dans le cas contraire, cela peut être très difficile.

Une économie de commodité : mais l’utile garantit-il le plaisir

Autrefois, les entreprises nouvellement créées étaient financées par l’épargne, qui provenait souvent d’amis et de la famille.

Mais aujourd’hui, qui possède des économies ? Qui en a besoin, alors que l’on met à votre disposition un crédit illimité ?

Et comme les emplois « gagne-pain » ont disparu, ceux qui les occupaient ont également disparu. Dans les foyers post-1970, mari et femme ont dû gagner leur vie. Les familles avaient désormais besoin de deux salaires, et non d’un seul.

Vous allez peut-être me demander la chose suivante : « Où est le problème ? Les gens décident seuls… Les femmes préfèrent travailler ».

Oui, mais ils n’ont pas pris cette décision en vase clos. Ils l’ont prise dans un tourbillon où le crédit volait de toutes parts… et les prix flambaient. Les salaires stagnaient, dans les années 1970. Que devaient faire les femmes ?

Aujourd’hui, vous trouvez toute la nourriture que vous voulez au supermarché : on l’a déjà préparée à votre intention. Ou bien il suffit de mettre le nez dehors pour trouver une douzaine de différents fast-foods ou endroits où l’on peut se restaurer en famille. Ils sont tous très pratiques.

Peut-être allez-vous dire : « Eh bien, les consommateurs ont parlé. C’est ce qu’ils veulent ». Mais lorsque mari et femme travaillent, quel autre choix existe-t-il ?

Ils ont obtenu cette commodité de pouvoir prendre leurs repas à l’extérieur. Mais ils ont renoncé à quelque chose que les économistes ne mesurent pas : le plaisir de préparer et déguster des repas cuisinés à la maison… la stabilité apportée par une personne qui était à la maison et se concentrait sur la famille à plein temps… Quelqu’un qui ne faisait pas partie de cette économie routinière alimentée par le crédit.

La qualité de la vie de famille a changé. Est-ce pour le meilleur ? Difficile à dire.

Le chiffre d’affaires des fast-foods a augmenté. Le PIB a augmenté. On a embauché davantage d’employés de fast-foods. Les économistes ont contemplé leur oeuvre tel Dieu jetant un regard sur le monde qu’il venait de créer.

« Pas mal », ont-ils déclaré.

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