La Chronique Agora

Terminé, les pseudo-arguments scientifiques : observez juste ce que font les « grosses mains »

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▪ J’étais assez tranquille sur le scénario concocté ce lundi 30 juin par les sherpas de Wall Street parce que c’est systématiquement le même à chaque fin de mois depuis octobre… avec une seule exception qui confirmait la règle, en janvier. Ils n’allaient tout de même pas laisser chuter les indices américains et tolérer une hausse du VIX pour cette dernière séance du deuxième trimestre, qui conclut également le premier semestre 2014.

La programmation algorithmique a pour but avoué — les achats de la Fed ne sont plus un mystère pour personne — de doper la valorisation des actifs quelles que soient les circonstances. A charge ensuite pour les faiseurs d’opinion (médias grand public, gérants prêchant pour leur paroisse… et leurs bonus) d’inventer de belles raisons objectives pour justifier une hausse éternelle des valeurs mobilières.

Quand ces "raisons objectives" font rire tout le monde, l’ultime recours consiste à discréditer les sentinelles qui dénoncent l’escroquerie intellectuelle. Ceux qui pilotent les marchés, s’inspirant des travaux de Prix Nobel d’économie, savent parfaitement ce qu’ils font.

Les bonimenteurs excellent dans l’art de faire douter les esprits soupçonneux. Quand par exemple une pièce retombe 21 fois sur 24 sur le côté pile (et ce à plusieurs reprises depuis juillet 2012), j’affirme — à l’emporte-pièce selon mes détracteurs — que les illusionnistes de la Fed se sont servi 18 fois d’une pièce ayant deux côtés pile et six fois d’une pièce normale (d’où un 50/50 très ponctuel qui induit trois baisses, conformément aux lois des probabilités admises instinctivement par l’immense majorité de la population).

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▪ La force des probabilités et les lois de la nature
Des mathématiciens et des chercheurs férus de physique quantique vous expliqueront toutefois que notre "bon sens" est à côté de la plaque… que nous raisonnons à partir de fausses évidences… que les lois probabilistes sont infiniment plus complexes que ce que nos pauvres petits esprits peuvent concevoir. Après tout, le chat de Schrödinger peut être en même temps vivant et mort, un "pile" peut aussi bien être un "face"… ou les deux à la fois : c’est l’observateur qui en décide.

Autrement dit, le comportement de Wall Street ne fait que se conformer aux lois de la nature !

Des programmes informatiques extrêmement sophistiqués garantissant un résultat parfaitement aléatoire dans le cadre d’un cas de figure aussi élémentaire qu’un pile ou face ont prouvé que 10 tirages "pile" consécutifs sont tout à fait possibles (même si cela n’arrive qu’une fois sur un million de simulations de 10 tirages).

Il y a plus : après 10 tirages "pile", il est mathématiquement démontré que lors du 11ème lancer, la probabilité d’obtenir "pile ou face " est toujours très exactement de 50%. Autrement dit, le comportement de Wall Street ne fait que se conformer aux lois de la nature !

Ceux qui semblent obnubilés par le soupçon que les marchés sont manipulés en permanence sont en fait victimes de leur ignorance en matière de probabilités et des subtilités de la physique quantique… D’autant que la variable "injection de liquidités" fait opportunément pencher la balance en faveur de la hausse éternelle des actifs financiers.

La règle non-écrite qui postule que les indices peuvent difficilement aligner plus de cinq années de hausse (entre 58 et 62 mois) avant une correction majeure fait également partie de ce fariboles qui n’on strictement aucun fondement scientifique.

C’est un truc de grand’mère, un anachronisme à l’ère des transactions haute fréquence, une version moderne des superstitions moyenâgeuses… Une perte d’argent pour ceux qui persistent vainement à tenter de relier l’évolution des marchés à une quelconque réalité.

▪ Les marchés anticipent, c’est bien connu
Le passé, c’est le passé… et le présent, le temps de l’appréhender, a déjà basculé lui aussi dans le passé. Le marché surfe sur la crête de l’impermanence ; tout change tout le temps, rien n’est jamais fixé et de facto, les chaînes de causalité sont trop complexes pour être décryptées.

Une fois encore, vous pensez avoir établi un lien de cause à effet (du type "les banques centrales injectent de l’argent, il se forme des bulles d’actifs") ? En fait, vous n’apportez aucune démonstration solide de l’existence d’une bulle en ne vous basant que sur une hausse apparemment absurde des cours.

Vous ne faites qu’établir des parallèles réducteurs, énoncer des postulats sans preuve. Vous nagez en pleine subjectivité alors que les robots qui font la tendance agrègent, croisent et recombinent en permanence des milliards de données macro-économiques et historiques.

Ils passent en revue toutes les combinaisons, toutes les corrélations entre croissance, taux d’intérêt, cours des devises, prix de l’énergie, pluviométrie sur Manhattan, provenance géographique de l’équipe qui remporte le Super Bowl, évolution des ventes de McDonald’s en Tasmanie…

La sophistication des programmes algorithmiques dépasse l’entendement de 99% des épargnants mais également de la plupart des journalistes

▪ Vous jouez aux cartes ?
La sophistication des programmes algorithmiques dépasse l’entendement de 99% des épargnants mais également de la plupart des journalistes qui rendent compte de l’évolution des marchés au quotidien. Un peu comme des joueurs de belote qui s’improviseraient commentateurs d’un tournoi de bridge disputé entre des titulaires d’une médaille Fields de mathématiques.

Les journalistes savent que l’atout sert à couper et que les as l’emportent sur toutes les cartes "habillées"… mais ils passent à côté de l’essentiel qui se déroule en amont.

Il s’agit du corpus théorique permettant d’estimer au plus juste la force des "mains" en présence par le jeu des enchères successives — associé à une approche probabiliste de la distribution des couleurs, l’identification d’une coupe franche ou d’une "singlette" étant une des clés de la réalisation de contrats de type petit ou grand chelem.

Le jeu de la carte ne constitue ensuite que le déroulé d’une stratégie préétablie où le hasard et le bluff n’ont qu’une influence marginale.

Dans le domaine du trading, le glorieux hasard et le flair sont des éléments relégués au rang d’accessoires du passé. Le joueur doté d’une force de frappe financière et informatique suffisante (il suffit d’être alimenté en liquidités par la Fed) choisit lui-même — ou plutôt achète — la distribution des cartes qui lui garantissent de remporter la partie… même si l’adversaire dispose de quatre as, ce qui au bridge lui garantit au mieux deux plis sur 13 (dont évidemment celui de l’as à l’atout).

Résultat, le joueur qui a les moyens de se payer une main efficace gagne à tous les coups mais la partie perd totalement de son intérêt ; que l’adversaire soit bon ou même génial n’a plus aucune importance.

Les autres engagés dans le tournoi obligataire ou boursier — qui ne disposent pas des largesses de la Fed — finissent par jeter l’éponge, partagés entre écoeurement et consternation. Ne cherchez pas plus loin les causes de l’effondrement des volumes depuis fin 2012 : nous sommes en train d’assister à la faillite de la Fédération de bridge à la sauce Fed, avec vainqueur unique.

Sans suspense, il n’y a plus de participants, les adhérents rendent leur carte. Notre tâche consiste à deviner sur quel nouveau jeu — moins truqué si possible — ils comptent miser leur argent.

Les grandes fortunes qui investissent dans les hedge funds semblent se repositionner sur l’or et l’argent ainsi que sur le pétrole et les matières premières agricoles.

De gros paris sont en cours sur la poursuite de l’écrasement des écarts de taux entre maturités courtes (inférieures à deux ans) et longues (supérieures à huit ans). C’est typiquement un pari sur une croissance molle avec en arrière-plan une remontée imminente de l’inflation, hausse du prix de l’énergie oblige.

Poussé au bout de sa logique, c’est un scénario de stagflation qui se dessine en creux pour peu que la croissance des BRIC poursuive sa contraction… et c’est un scénario très négatif à court comme à moyen terme pour les actions !

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