La Chronique Agora

Youpi ! Le président assure nos arrières

Trump campagne présidentielle ultralibéralisme croissance économique déficit deep state régime présidentiel

Nous ne sommes pas vraiment contre M. Trump. Nous ne le détestons pas (nous ne l’avons jamais rencontré). Nous lui souhaitons bonne chance. Nous n’avons aucune raison de penser qu’il fera pire que Mme Clinton.

Malgré tout, les lecteurs ne sont pas satisfaits. Ils préfèrent la dévotion à l’observation.

Voici ce qu’écrit un lecteur :

« Quatre jours après l’investiture, vous déclarez que les ‘mesures’ du président sont mort-nées. Votre opinion ne se fonde pas sur les faits. Vous ne vous appuyez sur rien d’autre que votre ego irrité pour établir vos prédictions délirantes. Je ne supporte plus cette ignorance. Publiez ce message dans votre chronique, Bill, et voyons combien d’abonnés seront d’accord avec moi. S’il en reste, bien sûr. »

Habituellement, on sait ce qu’un président va faire, parce qu’il suit la ligne d’un parti.

Ce n’est pas le cas de celui-ci. Alors nous nous posons forcément les questions suivantes : qui est ce type ? Qu’est-ce qu’il va faire ? Qu’est-ce que cela va signifier ?

Hélas, il est plus crucial que jamais de prendre la mesure d’un président. Car jamais auparavant la politique n’a joué un rôle aussi important sur les marchés et au sein de l’économie.

Mais OK… Laissons tomber. Notre détermination flanche. Nous gémissons sous le repentir. Aujourd’hui, nous allons coiffer la casquette rouge et regarder le monde avec les yeux de ceux qui la portent.

Un gagnant qui nous aidera à grandir…

Nous voyons bien que Donald J. Trump est un « gagnant ». C’est notre héros, notre champion. Il se bat pour nous. S’il gagne, nous gagnons. S’il restitue sa grandeur à l’Amérique, nous en sortirons également grandis.

Commençons par les faits. Que savons-nous, jusqu’à présent ?

Eh bien, nous savons que le président est un type qui fait avancer les choses. Du moins certaines choses. Il a du talent pour passer à la télévision, placarder son nom sur des hôtels, et se faire élire président.

On peut qualifier cela de vanité. Mais comme nous portons la casquette rouge, nous dirons simplement qu’il assure très bien sa promotion.

A présent que Trump est président, un miracle s’est produit, en quelque sorte. Cette personne assurant si bien sa promotion, ainsi que celle de sa marque, va désormais assurer la nôtre. A présent, il fait attention au peuple.

« Vous ne serez plus jamais ignorés », a-t-il dit, lors de l’investiture, la semaine dernière.

Chers lecteurs, vous ne savez pas à quel point cela nous comble et nous soulage.

Certes, c’était ce que nous espérions : que l’on nous ignore. Mais positivons juste aujourd’hui, en disant par exemple que le président des Etats-Unis assure nos arrières.

Comment le savons-nous ?

Il l’a dit. C’est un fait.

Que savons-nous d’autre ?

Eh bien, nous savons qui il souhaite placer aux postes clés. Certains d’entre eux semblent assez bons.

Par exemple, Betsy DeVos, à l’Education, qui est milliardaire et milite en faveur des « schools of choice » [NDLR : l’école à la carte], pourrait améliorer les choses. Mais restons-en à l’économie.

Pour les postes financiers, le président a choisi des gens de chez Goldman Sachs. Il n’y a pas plus Goldman que Steve Mnuchin, qu’il a choisi comme secrétaire au Trésor : son père y a fait carrière avant lui.

Est-ce une mauvaise chose ?

Bien sûr que non !

Voilà un gars qui comprend comment les rendements et les cours évoluent en sens inverse, sur le marché obligataire… comment transformer une crise du crédit subprime en opportunité… et comment parler aux grandes banques.

Le touchant sacrifice d’un homme de Goldman Sachs

Comme Mnuchin est désormais fonctionnaire, il est de notre côté. Au fait, il fait un énorme sacrifice personnel (il a renoncé à des millions de revenus, en tant que financier de l’industrie cinématographique, pour travailler au gouvernement en contrepartie d’un salaire annuel de seulement 237 000 dollars ; comment va-t-il boucler ses fins de mois ?).
[NDLR : Comment vous préparer des revenus suffisants le moment de la retraite venu et ne pas vous retrouver confronté à des fins de mois difficiles ? Pas besoin d’avoir fait de grandes études ni d’y consacrer beaucoup de temps ou d’argent. 200 euros par mois suffisent si vous suivez les conseils de ce spécialiste. Tout est ici…]

Il va oeuvrer sans relâche au démantèlement du système de l’argent falsifié qui les a rendus si riches, lui et ses compères.

Ni lui ni Donald n’ont parlé de cela en public. Ils comptent probablement sur une surprise pour tomber sur le dos des grandes banques… mais à présent, on peut s’attendre à ce qu’ils rétablissent un système monétaire honnête… cessent de manipuler les taux d’intérêt… de soutenir les cours des actions et des obligations… et qu’ils laissent les choses suivre leur cours.

Bien sûr, Trump, Mnuchin, Ross et leurs compères en sortiront appauvris. Si l’on divise par deux les marchés actions et obligataires, on efface environ 33 000 milliards de dollars de richesse « fictive ».

Mais c’est ce que les fonctionnaires sont censés faire : placer l’intérêt du public avant le leur. Grâce à Dieu, nous avons enfin une équipe qui va le faire.

Qu’avons-nous oublié ?

Ah, oui… les 4% de croissance du PIB… les allègements fiscaux… et la grande relance des dépenses d’infrastructure.

Voyons… Comment cela fonctionne-t-il, déjà ?

On réduit les impôts… mais attendez. Mnuchin dit qu’il va simplement supprimer les déductions tout en réduisant les taux de sorte que les riches ne paieront pas vraiment moins d’impôts.

Il promet encore des réductions d’impôt pour la classe moyenne et les entreprises, bien sûr… et il va se servir du « dynamic scoring » [NDLR : théorie selon laquelle les réductions d’impôt créent rapidement de la croissance, donc des recettes fiscales, et ne nécessitent donc pas la réduction des dépenses publiques] pour prouver que la dette publique n’augmentera pas.

Et puis tout cet argent supplémentaire, dans les mains du peuple, provoquera un boom. George Bush père a qualifié cela d’économie vaudou. Mais bon, il ne portait pas la casquette rouge.

C’est assez simple, en réalité. Un stimulus budgétaire. Des allègements fiscaux. De la croissance. C’est curieux que les précédents gouvernements n’y aient pas pensé… Peut-être ne souhaitaient-ils pas 4% de croissance.

Autre chose ?

Les accords commerciaux déchirés mais des taxes aux frontières

Ah oui ! M. Trump vient juste de déchirer l’accord commercial du Partenariat Trans-Pacifique.

Ce n’est pas bien ?

Pas forcément. Si nous étions aux commandes, nous déchirerions tous les accords commerciaux. A la place, nous dirions simplement que le gouvernement n’a pas à se mêler de qui vend quoi à qui.

Les gens reprendraient alors le cours de leur vie, en achetant les meilleurs produits aux meilleurs prix, indifféremment de l’endroit où ils ont été fabriqués, et par qui.

Donc, youpi ! Encore une bonne décision prise par la Team Trump.

Mais quoi ? Le président a menacé d’imposer une « taxe aux frontières » sur les importations ?

Cela ne va-t-il pas provoquer une augmentation des prix ? Alias de l’inflation ?

Et cela ne va-t-il pas donner plus de pouvoir à l’Etat pour décider qui, parmi les compères, sera ou non imposé ? Quelle société aura ou non de l’importance ?

Et cela ne va-t-il pas provoquer un ralentissement du commerce mondial, une diminution de la croissance économique, une augmentation de la bureaucratie, et un monde encore plus pauvre ?

Peut-être.

Mais M. Trump est un gagnant ; il doit avoir un tour dans son sac dont il ne nous parle pas.

Restreindre les échanges commerciaux n’a jamais fonctionné depuis la nuit des temps. Mais cette fois-ci, c’est différent.

Trump va triompher là où même les anciens dirigeants de l’Argentine, Cristina Kirchner et Juan Perón ont échoué. Vous allez adorer ce monsieur.

Plus important encore, probablement : Donald Trump a juré de mettre fin à l’altruisme des gouvernements Clinton, Bush et Obama. A présent, ce sera « l’Amérique d’abord ».

Pourquoi nos derniers présidents ont-ils fait passer d’autres pays avant les Etats-Unis ? Il n’y a jamais eu d’explication. Mais si l’on porte la casquette rouge, on ne peut pas poser trop de questions.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile