La Chronique Agora

Portugal, euro… et agences de notation

▪ Vous entendez ce grondement ? C’est le bruit des organisations financières surendettées qui commencent à s’effondrer. Par s’effondrer, nous voulons dire qu’elles "sont confrontées à la réalité budgétaire". Ce n’est pas la fin du monde. Mais c’est, comme le dit Bill Bonner, la fin du monde tel que nous le connaissons.

C’est l’agence de notation Fitch qui a déclenché le grondement quand elle a abaissé à AA la note de la dette souveraine du Portugal et qu’elle a commencé à avoir un point de vue plutôt négatif sur la nation lusophone. L’analyste Douglas Renwick a écrit : "un choc budgétaire considérable avec pour toile de fond une faiblesse structurelle et macro-économique a réduit la solvabilité du Portugal… Même si le Portugal n’a pas été affecté de manière disproportionnée par le renversement mondial, les perspectives d’une reprise économique y sont plus faibles que pour 15 de ses pairs de l’Union européenne, et cela va forcément exercer une pression sur ses finances publiques à moyen terme".

L’échec monétaire de l’Europe va entraîner une crise budgétaire, et sûrement une crise sociale. Non seulement l’euro a vécu 10 mois de faiblesse face au dollar, mais la viabilité de la devise commune (un seul taux d’intérêt, plusieurs politiques budgétaires) est désormais remise en question. Et en Grèce, l’augmentation des taux d’intérêt absorbe déjà les économies réalisées grâce aux restrictions budgétaires d’urgence.

La situation est vraiment problématique. Une réelle contraction monétaire pourrait être politiquement impossible. Quel élu sera prêt à faire des coupes claires dans les dépenses publiques ? Mais l’expansion budgétaire est tout aussi impossible si vous pouvez imprimer la devise que vous empruntez. Personne dans l’Union monétaire européenne ne peut imprimer de devise pour se sortir de la crise par l’inflation. Alors la crise persiste.

▪ Voilà d’ailleurs un autre sujet. Je reçois beaucoup de lettres me disant que je suis un idiot. Et nombre d’entre elles me font remarquer qu’un pays qui imprime la devise qu’il emprunte (comme les Etats-Unis par exemple) ne peut pas se retrouver en cessation de paiement sur ses bons du Trésor. Il peut toujours rembourser les détenteurs de bons avec de nouveaux billets.

Oui. C’est vrai. Mais l’impression de devise est une dévaluation de facto de la devise face aux produits réels. C’est inflationniste. Et dans l’absolu, imprimer trop de devise détruit le pouvoir d’achat.

Une cessation de paiement signifie également que l’on est au bout du rouleau budgétaire. Mais en termes de solutions, il n’y a pas grande différence entre la cessation de paiement et l’inflation.

Ou bien y en a-t-il une ? Peut-être que la cessation de paiement est une solution rapide et douloureuse… alors que l’inflation détruirait beaucoup plus de richesses. Nous le saurons bientôt. La Grèce ne va pas disparaître. Et le Portugal ne sera pas le dernier à être re-noté par les agences.

▪ "N’est-ce pas formidable que 30 millions de gens bénéficient désormais de la sécurité sociale aux Etats-Unis ?" m’a demandé un ami hier soir au bar. "Oui, mais qui va payer pour ça ?" ai-je rétorqué (c’était une vraie question).

"Je ne sais pas", a-t-il admis. "Mais c’est agréable de voir que les Etats-Unis ont rejoint la famille des pays civilisés. Tu devrais être fier de ton gouvernement. Il a enfin fait quelque chose de bien pour Monsieur Tout-le-Monde".

"En effet. Tout le projet a enfin été bouclé. Mais je ne sais toujours pas qui va payer pour tout ça. Tu peux avoir une vision idéaliste du genre de pays dans lequel tu veux vivre. Et tu peux faire payer plus d’impôts aux gens pour y parvenir. Mais cela ne veut pas dire que le système va tenir le coup face à la réalité économique. Cela me semble être le mauvais moment… tout le système d’Etat-providence prouve que le modèle financier est mort… et les politiciens américains le développent. Il n’y a qu’aux Etats-Unis qu’on voit ça !"

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