La Chronique Agora

Planification centrale : les raisons d’un échec… la suite !

▪ Nous parlions hier du fait que les planificateurs centraux sont convaincus d’être capables de créer l’avenir qu’ils souhaitent. Aujourd’hui, nous tentons de démontrer qu’ils se trompent du tout au tout.

Bien entendu, chaque être humain fait toujours de son mieux, à son propre niveau, pour façonner son monde d’une manière qui le satisfait. Un homme voudra une épouse grassouillette… et l’obtiendra probablement. Un autre voudra une fortune… et l’obtiendra peut-être, s’il a de la chance et s’il travaille dur. Un autre encore voudra passer son temps à jouer au golf ; ça aussi pourrait être dans ses moyens. Chacun essaiera. Chacun gagnera… perdra… ou stagnera, selon les circonstances. Et le futur s’accomplira.

Le planificateur central intervient pour tenter d’imposer sa propre version de l’avenir. L’évolution suit son propre cours, à mesure que les plans des individus et des groupes réussissent ou échouent. Où l’évolution nous mène-t-elle ? Personne ne le sait. Mais le planificateur central à grande échelle pense savoir où l’évolution devrait aller… et ça ne le dérange pas de la pousser un peu, perturbant les plans de millions de personnes par la même occasion. Dès que la plus petite particule de temps et de ressource est accaparée pour les objectifs des planificateurs centraux plutôt que des planificateurs individuels, le rythme de progrès évolutionniste ralentit. Les essais qui se seraient déroulés dans d’autres conditions sont retardés ou annulés. Les erreurs qui auraient pu être révélées et corrigées ne sont pas découvertes. L’avenir doit attendre.

Les gens sont faciles à tromper, surtout quand ils n’ont accès qu’à "l’information publique". Quand ils ne sont plus à la portée de la "voix du messager", ils n’ont pas plus d’idée de ce qui se passe que les planificateurs eux-mêmes. On les encourage à croire que les plans collectifs sont bénéfiques. Souvent, ils suivent le mouvement — pendant des décennies — alors même que dans leur vie quotidienne, de nombreuses preuves contredisent les principes desdits plans et en sapent les promesses. C’était par exemple le cas en Russie et en Chine après l’arrivée des communistes, où les schémas extravagants des planificateurs ont duré pendant 70 et 30 ans respectivement.

Tout le monde ne suit pas, cependant. Et quand les gens résistent, les planificateurs les considèrent comme des obstacles à leur succès. Dans les cas extrêmes, c’est là que commencent les purges, les famines, les déportations, les disparitions, la torture, les attaques de drones et les meurtres de masse, pour encourager la docilité.

▪ Pourquoi ça ne fonctionne pas…

Mais ces plans échouent quoi qu’il arrive — parce que non seulement ils retardent l’avenir, mais en plus ils ne mènent pas à l’issue attendue par les planificateurs. En général, les concepteurs déclarent que le peuple doit faire des sacrifices mais que tout finira bien. "On ne peut pas faire d’omelette sans casser des oeufs", avait dit Lénine. Les gens veulent bien casser quelques oeufs (surtout s’ils appartiennent aux autres) pendant quelque temps. En fin de compte, le problème, c’est l’omelette : elle n’apparaît jamais sur la table. Et le repas qui finit par arriver est immangeable.

Aucun "paradis du travailleur" ne s’est jamais matérialisé. La Guerre contre la Drogue (ou la Pauvreté… ou le Crime… ou la Terreur…) se termine par une défaite, non une victoire. Le chômage ne baisse pas. Ou, si l’un ou l’autre de ces majestueux programmes "réussit"… le prix est parfaitement disproportionné par rapport à la récompense.

Pourquoi ces plans échouent-ils ? En deux mots, parce que le monde ne fonctionne pas ainsi. La vie sur la planète Terre n’est pas si "rationnelle" qu’elle se prête à des interventions simplettes et lourdaudes de la part d’ingénieurs sociaux naïfs. On peut concevoir un pont. Une maison. Des accélérateurs de particules. Mais pas des économies. Ni de vrais langages. Des coutumes. Des marchés. L’amour. Le mariage. Les enfants. Ou toutes les autres des choses vraiment importantes dans la vie.

N’exagérons pas, toutefois : il est vrai que les êtres humains peuvent concevoir et réussir une certaine sorte d’avenir. Si les planificateurs du Pentagone, par exemple, décidaient qu’une guerre nucléaire serait une bonne chose, ils pourraient la provoquer. Les effets seraient énormes. Et énormément efficaces.

Mais cet exemple extrême révèle la seule sorte d’avenir alternatif que les planificateurs sont capables de fournir à grande échelle — c’est-à-dire en pulvérisant le délicat tissu de la vie humaine évoluée. C’est un avenir dont personne ou presque ne veut, parce qu’il entraîne la perturbation des plans de la plupart des gens sur la planète — mariages, création d’entreprises, bébés, baptêmes, week-ends de pêche, séances de shopping, investissements et toutes les autres activités de la vie normale. Entraver ces plans privés signifie étouffer les erreurs et essais de gens ordinaires dont dépend l’avenir civilisé.

Toutes les planifications centrales ne produisent pas des calamités de cette taille, bien entendu. Mais toutes, dans la mesure où elles sont efficaces, sont repoussantes. Plus elles atteignent les objectifs du planificateur, plus elles interfèrent avec les buts privés et plus elles nuisent au progrès de l’humanité.

 

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