La Chronique Agora

Pétrole et acier soulignent la faiblesse de l’économie mondiale

▪ Aujourd’hui, nous écrivons sur ce qui ne s’est pas encore produit.

Non que nous puissions affirmer que nous savons ce qui va se passer demain ou après-demain. Mais nous pouvons observer le présent — et en déduire quelques indices sur la direction vers laquelle il nous mène.

Les électeurs américains se sont exprimés la semaine dernière. Ils ont été floués et ils le savent. Le plus grand programme d’impression monétaire de tous les temps — le QE — n’a rien fait pour eux. Au contraire, il a aggravé leur sort. L’investissement dans de nouvelles capacités de production a baissé. Leur maigre épargne ne produit pas de revenus. Les bons emplois — ceux qui "paient bien" — sont rares. Malgré toutes les annonces d’une "amélioration du marché de l’emploi", ça ne se voit guère dans les salaires. Le ménage américain moyen gagne 5 000 $ de moins qu’au début du 21ème siècle.

Qui plus est, l’économie mondiale tout entière est morose. Il suffit de regarder les prix du pétrole et de l’acier… les deux choses dont une économie moderne a le plus besoin. Le prix du pétrole s’est effondré… si complètement que le secteur pétrolier US dans son ensemble est remis en question. Le fracking moderne est né de prix dépassant les 100 $ le baril, ce qui le rendait pratique et profitable. A présent, à 70 $ le baril, l’investissement n’en vaut plus la peine. Quant à l’acier, Bloomberg nous en dit plus :

"Le minerai de fer a enregistré son déclin hebdomadaire le plus important en plus de cinq mois dans un contexte de surplus mondial croissant […] Le minerai à 62% de pureté livré à Qingdao a perdu 4,7% cette semaine, à 75,84 $ la tonne sèche, selon les données de Metal Bulletin Ltd. Ce déclin vient compléter trois semaines de pertes, aggravant le marché baissier".

Tandis que l’économie chinoise faiblit, l’Europe et le Japon deviennent froids, sombres et désespérés. La semaine dernière, Mario Draghi, président de la BCE, a annoncé un programme de 1 000 milliards d’euros destiné à rallumer l’économie européenne. M. Kuroda avait sorti les allumettes la semaine précédente, affirmant que son stock de petit bois était quasiment illimité.

Les Etats-Unis peuvent-ils résister au ralentissement mondial ? C’est peu probable

Les Etats-Unis peuvent-ils résister au ralentissement mondial ? C’est peu probable. Ce n’est qu’une question de temps avant que soit l’économie US soit les marchés US commencent à vaciller. Nous verrons probablement le Dow chuter de 1 000 points… ou bien nous entendrons que la croissance du PIB est devenue négative… ou les deux. Et ensuite ?

▪ La Fed ne peut pas rester les bras croisés
C’est là que les suppositions commencent, mais il semble quasi-certain que la Fed de Yellen interviendra, espérant empêcher un petit problème de devenir grand. Depuis les années 30, les banques centrales ont appris qu’il est rare qu’elles soient critiquées pour en avoir trop fait. Si elles restent les bras croisés, en revanche, on les mettra au pilori. Et depuis l’intervention d’Alan Greenspan en 1987, la Fed est venue en aide au marché boursier avec toutes les politiques qui lui semblaient appropriées. Des taux plus bas ? Plus de QE ? Les banques centrales feront "tout ce qu’il faudra". Janet Yellen est également très consciente qu’on chante les louages de ses deux prédécesseurs pour avoir sauvé l’économie de la destruction. Elle ne voudra pas être la première à la laisser tomber.

Tant que nous en sommes aux suppositions, nous allons partir du principe que chaque opération de secours sera plus coûteuse et moins efficace que la précédente. C’est ainsi que fonctionnent les "relances". C’est comme regarder des photos érotiques : les premières sont affriolantes et émoustillantes. Ensuite, elles ne sont plus qu’ennuyeuses et sordides. Tout de même, une nouvelle action vigoureuse de la part de Mme Yellen déclenchera probablement une augmentation des prix des actifs. Mais ensuite ?

Mais ces risques ne peuvent être ignorés éternellement. Ils sont cycliques

L’activisme des banques centrales — plus de crédit à des taux plus bas — ne fonctionne vraiment que lorsque les gens voient peu de risques de défaut ou de hausse des taux. Mais ces risques ne peuvent être ignorés éternellement. Ils sont cycliques. Ils reviennent, féroces, après une longue période de calme, de stabilité apparente, d’optimisme excessif, de cours survalorisés et de rendements artificiellement écrasés. Lorsque cela se produit, les banques centrales perdent toute capacité à faire grimper les actions avec des taux bas — parce que ces derniers sont alors perçus comme une menace, non une opportunité.

A ce moment-là — qui pourrait survenir dans des mois… voire des années — nous verrons probablement les banques centrales devenir plus créatives. Que peuvent-elles faire d’autre ? Elles seront encore pleinement engagées à "sauver" l’économie. Lorsque leurs outils politiques échoueront, elles devront trouver autre chose. Quoi ? Nous voyons trois éléments :

– Directement ou indirectement, elles rachèteront des actions. Le Japon, comme toujours, a une longueur d’avance.
– Les gouvernements mettront en place de vastes plans de relance… probablement des "investissements" dans les infrastructures, censés s’amortir d’eux-mêmes.
– Ces plans seront financés par une forme ou une autre de financement monétaire direct fourni par la banque centrale. Au lieu de prêter l’argent — ce qui ferait grimper la dette gouvernementale à des niveaux alarmants — les banques centrales "imprimeront" simplement les fonds nécessaires.

Toutes ces mesures sont soit déjà en place soit discutées en détail dans les grands journaux financiers. Que signifieront-elles pour les actions ? Les obligations ? Le dollar ?

Restez à l’écoute.

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