La Chronique Agora

La pandémie a changé la donne de l’inflation

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La création monétaire par les banques centrales ne date pas d’hier mais, pourtant, l’inflation n’a commencé à accélérer que cette année. Le mouvement est-il désormais impossible à contrer ?

Voici quelques réflexions sur l’inflation.

Je ne vais pas radoter, mais il faut cent fois sur le métier remettre son ouvrage.

La grande affaire de notre époque, c’est le changement de régime de nos économies. Pendant plusieurs décennies, les autorités ont dit – ont prétendu – lutter contre les tendances déflationnistes. Maintenant, elles prétendent le contraire : lutter contre les forces inflationnistes.

Je laisse de côté la discussion de fond, à savoir quelle est la nature exacte du régime antérieur et quel est l’objectif exact des mesures des autorités.

Je vous l’ai expliqué maintes fois, tout cela, ce sont des constructions parallèles destinées à dissimuler les véritables raisons de nos maux et les non moins véritables raisons des remèdes apportés.

Tout tourne autour de la crise – ou de la tendance à la crise – du capitalisme, encombré d’excès de capital ou d’épargne qu’il n’arrive ni à rentabiliser ni à utiliser sainement et/ou productivement.

Cette crise étant traitée, si l’on ose dire, par la création de dettes et de signes monétaires, elle provoque un surplus considérable de liquidités, de capitaux liquides, lesquels n’ont pas d’autres voies que celle de la Bourse et de la spéculation.

L’inflation des signes monétaires et du crédit a toujours produit ces effets, mais pas là ou on les attendait. C’est-à-dire pas au niveau des prix des biens et services, mais seulement au niveau des prix des actifs financiers. Comme on dit vulgairement : il n’y a pas eu de ruissellement, il n’y a pas eu de transmission.

Maintenant, les choses changent.

L’inflation arrive dans l’économie réelle

La pandémie a modifié la donne et l’inflation monétaire a été complétée par des déficits budgétaires astronomiques qui ont mis l’argent dans les économies réelles et pas seulement dans l’univers imaginaire des Bourses.

Les autorités ont stimulé la demande alors que l’offre était rétrécie et pénalisée par les effets réels, restrictifs, de la pandémie. Les autorités ont stimulé une demande alors que l’offre rétrécissait… Il faut vraiment être stupide n’est-ce pas !

Maintenant, l’excès de monnaie et de crédit qui est dans le système tourne, se met en branle et s’en va à la recherche de ses contreparties. L’euphorie aidant, les prix des biens et services s’envolent.

Personne ne cherche à ce que vous compreniez qu’on vous raconte n’importe quoi, et qu’on fait joujou avec les mots comme « transitoire », « temporaires », etc. Personne n’a envie que vous compreniez les enjeux de la période.

Rien n’est acquis, voilà ce que vous devez savoir : ni le caractère temporaire, ni le caractère durable. Tout est à venir, non écrit, et cela dépendra de la politique qui sera suivie.

Ils peuvent annoncer une politique et faire le contraire, c’est leur spécialité. Ils peuvent tout dire et faire en sorte que ce soit de la poudre aux yeux. Donc ne vous faites pas piéger, à partir dans le Zig alors qu’ils vous emmènent dans le Zag.

Par exemple, le taper annoncé par Powell et sa clique ne signifie rien, il est Canada Dry, et il sera peut-être reporté, comme le fut la hausse des taux britanniques, si les perceptions changent.

Deux voies sont encore possibles

L’avenir à ce stade n’est pas écrit, mais il se joue.

Si les mesures exceptionnelles de mars 2020 et des mois suivants sont arrêtées, alors l’inflation des prix des biens et services n’aura été que temporaire, car les forces de stagnation et de déflation fondamentales de nos systèmes n’ont pas changé – excès des dettes, boulet au pied de l’usure, concurrence globale, substitution technologique des machines et processus automatisés au travail vivant, etc.

Si les mesures exceptionnelles ne sont pas arrêtées ou ne peuvent être arrêtées pour une raison ou une autre, alors la vitesse de circulation de la monnaie (la vélocité) va continuer de remonter. La demande dépassera alors durablement une offre malthusienne, ce qui provoquera des tensions sur les capacités et des tensions sur les revenus. Ici, les conditions d’une inflation plus durable seraient réunies.

Si, en plus, on enclenche la grande transition climatique par-dessus, l’inflation peut très bien faire boule de neige. Voire dégénérer, muter en méfiance envers les monnaies.

Spontanément, le plus probable, c’est la première hypothèse, celle du retour à la croissance lente avec inflation modérée pendant un certain temps, le temps de régulariser tout cela.

Cependant, avec les autorités actuelles, on n’est sûr de rien, et le plus probable n’est pas forcément certain !

[NDLR : Retrouvez toutes les analyses de Bruno Bertez sur son blog en cliquant ici.]

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