La Chronique Agora

Page blanche et mauvaises dettes

▪ Votre chroniqueuse souffre d’une sévère crise d’angoisse de la page blanche ce matin. Elle ressemble en cela aux marchés boursiers — qui nous ont gratifiés d’une semaine sans grand intérêt.

Dans de telles situations, rien de tel que l’aide extérieure. Tout comme un petit discours de Bernanke permet de redonner un coup de fouet aux actualités boursières… la lecture de mes collègues rédacteurs m’aide à retrouver l’inspiration.

Et je n’ai pas eu besoin de me tourner bien loin : Simone Wapler est actuellement jusqu’au cou dans l’assurance-vie, les taux d’intérêt et les risques de défaut… et on peut dire que ça lui réussit.

C’est un titre de La Tribune du 12 janvier dernier qui a attiré l’attention de Simone : "Comment l’assurance-vie fait face à la crise de l’euro".

"Le quotidien nous explique sereinement que les assureurs ont ‘su saisir l’opportunité offerte par les obligations des pays dits ‘à risques’ comme l’Espagne, l’Italie, l’Irlande le Portugal’", déclare Simone.

"Et là, votre chroniqueuse est prise d’un salutaire fou rire. Notez les admirables guillemets autour de ‘à risque’. Sous entendu, le risque n’existe pas, il est illusoire, fantasmagorique. Seul quelques pisse-vinaigre, cassandre, alarmistes (catégories des lesquelles la plupart de nos confrères nous rangent) peuvent s’y arrêter plus d’une microseconde".

"Notez également la brillante omission de la Grèce. Ce pays aurait-il été rayé de l’Union européenne ? Ou alors les assureurs n’auraient aucune obligation grecque en portefeuille ?"

"En pleine crise de l’euro, le marché obligataire est en train d’enregistrer ses premiers craquements. Il est très probable que le grand marché haussier obligataire entamé en 1994 se termine".

"Nous, nous venons de terminer nos propres stress tests sur les assureurs", conclut Simone. "Nous ne pensons pas que les assureurs feront face (pour reprendre La Tribune) sans douleur, pour eux et pour vous ! Donc nous pensons que les probabilités sont très très fortes pour que les rendements baissent considérablement en 2011".

Les résultats de ces stress tests seront bientôt disponibles, accompagnés des stratégies conçues pour vous couvrir contre les risques qui s’accumulent actuellement : restez à l’écoute…

Et puisqu’on parle dette, Portugal et Espagne, je fais appel à Frédéric Laurent, de Vos Finances, qui a fait un petit tour d’horizon sur le sujet :

"Le Portugal et l’Espagne ont refinancé une partie de leur dette — respectivement à hauteur de un milliard et de cinq milliards d’euros. En conséquence, je m’attendais à quelques soubresauts, quelques tensions… Bien au contraire, je constate que les taux baissent et que les adjudications se font dans les meilleures conditions"…

"Avouez qu’il y a des raisons d’être un peu surpris. En même temps, tant mieux, c’est que la tension s’apaise. Quoique… Comme l’a rappelé mon collègue Philippe Béchade dans la Chronique Agora, les marchés ne se sont pas battus pour emporter ces emprunts puisqu’au bout du compte la BCE a tout raflé… Jusqu’à présent les propos de la BCE déclaraient qu’elle pourrait intervenir dans les rachats d’emprunts d’Etat à hauteur d’environ 30%. Seulement voilà, dans le cas présent, elle est montée à près 90% !"

"Bref, à force d’éponger, la serpillère risque d’arriver au bout de sa capacité d’absorption"…

Oui, le bilan de la BCE pourrait commencer à saturer, avec toutes ces dettes qui viennent s’accumuler en quantités massives — d’autant que les états ne corrigent pas leur conduite, loin de là. Et le résultat risque d’être fort désagréable — pour employer un euphémisme poli :

"Si la planète finance n’explose pas en vol, nous sommes en train de vendre notre âme au diable", assène Frédéric. "En effet, par cette accumulation de dettes que nous ne pourrons pas rembourser, nous acceptons de renforcer nos créanciers. Ils auront tôt fait d’encaisser leurs dividendes en prenant des parts hautement stratégiques sur nos plus beaux fleurons. Et dès demain, la sentence ‘inflation’ rajoutera son grain se sable et impactera directement nos portefeuilles… Vous savez jouer au Monopoly, vous savez donc d’expérience que sans liquidités vous devez passer la main et céder vos titres à vos créanciers".

"Aujourd’hui, nous avons dépassé ce stade. Il ne s’agit plus d’une simple crise de liquidités, mais clairement d’une crise de solvabilité et le jeu risque bien de prendre fin. Bien entendu, je suis incapable de dire si ce sera en 2011, 2012, ou plus tard. Mais plus que jamais soyez vigilants. Il est véritablement crucial de nous diversifier dans des actifs solides : immobilier, matières premières, actions de sociétés elles-mêmes solides et peu endettées. Avec la récente consolidation, il est l’or, mon signor, de se ren-for-cer !"

Comme le dirait Bill, n’essayez pas de spéculer sur l’or : confortez votre position en achetant sur les replis, et ensuite… conservez !

 

Meilleures salutations,

Françoise Garteiser
La Chronique Agora

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