La Chronique Agora

Où placer vos liquidités ? (3/3)

En 2024, faut-il encore privilégier l’assurance-vie, placement préféré des Français ?

Pour terminer cette série d’articles, nous allons évoquer les fonds en euros de l’assurance-vie.

Placement préféré des Français (environ 20 millions de gens en détiennent une), l’assurance-vie a connu un coup de mou en 2023. La collecte nette (collecte moins retrait) n’a été que de 2,4 Mds€ l’année dernière, l’une des plus faibles des vingt dernières années. La raison principale en a été la décollecte massive des fonds en euros, qui ont perdu plus de 27 Mds€.

Peu rémunérateurs, ils ont été boudés par les épargnants au profit d’autres supports comme le Livret A, le LEP ou les comptes à terme. Les Français ont aussi puisé dans ces fonds pour faire des achats (hausse des prix oblige) ou pour disposer d’un plus gros apport au moment de souscrire un crédit immobilier.

Pourquoi évoquer les fonds en euros dans cet article s’ils sont à la traîne sur le plan du rendement ? Tout simplement parce que les choses sont en train de changer.

L’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), le « gendarme » de la banque et de l’assurance, a appelé il y a peu les assureurs-vie à puiser dans leurs réserves pour augmenter le rendement servi sur les fonds en euros. L’ACPR craint, en effet, qu’une accélération des rachats déstabilise tout le système. Pour retenir les épargnants, nombre de compagnies se sont donc résolues à puiser dans la réserve constituée en vue des périodes difficiles, la fameuse provision pour participation aux bénéfices (PPB).

Par ailleurs, les assureurs profitent à plein de l’émission des nouvelles obligations (principal constituant des fonds en euros) sur le marché qui proposent des rémunérations désormais plus attractives comme nous l’avons vu hier. Ainsi, après un rendement moyen de 2% en 2022, on s’attend à 2,50% en 2023 pour les fonds en euros. On espère qu’ils dépasseront l’inflation en 2024 et celui du Livret A en 2025.

Mais cette moyenne cache cependant bien des disparités.

Pour 2023, la MACSF a annoncé 3,10% ; Société Générale Assurances, 3,31% ; Garance, 3,50% ; la France Mutualiste, 3,70% (et même 4,20% pour son contrat réservé aux militaires) ; Corum EuroLife, 4,45%. De l’autre côté du spectre, on trouve l’Afer à 2,22% (2,01% en 2022) et Gaipare à 2,30% (2,20% en 2022), qui n’ont donc bougé que d’un petit iota en un an et sont sous la moyenne du marché. Il est loin le temps où l’Afer était fière d’annoncer, en janvier de chaque année, son taux, toujours l’un des meilleurs du marché.

Il faut dire que l’Afer a été dispendieuse ces dernières années. Elle a, par exemple, puisé dans sa PPB en 2023, la délestant de 115 M€ pour ne proposer qu’un petit 2,22%. Elle est aussi une vieille maison, dépendante de ses investissements passés à l’ère des taux bas. D’autres ont été davantage fourmis et ont accumulé des réserves qu’ils pourront distribuer pendant encore cinq ou six ans pour gonfler les rendements. D’autres enfin, arrivés récemment sur le marché, ont profité des obligations récentes bien rémunérées grâce à la hausse des taux d’intérêt. C’est le cas, par exemple, de Corum EuroLife (4,45%), évoqué plus haut.

Cependant, le repli des taux sur les livrets réglementés devrait redonner des couleurs à l’assurance-vie en euro en 2025.

Si nous évoquons l’assurance-vie, outil de capitalisation par excellence, dans cet article consacré aux liquidités, c’est parce qu’elle est une épargne dans laquelle on peut puiser facilement. Et beaucoup de personnes l’oublient ou l’ignorent.

Le détenteur d’une assurance-vie a, en effet, la possibilité de faire un rachat ou d’obtenir une avance. Le rachat consiste à retirer une partie de l’argent de son contrat. Il porte toujours sur une partie des primes investies (le capital), majorées d’une fraction des produits acquis (intérêts et plus-values). Les intérêts perçus à l’occasion du rachat peuvent être soumis à l’impôt sur le revenu. En effet, la taxation dépend de l’ancienneté du contrat et de la date de versements des primes. En sus, les gains sont toujours soumis aux prélèvements sociaux au taux de 17,20%.

Si cela est suffisant pour ses besoins, il est pertinent de ne racheter que les sommes placées sur le fonds en euros, celles placées en unités de compte (UC) étant moins liquides et plus rémunératrices. Il peut aussi être inopportun de racheter des UC si leurs cours a fortement baissé. Le rachat peut aussi être total. Dans ce cas, il met fin au contrat.

L’avance, elle, correspond à un prêt consenti par l’assureur au souscripteur. Ce prêt est, en quelque sorte, garanti par les sommes investies sur le contrat d’assurance-vie. L’avance répond à un besoin temporaire de liquidités. Le remboursement doit intervenir dans les trois ans suivant l’avance, en une ou plusieurs échéances. A défaut de remboursement de l’avance dans les temps, l’opération peut être requalifiée de rachat partiel. Par ailleurs, l’administration fiscale surveille de près les avances trop fréquentes et peut les considérer comme des rachats. Si l’avance est neutre sur le terrain de la fiscalité, elle a, en revanche, un coût puisque l’assureur demandera des intérêts.

Il est donc judicieux, avant de choisir entre le retrait et l’avance, de comparer leur coût respectif en tenant compte de tous les paramètres.

Des liquidités ? Oui, mais pas trop !

Nous l’avons vu, il existe de nombreuses solutions pour placer ses liquidités ou « quasi-liquidités », qu’il s’agisse de son épargne de précaution immédiatement disponible, d’une épargne en prévision de dépenses importantes à venir ou encore de sommes dont on attend de décider de la destination finale.

Mais attention de ne pas détenir trop de cash ! Ni trop longtemps. Même si vous êtes très réactif et savez, par exemple, jouer avec les diverses promotions des « super livrets » bancaires, il est probable que vous ne gagnerez pas à tous les coups. Et à long terme, vous serez perdant.

Une étude de Morningstar, portant sur le marché américain et sur la période 1928-2022, a montré que, sur une période d’un an, la probabilité de générer une meilleure performance avec des placements de trésorerie qu’en investissant en actions est seulement de 31%. Sur 3 ans, la probabilité tombe à 23%. Sur 10 ans, elle n’est plus que de 16%. Sur 25 ans, elle est nulle.

Alors ne gardez que le nécessaire en liquidités. Un Livret A et un LDDS remplis aux plafonds autorisés (respectivement 22 950 € et 12 000 €) pour chaque membre de la famille, ce n’est déjà pas si mal. Si vous trouvez cela insuffisant pour parer à toute éventualité, pensez à la poche du fonds en euros de votre assurance-vie. Et investissez le reste de votre épargne sur des actifs plus rémunérateurs comme les actions.

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