Oubliez le compte courant qui ne rapporte rien et qui, inflation oblige, ne fait que rogner l’argent que vous avez mis de côté. Quels sont alors les autres supports possibles aujourd’hui ?
Les plus anciens de nos lecteurs auront connu la période faste des SICAV monétaires, dans les années 1980-1990, puis celle des fonds en euros de l’assurance-vie dans les années 1990-2000. Les premières rapportaient allègrement 10% par an, et les seconds entre 7% et 8% (avant impôts), largement au-dessus de l’inflation de l’époque. Il n’y avait alors pas à se creuser la tête pour placer ses liquidités.
Puis la politique des taux bas est arrivée, faisant chuter le rendement de tous les placements liquides. On en venait alors à perdre de l’argent à placer ses liquidités. Est-ce toujours le cas ? Existe-t-il des solutions pour ne pas voir, chaque année, son capital fondre comme neige au soleil ? La période actuelle de reflux de l’inflation offre-t-elle des opportunités ?
Ce que sont les liquidités
Peut-être est-il utile, en préambule, de rappeler ce que sont les liquidités.
Elles sont, tout simplement, des avoirs disponibles à tout moment. De l’argent de côté pour parer aux aléas de la vie, une épargne de précaution au cas où (dépenses imprévues comme les réparations sur un véhicule ou les travaux d’urgence dans un logement). Le but est d’éviter un découvert bancaire et ne pas avoir à puiser dans une épargne de long terme a priori moins liquide.
De quel montant doit être ce matelas ? Il est généralement admis que l’épargne de précaution soit de deux à trois mois de revenus si ceux-ci sont réguliers. En revanche, si vos ressources sont aléatoires, il est conseillé d’avoir jusqu’à 50% de vos revenus annuels en épargne de précaution.
Si l’on en a les moyens, il peut être opportun d’avoir davantage de liquidités en prévision d’une dépense programmée – un voyage d’exception, le remplacement d’un véhicule, des travaux dans le logement, etc. – mais qui pourrait toutefois survenir avant l’échéance prévue. Par exemple, le changement de véhicule peut intervenir beaucoup plus tôt que prévu en cas de grosse panne ou d’accident. Ou bien, un dégât des eaux peut amener à changer un grand nombre d’appareils électroménagers. Nous savons tous que, dans ces situations, les assurances ne couvrent que rarement la totalité des dépenses et qu’elles prennent leur temps pour payer. Cette épargne vise alors, en grande partie, à éviter le recours à l’emprunt.
Enfin, on peut être amené à placer de grosses sommes d’argent à court terme en attendant leur usage définitif : un héritage dont on souhaite réfléchir à l’utilisation, le fruit de la vente d’un bien immobilier avant son réemploi, etc.
Mais où détenir ces liquidités ? Oublions le compte courant qui ne rapporte rien et qui, inflation oblige, ne fait que rogner l’argent que vous avez mis de côté. Quels sont alors les autres supports possibles aujourd’hui ?
Les livrets d’épargne réglementés
Le Livret A et le livret de développement durable et solidaire (LDDS) sont incontournables lorsque l’on parle de liquidités. Tout d’abord parce qu’ils ne sont pas fiscalisés : les intérêts qu’ils servent ne sont pas soumis à l’impôt ni aux prélèvements sociaux. De ce fait, le rendement affiché de 3% est net.
Un rendement qui restera inchangé tout au long de l’année 2024, et même jusqu’au 31 janvier 2025, comme l’a annoncé le ministre de l’Economie Bruno Le Maire.
Depuis 2009, les livrets réglementés n’ont jamais autant rapporté. Les Français l’ont bien compris en les alimentant largement l’année dernière avec plus de 60 Mds€.
Il est vrai que, si le ralentissement de la hausse des prix est confirmé (3,40% en janvier 2024), le taux bloqué à 3% pourrait vite devenir une bonne affaire. Par conséquent, il ne faut pas hésiter à remplir ces livrets au maximum autorisé : 22 950 € pour le Livret A et 12 000 € pour le LDDS. Un couple peut donc accumuler près de 70 000 € (hors intérêts capitalisés), ce qui n’est déjà pas si mal pour une épargne de précaution !
Néanmoins, le Livret A et le LDDS semblent avoir subi une décollecte en fin d’année au profit du livret d’épargne populaire (LEP). Il faut dire que celui-ci proposait alors un taux de 6% (depuis le 1er août 2023), de quoi concurrencer sérieusement le Livret A. D’autant plus que le plafond des dépôts a été relevé en octobre 2023, passant de 7 000 € à 10 000 €. On comprend pourquoi sa collecte a doublé en 2023 par rapport à 2022, dépassant les 20 Md€ en 2023.
Depuis le 1er février 2024, le taux est redescendu à 5%. Il reste cependant très attractif. Malheureusement, le LEP n’est pas accessible à tous, contrairement aux deux autres livrets réglementés. Il est, en effet, réservé aux ménages dont le revenu fiscal de référence ne dépasse pas 22 419 € pour un célibataire et 33 393 € pour un couple (en métropole).
Les livrets bancaires
Les livrets bancaires, appelés parfois « super livrets » car ils ont longtemps proposé des « super taux » intéressants quand celui du Livret A était au plus bas, étaient quelque peu tombés dans l’oubli. Lorsque l’inflation s’est récemment réveillée, ils étaient inintéressants du fait de leur très faible rémunération.
A la faveur du relèvement du taux du Livret A, les livrets bancaires se sont mis à offrir une rémunération supérieure à celui-ci. Ainsi, en ce moment, Bforbank et Fortuneo offrent 5,50% ; Monabanq, 5% ; Distingo Bank et MyMoneyBank, 4%.
Mais toutes ces offres sont limitées dans le temps : 6 mois pour Bforbank (qui passe ensuite à 1%), 4 mois pour Distingo Bank (3%) et Fortuneo (2%) ; 3 mois pour MyMoneyBank (3%) et Monabanq (2%). Ce n’est donc pas forcément la banque qui affiche le taux le plus élevé qui offre la rémunération la plus intéressante dans le temps.
Ces offres sont aussi plafonnées : 150 000 € pour MyMoneyBank et Monabanq ; 100 000 € pour Distingo Bank, Bforbank et Fortuneo.
Renault Bank se distingue. Certes, elle n’offre que 3% de rendement, mais cette rémunération n’est, pour l’instant, pas limitée dans le temps. Et le plafond est élevé : 10 M€. De quoi placer un peu plus que des liquidités !
Il ne faut cependant pas oublier que les intérêts servis par les « super livrets » ne sont pas exonérés d’impôts et de prélèvements sociaux. Après application de la flat tax à 30%, le rendement affiché devient subitement moins intéressant.
Enfin, si le taux promotionnel est garanti sur une période donnée, ce n’est pas le cas du taux normal. Il peut baisser du jour au lendemain sur simple décision de la banque.
Il arrive aussi que le taux promotionnel ne s’applique que sur une partie seulement de la somme déposée. Certaines de ces banques en ligne réservent aussi leur bonification aux premiers clients. Et quelquefois, les heureux élus ne sont vraiment pas nombreux ! Parfois, il est exigé de conserver le livret pendant un certain temps, au-delà de la période de bonification. Cela pour éviter que les épargnants butinent d’un « super livret » à l’autre.
Bref, si les livrets bancaires peuvent être intéressants pour rémunérer une épargne, qui reste quoi qu’il en soit liquide, quand les livrets réglementés sont pleins, il convient de bien lire les conditions entourant l’application des taux préférentiels.
Nous verrons dans nos deux prochains articles les placements à disposition des investisseurs particuliers.