La Chronique Agora

Pourquoi l’or devrait-il encore grimper ?

▪ L’or a repris une raclée.

Dans le Financial Times hier :

"Le cours de l’or dégringole suite aux craintes sur la fin de l’assouplissement quantitatif".

"L’or a dégringolé à son plus bas niveau en près de trois ans, ce qui le met en bonne position pour enregistrer sa plus grosse baisse trimestrielle depuis 1971 et l’effondrement du système de Bretton Woods, qui liait la valeur du dollar au métal jaune".

C’est une bonne nouvelle. L’or fait ce qu’il devrait faire. Et il nous donne une bonne occasion d’acheter un gilet de sauvetage avant que le bateau ne coule.

Aucun marché ne grimpe sans une correction. En général, les spéculateurs vont plus vite que la musique. Ils doivent prendre quelques claques… être mis à l’épreuve… et calmés. Comme une lame d’acier, ils doivent être forgés avant d’être prêts pour la bataille finale.

Durant le dernier grand marché haussier de l’or — qui a duré pendant toutes les années 70 environ –, l’or est passé de 40 $ à plus de 800 $. C’était l’un des plus grands marchés haussiers de tous les temps. Mais il n’a pas été sans heurts. Le prix de l’or a grimpé rapidement. Il fallait le faire redescendre au moins une fois avant qu’il ne finisse par atteindre son sommet. En l’occurrence, la correction a effacé près de la moitié des gains… avant que le marché haussier ne recommence.

Voyons voir. L’or a commencé ce marché haussier alors qu’il était légèrement sous les 300 $. Il est passé à 1 900 $. C’est un gain de 1 600 $. Si l’or perdait la moitié de son gain, il devrait chuter de 800 $… c’est-à-dire 1 100 $ environ. Il y a encore un peu de chemin à parcourir.

▪ Y’a-t-il encore des raisons à la hausse ?
Mais comment savons-nous que les causes sous-jacentes de la marche de l’or vers la gloire sont encore place ? C’est impossible de le savoir avec certitude. Toutefois, pendant des milliers d’années, l’or a été non seulement la seule forme de monnaie… mais aussi la meilleure. Lorsque les autres formes échouent, l’or se maintient. C’est la monnaie ultime.

Certaines formes de richesse sont tangibles. D’autres sont représentées par du papier — des billets, des notes, des actions, des bons, des reconnaissances de dette etc. Quand une économie se développe, elle devient plus sophistiquée… avec relativement plus de richesse sous forme papier. Il s’agit de droits sur d’autres types de richesse, élaborés durant une période de prospérité et de confiance. Plus les gens ont foi dans "le système", plus ils ont foi dans le fait que leurs morceaux de papier peuvent être échangés, à un moment ou à un autre, contre de vrais biens et services.

Quand la confiance dans le système disparaît, il en va de même pour les prix des morceaux de papier. Les investisseurs commencent à se poser des questions sur les gens de l’autre côté de la transaction. Les émetteurs d’instruments de dette peuvent-ils vraiment payer ? Les entreprises sont-elles vraiment aussi profitables qu’elles le disent ? La personne qui nous a laissé cette reconnaissance de dette est-elle vraiment solvable ?

Quand la confiance disparaît soudainement, on appelle ça une "panique", qui se manifeste rapidement par un "krach" des prix des actifs (papier). Souvent, les actifs tangibles chutent aussi — comme l’immobilier, l’art et les matières premières.

Tel était plus ou moins le monde du sell-off de 2008-2009. Lorsque les investisseurs ont réalisé que les détenteurs de prêts subprime ne pouvaient pas payer, ils ont commencé à se demander qui d’autre ne pouvait pas payer. A coup sûr, les banques qui détenaient des milliards de subprime auraient elles aussi des problèmes. Idem pour les constructeurs immobiliers — et de nombreux autres.

▪ La valeur de l’argent liquide
D’ordinaire, la valeur d’une sorte bien particulière de papier grimpe, durant une panique. Les billets à maturité immédiate — l’argent liquide — tendent à devenir plus précieux… C’est la chose que la plupart des gens n’ont pas — et celle dont ils ont le plus besoin pour payer leurs factures. Même l’or peut baisser par rapport au liquide. Les gens ont besoin de cash, pas d’or.

Mais parfois, la confiance des gens dans l’argent liquide disparaît aussi. C’est alors qu’on a une vraie panique. C’est ce qui s’est passé dans les années 70 aux Etats-Unis. Le cash perdait sa valeur, en grande partie à cause de dépenses excessives de la part du gouvernement et de taux trop bas de la part de la Fed. Arthur Burns avait prêté trop bon marché pendant trop longtemps.

A nouveau, durant l’ère Greenspan, la Fed a prêté à des taux trop bas pendant trop longtemps. Ben Bernanke a complètement mal interprété les signes. Pour lui, nous vivions une "Grande modération". Mais la stabilité qu’il voyait était un mirage. L’argent facile fonctionnait comme un magasin de vins et spiritueux qui livrerait à domicile : il empêchait les problèmes d’apparaître en public. Les débiteurs n’avait quasiment aucun moyen de se désintoxiquer. Peu importe à quel point leurs affaires étaient mal gérées, il y avait toujours quelqu’un pour leur prêter plus d’argent.

Le marché de l’or a réalisé que des problèmes étaient en train de couver. Il a fait grimper le prix de jusqu’à ce que, une fois de plus, les spéculateurs soient allés plus vite que la musique. A présent, l’or corrige.

Mais les problèmes qui ont donné naissance au marché haussier de l’or ont-ils été réparés ? Le niveau de dette a-t-il été substantiellement réduit ? Les institutions mourantes ont-elles été nettoyées et remises sur pied ? L’économie qui avait l’habitude de tourner grâce au crédit facile a-t-elle réussi à se désintoxiquer ?

L’assouplissement quantitatif arrive-t-il à sa fin ?

Probablement pas.

A suivre…

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