Les résultats de Nvidia n’ont pas fini de questionner les investisseurs.
Nous avons à peu près tout lu et entendu sur la publication des trimestriels de Nvidia ce mercredi 28 août (chiffres divulgués peu après 22h15).
« Ce sont les résultats les plus attendus, non pas de 2024, mais de la décennie. »
« L’impact de Nvidia éclipse les chiffres de l’inflation et de l’emploi aux USA. »
« Nvidia est devenu l’indicateur avancé des dépenses d’investissement à venir dans le secteur de la tech. » Etc.
Et franchement, il y a du vrai dans ces affirmations, que certains pourraient juger grandiloquentes : Nvidia, c’est 6,5% de la capitalisation du S&P 500, c’est-à-dire plus que l’addition de trois secteurs entiers (les utilities, l’immobilier et les « matériaux de base »/valeurs minières). Nvidia, c’est 1,2% de moins que le secteur des entreprises « industrielles », qui comprend entre autres l’automobile, l’aéronautique, la chimie, le raffinage, etc.
A quelques heures de la publication de ses résultats, Nvidia pesait plus de 3 200 Mds$, confirmant sa seconde place au sein des trois plus grandes capitalisations boursières américaines, derrière Apple à 3 440 Mds$ et devant Microsoft à 3 050 Mds$.
La concentration du marché américain a atteint et dépassé, depuis la séance des « Trois sorcières » du 16 août, le niveau de la bulle Internet de 2000.
La part des secteurs de la technologie et des télécommunications a atteint un record de 41% en juillet 2024.
Au cours des quatre dernières années, cette part a bondi d’environ dix points de pourcentage, dépassant le précédent record de 40% observé lors de la bulle Internet de 2000.
Dans le même temps, la part des secteurs financiers (12,6%), énergétiques (3,7%) et des matériaux (2% seulement, cela paraît incroyable, c’est moins du tiers de la « capi » de Nvidia) est tombée à 18,3%, largement en dessous des 25%, leurs niveaux de 2000.
Alors oui, les résultats de Nvidia revêtaient une importance particulière, dans un contexte « d’attentes élevées » et décevoir Wall Street n’était pas une option !
Les chiffres records espérés furent au rendez-vous, avec un bénéfice par action de 0,68 $ contre 0,64 $ attendu.
C’est une multiplication de l’EPS (profit par titre) par 4 en deux ans, une performance quasi unique au sein du S&P 500 (en excluant les valeurs passant de pertes à bénéfices), mais le cours a été multiplié par plus de 8, et il a plus que triplé depuis le 28 août 2023.
Même avec un chiffre d’affaires trimestriel qui franchit la barre des 30 Mds$ (contre 28,7 Mds$ attendus), la valorisation reste stratosphérique et sans équivalent au sein du S&P en termes de ratio « capitalisation/chiffre d’affaire » avec un score supérieur à 26 (au-delà de 10, c’est déjà vertigineux, au-delà de 13, le marché fait un rêve éveillé… mais Nvidia, c’est juste le double !).
Peut-être Nvidia corrige-t-il cet excès par un plan massif de rachat d’actions ?
Nvidia double en effet sa « taille » potentielle à 50 Mds$ (contre 21 Mds$/an réalisé jusqu’à présent), un ordre de grandeur qui le classe au sein du « Top 3 », derrière Apple (environ 90 Mds$/an) ou Alphabet (62,6 Mds$), mais devant Meta (34,6 Mds$), Microsoft (18,7 Mds$), EXXON (16,5 Mds$) ou Chevron (14 Mds$), Wells Fargo (13,8 Mds$), Visa (13,3 Mds$), Comcast (11,8 Mds$) ou JPMorgan (10 Mds$).
Donc, Nvidia perdait 7% à 8% en « after hour« , soit plus de 220 Mds$ et se retrouvait sous la barre des 3 000 Mds$ de capitalisation, relégué à la 3e place derrière Microsoft.
Les investisseurs semblent considérer que 50 Mds$ de « buybacks« , cela n’a rien de spectaculaire puisque cela représente au mieux 1,6% du capital, contre 3% pour Apple.
Le Nasdaq était anticipé en baisse de 1% ce jeudi, mais c’est surtout le risque de confirmation d’un double-top historique sur le S&P 500 (5 670 points le 15 juillet, 5 650 le 25 août, après un rallye haussier à perdre haleine de +10% en quinze séances) qui constitue la principale menace pour Wall Street.
Et ce, avant même de se demander si l’I.A augmentera réellement la productivité de l’économie et permettra de réduire considérablement la masse salariale des entreprises du secteur tertiaire à l’horizon 2030 (des experts prophétisent -20% à -70% d’employés selon le type d’entreprise d’ici cinq ans).
Ce seraient des dizaines de millions de personnes sans emplois supplémentaires à gérer à l’échelle d’un pays comme les Etats-Unis (qui passerait du plein emploi à plus de 10% de chômage), de quoi faire exploser de 30% en cinq ans une dette US, qui a passé le cap des 35 250 Mds$ ce 28 août.
La planche à billet de la Fed pourrait se remettre à rugir plus fort qu’en 2009 ou 2020… ou 2023/2024, où tous les records sont déjà battus.