La Chronique Agora

Nvidia : le nouveau Coca-Cola ?

Qu’est-ce qui fait la valeur de Nvidia ? Est-ce qu’elle fait votre vaisselle ? Est-ce qu’elle soulage votre mal de dos ? Que fait-elle exactement ?

Voici une bonne nouvelle que nous aimerions vous partager :

« Unusual Whales, une plateforme de services financiers qui s’efforce également de sensibiliser aux délits d’initiés au sein du Congrès, a rapporté mardi que le couple [Nancy et Paul Pelosi] a gagné près de 4 millions de dollars jusqu’à présent grâce aux options d’achat Nvidia, que la démocrate californienne a révélé que son mari avait achetées en novembre. »

Tant mieux pour eux ! Un vrai power couple.

Mais Nvidia a fait gagner beaucoup d’argent à beaucoup de gens.

Les lecteurs qui espèrent trouver dans ces pages « la prochaine Nvidia » seront déçus. Non seulement nous n’avons aucune idée de l’origine de la prochaine valeur qui sera propulsée au sommet, mais nous restons perplexes et un peu méfiants à l’égard de la Nvidia actuelle.

Comme nous l’avons indiqué la semaine dernière, une grande partie de l’économie est devenue « fictive » en raison de la politique de la Fed. Quelle est la part de « fiction » dans l’histoire de Nvidia ? Quelle part est basée sur le fabuleux château de sable que représente la monnaie américaine ? Et qu’en sera-t-il lors de la prochaine tempête ?

Dans son dernier rapport, Nvidia fait état d’une augmentation de 262% de ses ventes, d’une année sur l’autre. Les recettes nettes, quant à elles, ont augmenté de 265%, avec une marge bénéficiaire nette de 57%.

Cela pourrait-il être vrai ? Apparemment, oui.

Nvidia est la chose la plus étonnante qui se soit produite sur les marchés financiers depuis la création de Global Crossing, en 1997. Global Crossing devait être l’entreprise la plus importante de la nouvelle économie ; elle était censée contrôler un point névralgique d’Internet, à savoir les transmissions de données. Hélas, la société a fait faillite en 2002.

Aujourd’hui, Nvidia occupe la première place dans la course à l’IA. Elle connaît une croissance fulgurante, avec des ventes en hausse de plus de 600% au premier trimestre de cette année par rapport au même trimestre de l’année précédente. Et cette croissance devrait se poursuivre.

Il y a seulement quatre ans, Nvidia valait 150 milliards de dollars. Aujourd’hui, elle vaut vingt fois plus. Avec Apple et Microsoft, elle est l’une des trois plus grandes entreprises au monde. Ensemble, ces trois entreprises valent plus que le PIB annuel de l’Allemagne, du Japon ou de n’importe quel pays du monde, à l’exception de deux d’entre eux : la Chine et les Etats-Unis.

Depuis le début de l’année, les investisseurs de Nvidia ont enregistré un gain de 132%.

Personne ne quitte son bureau en disant à son conjoint qu’il achètera « un Nvidia » en rentrant à la maison. Personne n’achète « un nouveau Nvidia » lorsque l’ancien montre des signes d’usure. Et personne ne passe au Nvidia G10… juste pour être cool.

Qu’est-ce qui rend Nvidia si précieux ? Possédez-vous un Nvidia, cher lecteur ? Est-ce qu’il lave votre vaisselle ? Est-ce qu’il soulage votre mal de dos ? Que fait exactement Nvidia ?

NBC News s’est penché sur la question :

« Nvidia s’est spécialisée dans les processeurs graphiques (GPU). Comme leur nom l’indique, les GPU sont plus à même de restituer des images, ce qui explique qu’ils aient d’abord été associés aux jeux vidéo et informatiques.

Mais il s’avère que les GPU sont également capables d’effectuer des calculs simultanés, ce que ne peuvent pas faire les CPU classiques, ce qui les rend plus économes en énergie et plus aptes à répondre à des demandes de calcul sophistiquées.

Au fil du temps, les autres grands fabricants de puces ont commencé à produire leurs propres GPU pour faire face à la concurrence, mais c’est vers Nvidia, qui a bénéficié d’un avantage de premier plan dans ce domaine, que les entreprises ont commencé à se tourner pour répondre à leurs besoins en matière de GPU. »

A La Chronique Agora, nos besoins en GPU sont limités. Mais nous nous demandons quels sont les besoins réels du reste du monde… et s’ils sont suffisants pour justifier un prix de 3 000 milliards de dollars.

En d’autres termes, Nvidia est-elle un véritable investissement ou une nouvelle spéculation éclair ? En fin de compte, la valeur d’un véritable investissement dépend de l’argent qu’il peut rapporter, c’est-à-dire de la richesse réelle qu’il apporte au monde.

Fions-nous aux chiffres

Examinons donc les chiffres.

Pour justifier un prix de 3 000 milliards de dollars, en supposant un ratio cours/bénéfice moyen (après la phase de croissance), l’entreprise devrait être capable de produire environ 200 milliards de dollars de bénéfices chaque année… et de les maintenir année après année, de sorte que le rendement total de l’action Nvidia dépasse au moins celui des bons du Trésor américain.

Nvidia en est-elle capable ? Le revenu de l’entreprise sur les douze derniers mois était de 43 milliards de dollars. Supposons qu’il double l’année prochaine, et qu’il double encore l’année suivante. Il atteindra alors les 172 milliards de dollars, ce qui est à portée de main de l’objectif.

Cela suppose toutefois que l’entreprise vende quatre fois plus de puces, tout en conservant la même marge bénéficiaire. Quelle est la probabilité pour que cela devienne réalité ?

Cela suppose également que les nouvelles technologies n’évoluent pas, laissant Nvidia bloquée sur une île du passé, ou que les concurrents ne prennent pas de l’avance sur l’entreprise en proposant des puces GPU meilleures ou moins chères.

Il serait presque incroyable que Nvidia fasse tout cela. Mais Nvidia a déjà fait des choses incroyables… Peut-être en fera-t-elle d’autres.

Mais le plus incroyable, c’est que l’entreprise ne doit pas seulement atteindre cet objectif de bénéfices une fois. Elle doit maintenir sa position suffisamment longtemps pour que les investisseurs récupèrent leur argent. L’idée est que Nvidia devienne comme la société Coca-Cola, offrant un rafraîchissement à des générations d’utilisateurs d’IA, tout en offrant des dividendes fiables aux investisseurs, pendant de nombreuses années.

Au niveau actuel de la capitalisation boursière, Nvidia devrait rapidement quadrupler ou quintupler ses bénéfices, les maintenir à ce niveau pendant les quinze prochaines années et distribuer l’intégralité de ces bénéfices aux investisseurs.

Actuellement, Nvidia ne distribue que 1% de ses revenus sous forme de dividendes. A ce rythme, il faudrait attendre 1 200 ans pour récupérer son argent. Et cela avant impôts. Après impôts, cela pourrait être 2 400 ans.

Quelles sont les probabilités pour que cela arrive ?

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