La Chronique Agora

Quelques nouvelles de notre Transaction de la Décennie…

▪ Tant qu’on est encore en janvier, avec son cortège de bilans et de rétrospectives, profitons-en pour voir comment va notre « Transaction de la Décennie ». En un mot : mal.

Vous ne vous en souvenez probablement pas, mais au début des années 2000, nous avions annoncé notre première Transaction de la Décennie. « Vendez les actions, achetez de l’or », avions-nous conseillé.

Cette transaction a si bien fonctionné que nous avons du mal à croire que c’est nous qui l’avons recommandée. Les actions ont connu leur pire décennie depuis les années 30. L’or a connu la meilleure ou presque, passant de 300 $ environ à plus de 1 200 $ l’once (de mémoire).

Plutôt pas mal, sans vouloir nous vanter.

Et donc, début 2010, nous avons fait une autre prédiction échevelée. « Vendez les obligations du Trésor US, achetez les actions japonaises », qui s’est ensuite transformé en « Vendez les obligations japonaises, achetez les actions japonaises ».

Cette transaction ne reposait pas sur une connaissance spéciale de ce qui se passe au Japon. Nous n’en avions pas la moindre idée. Nous ne parlons pas un mot de japonais à part sayonara

Notre transaction était basée non pas sur un examen approfondi de l’avenir, mais sur un rapide coup d’oeil au passé. Les obligations gouvernementales japonaises grimpaient depuis 20 ans… tandis que les autorités japonaises en émettaient des tonnes. Toute une génération d’investisseurs avait dit sayonara à leur argent après avoir parié contre elles.

Parallèlement, les actions japonaises avaient déçu les investisseurs pendant deux décennies. Après le krach de 1990, elles avaient perdu entre 75% et 80% de leur valeur. Chaque fois qu’elles semblaient reprendre du terrain… elles ne tardaient pas à rechuter.

Nous nous sommes donc dit que la tendance des 20 dernières années ne durerait probablement pas 10 ans de plus. Plus précisément, nous avons pensé qu’il était peu probable de voir les Japonais accumuler une dette dépassant les 200% du PIB — bien au-delà du point de non-retour — sans provoquer une baisse massive du prix des obligations. Par la suite, l’argent qui afflue actuellement dans les obligations aurait besoin d’un nouveau domicile. Et où aller, sinon dans les actions ?

Pour l’instant, ça ne s’est pas passé. La transaction est allée contre nous… ou du moins pas en notre faveur.

▪ Nouvelle ère ou banquiers centraux casse-cou ?
Mais les autorités japonaises sont de notre côté. Elles essaient vigoureusement de détruire le yen. Oui, cher lecteur : les Japonais ont rejoint les Européens, les Américains et les Chinois dans l’aventure la plus casse-cou de l’histoire monétaire. En dépit d’une dette gouvernementale faisant plus de deux fois la taille de l’économie, le nouveau gouvernement de Shinzo Abe s’est engagé à emprunter plus d’argent.

Et il se tourne vers la Banque du Japon pour soutenir ses emprunts imprudents tout comme la BCE soutient l’Europe et la Fed soutient l’administration Obama. C’est-à-dire qu’il veut que la Banque centrale imprime plus d’argent. Combien ?

« Autant qu’il le faudra », c’est le nouveau slogan. C’est ce que Mario Draghi a promis à l’Europe — « tout ce qu’il faudra ». C’est aussi ce que Ben Bernanke offre aux Etats-Unis. Il fera tourner la planche à billets « aussi longtemps qu’il le faudra » pour ramener le chômage à 6,5%.

Pfiou ! C’est tout ce que nous pouvons dire.

« Autant qu’il le faudra », ce n’est pas une expression qu’on entend généralement de la part de banquiers prudents. Donc soit les temps ont fondamentalement changé… soit ces banquiers ne sont pas très prudents.

Lequel est-ce ? A — une « nouvelle ère » ? Ou B — des banquiers centraux imprudents ?

Nous allons choisir B. Et parier que notre Transaction de la Décennie tournera en notre faveur avant que nous sabrions le Dom Pérignon le 31 décembre 2021.

Le gouvernement d’Abe pourrait ne pas complètement tuer le yen dans les huit prochaines années, mais il causera à coup sûr des dégâts.

Nous notons également que des analystes sérieux se rallient à notre point de vue. En général, ce genre de chose est plutôt négatif… mais dans ce cas précis notre position est si marginale qu’elle en est isolée.

Felix Zulauf :

« L’économie japonaise ne va pas bien et souffre encore de la déflation. La détérioration prononcée des comptes courants du Japon et sa capacité déclinante à financer ses profonds déficits budgétaires contraignent à d’importants changements. Le nouveau gouvernement japonais, mené par le Parti libéral-démocrate et le Premier ministre Abe, a une majorité de deux tiers au Parlement et peut imposer ses volontés sans problèmes. Abe souhaite une augmentation des dépenses déficitaires en plus d’un déficit budgétaire se montant déjà à près de 10% du PIB. Il souhaite que la Banque du Japon en finance une bonne partie en imprimant de l’argent, affaiblissant ainsi le yen et visant les 2% d’inflation ».

« … si la devise continue de baisser par rapport à toutes les autres, il y aura une hausse gigantesque des valeurs japonaises »…

Alors restons fidèles à notre Transaction de la Décennie. Vendez les obligations japonaises. Achetez les actions japonaises. Revenez nous voir dans huit ans pour voir comment tout ça a fini.

Sayonara.

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