La Chronique Agora

Notre sélection de l'été : La Chine, première puissance mondiale en 2018

En attendant le retour de nos rédacteurs, retrouvez tous les jours un classique de la Chronique.

** Un vieil ami nous a offert un abonnement au National Geographic. Henry s’empare de chaque nouveau numéro et passe des heures à le lire. Ce mois-ci, le magazine consacrait tout son numéro à la Chine — et Henry a passé quasiment tout son dimanche à l’étudier.

* "La Chine, c’est incroyable", décrétait-il le soir venu.

* Chaque détail est un superlatif… plus grand, plus vite, plus haut, plus… plus… plus. Les choses se déroulent si rapidement que dans dix ans, la Chine sera la plus grande économie au monde.

* Inutile de vous dire ce que cela signifie, cher lecteur. Donnez de l’argent à quelqu’un, et en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire, il pense pouvoir dire aux gens ce qu’ils doivent faire et comment il faut vivre. Les Etats-Unis sont devenus la plus grande économie au monde aux environs de 1900. En 1918 déjà, Woodrow Wilson se rendait en Europe avec ses "14 Points".

* "Dieu Lui-même n’en a eu besoin que de 10", déclara Clemenceau.

* Mais les Etats-Unis avaient prêté beaucoup d’argent aux Français et aux Anglais ; ils devaient écouter poliment, même s’ils pensaient que Wilson était un idiot.

* A présent, c’est la Chine qui a l’argent — la plus haute pile de dollars au monde. Et bientôt, elle aura l’économie la plus puissante. Il ne faudra guère de temps avant que les dirigeants chinois ne veuillent jouer les gros bras. Et ils ont beaucoup de muscles. On ne trouve que cinq filles pour six garçons. Lorsque la Chine aura la plus grande économie au monde, elle comptera aussi 30 millions de jeunes hommes qui ne peuvent trouver une épouse. Que deviendront-ils ? Des soldats ! La Chine aura alors l’armée la plus grande et la plus moderne au monde… ainsi qu’un puissant désir de montrer au reste du monde comment mener sa barque.

* Comment dit-on "nous nous rendons", en mandarin ? Nous n’en savons rien ; l’Occident devrait toutefois se renseigner, juste au cas où.

** Mais ne vous inquiétez pas, nous n’en sommes pas encore là… et il y a loin de la coupe aux lèvres. Oh oui, la Chine aussi se dirige tout droit vers les ennuis… on ne peut pas maintenir une telle croissance sans ennuis. Par certains aspects, la Chine est la plus grosse bulle que le monde ait jamais vue — plus grosse que les dot.com… plus grosse que l’immobilier US… plus grosse que le crédit, la finance et les produits dérivés. Non seulement elle s’étend rapidement — mais elle DOIT s’étendre… ou elle explose. Comme une bulle de crédit, elle ne peut pas faire de pause. Si elle cesse de gonfler… des choses désagréables se produisent. Dans une bulle du crédit, les gens ont besoin de plus en plus de fonds pour rembourser les mauvais prêts et les mauvais investissements dans lesquels ils se sont lancés. S’ils n’obtiennent pas plus d’argent, les crédits tournent mal. Les entreprises font faillite. Les gens ne versent pas leurs mensualités. Les prêts se transforment en pertes. En peu de temps, on a une récession… voire pire. La bulle de la Chine est bien plus dangereuse… parce que des centaines de millions de gens dépendent des taux de croissance élevés.

* Ils ne peuvent rester où ils sont… car ce ne sont plus des paysans. Ils ont emménagé en ville pour rejoindre le prolétariat international ; ils ont besoin de travail ! Ils ont besoin de progrès ! Ils doivent construire des routes géantes et des aqueducs… des aéroports et des usines. Ils doivent produire plus de choses. Ils doivent contribuer à l’économie mondiale. Ils ont besoin d’emplois. Et s’ils n’en obtiennent pas, la Chine pourrait exploser. De plus, l’économie chinoise est gérée — tout au sommet — par des autorités encore plus nigaudes que celles de l’Occident. Si les ennuis ne les trouvent pas, elles trouveront les ennuis.

* Un graphique sur l’utilisation pétrolière de la Chine a retenu notre attention. Il y a dix ans de cela, la Chine importait 165 millions de barils de pétrole par an. Aujourd’hui, le total dépasse le milliard. Que fait le pays avec toute cette énergie ? Il croît… il se développe… il ronronne… il roule… il s’envole.

* En regardant les photos (nous ne sommes plus allé en Chine depuis plus de 15 ans), l’endroit nous rappelle un adolescent — cool, insupportable, et grandissant trop rapidement pour ses vêtements. C’est un pays adolescent, qui se développe si rapidement qu’il doit manger sans arrêt. En plus du pétrole, la Chine a ouvert 229 nouvelles centrales électriques alimentées au charbon depuis 1990.

* Vous vous demandez pourquoi le prix du pétrole a atteint un nouveau sommet la semaine dernière — à plus de 126 $ le baril ?

* Eh bien, la Chine est une grosse partie de la réponse.

* Le riz se vend désormais deux fois plus cher que l’an dernier. Peut-on accuser la Chine de cela aussi ? En partie. Lorsque les Chinois vivaient dans les campagnes, ils se nourrissaient de ce qu’ils produisaient. Mais une fois en ville, ils se transformèrent en clients du marché mondialisé… faisant concurrence, pour leur pain quotidien, à des citoyens de Des Moines ou de Dubrovnik.

* Il y a un proverbe au sujet de la terre : "on n’en fabrique plus". Eh bien en Chine, non seulement on n’en fabrique plus, mais on en perd. Depuis 1949, déclare le National Geographic, la Chine a perdu un cinquième de ses terres agricoles pour cause de tempêtes de sable, désertification, pollution et urbanisation. Chaque année, le pays perd encore plus de terrain — une zone de 3 000 km2 approximativement.

* Voyons voir… de plus en plus de gens déménageant en ville — par centaines de millions. Ils construisent des usines… bâtissent des maisons… achètent des voitures… des machines à laver… des ordinateurs… De plus en plus de gens sont en concurrence pour les ressources mondiales… et il y a de moins en moins de terres agricoles.

Première parution : 13/05/2008

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