La Chronique Agora

Notre sélection de l'été : 10 raisons pour une baisse des marchés jusqu'en 2010

En attendant le retour de nos rédacteurs, retrouvez tous les jours un classique de la Chronique.

Les raisons que je vais avancer paraîtront très américainesà l’investisseur européen. Mais les Etats-Unis ont été jusqu’à présent le moteur de la croissance et de la dynamique boursière mondiale. Le dollar reste encore une monnaie étalon et le doute plane toujours sur le régime des moteurs auxiliaires que sont la Chine, l’Inde et le Brésil et leur faculté à ne pas caler.

Raison 1 : la stagflation
Stagflation: un exemple historique bien connu est 1929. La stagflation touche les Etats-Unis, où la croissance ralentit sur fond de création monétaire sans précédent historique. L’Europe n’en est pas loin avec une croissance anémique et des pays de l’Union en déficit budgétaire chronique. Le peu de croissance vient des pays émergents de l’Europe de l’Est. Les chiffres d’inflation sont coupés de toute réalité et on peut douter de l’utilité des indices bricolés hors "habitation et alimentation et énergie". La croissance est en panneet le moteur de l’inflation est le pétrole. Aucune récession n’allègera le poids de la facture pétrolière. Comment les gouvernements des pays riches pourraient-ils dénoncer une énergie trop chère alors qu’ils la taxent à des taux de 75% ? La stagflation est mortelle pour les bénéfices des entreprises et donc pour les indices des marchés.

Raison 2 : les matières premières et le pétrole
Les nouvelles devises mondiales s’appellent pétrole, métaux, produits agricoles. Plutôt que de stocker des dollars qui se déprécient, les investisseurs lestés en billets verts achètent du pétrole. Quant aux pays producteurs de pétrole, ils recyclent leurs pétrodollars dans les métaux précieux ou investissent chez eux. C’est autant de capitaux en moins pour les marchés actions.

Raison 3 : la crise de l’immobilier américain et du crédit hypothécaire
En quoi la baisse de la valeur de l’immobilier californien ou autre pèserait-elle sur les marchés ? Parce qu’elle conditionne la consommation américaine qui représente 75% du PIB des Etats-Unis. Des établissements financiers sans scrupule ont prêté de l’argent à des ménages pour qu’ils consomment avec l’argent de la plus-value latente de leur logement. Aujourd’hui, la plus-value latente s’est évaporée, mais les dettes restent. D’où la récession.

Raison 4 : les dérivés de crédit toxiques
On touche là au coeur technique de la crise du crédit hypothécaire. Les risques liés au crédit hypothécaire ont été sous-estimés et endossés par des établissements financiers. Le FMI évalue l’ardoise à 1 000 milliards de dollars. Moins du tiers est aujourd’hui déclaré par les établissements financiers. Des vagues d’inquiétudes secoueront les marchés au fur et à mesures des sinistres qui feront surface.

Raison 5 : la pyramide de dettes américaines
David Walker, rapporteur financier du Congrès, a déclaré avant son départ en mars que les USA étaient en banqueroute et utilisaient des pratiques comptables aussi contestable que celles d’Enron. Les Etats-Unis cumulent un déficit commercial sans précédent avec un endettement aux niveaux fédéral, étatique et collectivités locales. La dette actuelle se monte à plus de 9 400 milliards de dollars. Ce fardeau pèse sur le cours du dollar et nourrit en partie la spéculation sur les matières premières.

Raison 6 : la prolifération des instabilités géopolitiques
Outre la dispendieuse guerre en Irak menée par les Etats-Unis, les menaces se multiplient dans un monde qui sent que le gendarme américain s’affaiblit. Les camarades capitalistes chinois vont éprouver de plus en plus de mal à censurer internet. Le terrorisme islamique est loin d’être terrassé. Les marchés détestent le "son du canon".

Raison 7 : le déni de réalité
Les problèmes sont plus faciles à régler lorsqu’ils sont bien identifiés. Les minorer ou les masquer retarde la solution. Etats-Unis et Europe minorent l’impact de la création monétaire de ces dernières années, de l’inflation sous-jacente. Lorsque les marchés vont prendre la mesure de la réalité, ils déprimeront

Raison 8 : la culture de l’immédiat
Les démocraties médiatisées vivent dans une culture de l’immédiat. Il faut des résultats rapidement. Les marchés vivent dans la même culture. Ils ne vont pas apprécier l’érosion progressive des résultats des sociétés cotées.

Raison 9 : le choc démographique
Les pays encore riches, mais endettés et vieillissants se trouvent cernés par des pays à population jeune dont le niveau de vie s’améliore. La croissance de la consommation va se déplacer vers l’Asie et les entreprises de ces pays sont les mieux placées pour en tirer profit.

Raison 10 : la nouvelle donne
Les marchés financiers vivent encore sur un schéma bientôt obsolète. La richesse se déplace à grands pas. L’empire américain décline et va laisser place à une autre hégémonie. La crise de 1929 a marqué la fin de la domination de la livre sterling. Le règne du dollar se termine et les turbulences sont inévitables.

10 commandements pour en tirer parti
– Préparez-vous à une vague d’inflation
– Renforcez-vous en pétrole et en or
– Restez à l’écart des valeurs liées à la consommation des pays riches
– Restez à l’écart des valeurs financières
– Restez à l’écart des valeurs américaines
– Evaluez l’impact des instabilités géopolitiques sur les grandes entreprises cotées
– Restez sourd au discours financier convenu
– Guettez les opportunités en Asie
– Gérez rigoureusement vos ordres de vente stop

Meilleures salutations,

Simone Wapler
Pour la Chronique Agora

(*) Simone Wapler est analyste, journaliste et ingénieur de formation. Elle a déjà contribué à des publications telles que Le Point, Enjeux, Les Echos, Chart’s… Spécialisée dans les valeurs industrielles, les matières premières, les énergies, l’or, les minières Simone Wapler est passionnée par et les investissements « tangibles ». Elle analyse chaque mois le secteur aurifère dans la lettre d’investissement Vos Finances – La Lettre du Patrimoine et elle intervient régulièrement dans l’Edito Matières Premières ou dans différents rapports d’investissements.

Première parution : 15/04/2008

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