La Chronique Agora

Ne vous laissez pas berner par le chant des sirènes

Par Jean Chabru

Le moins que l’on puisse dire est que l’été aura été chaud… Alors que j’étais clairement dans le camp de ceux qui pensaient que la tendance baissière constatée sur les indices début juillet allait se renforcer durant l’été, c’est tout l’inverse qui s’est produit : depuis le 10 juillet, le CAC 40 a pris près de 25%…

De là à dire que je me suis complètement trompé, il n’y a qu’un pas. Néanmoins, j’avais pris la décision de conseiller aux lecteurs de Small Caps Profits de rester investis en mettant des stops loss pour prévenir tout retournement.

Une simple reprise technique ?
Il n’en reste pas moins que je continue de rester très dubitatif sur l’ampleur de ce rebond. Si des signes de reprise sont perceptibles, la crise n’est pas finie. Il suffit pour cela d’interroger les patrons des sociétés qui travaillent dans l’économie réelle, ils sont loin d’être aussi enthousiastes que les investisseurs. La bouteille est aujourd’hui à moitié pleine et la reprise que nous constatons ne pourrait être que technique.

La question que se posent aujourd’hui tous les observateurs est comment sera la reprise : en "V" ou en "W" ? De l’avis des économistes, le rebond inattendu du PIB en France et en Allemagne au deuxième trimestre serait le signe que nous sommes dans la première jambe du "W" et qu’une fois le rebond technique passé, la faiblesse structurelle de la demande pèserait encore sur l’économie en 2010.

Le visage de l’avenir reste sombre
L’économiste Nouriel Roubini — qui je vous rappelle avait été l’un des premiers à prédire la crise — distille un message certes moins pessimiste qu’il y a quelques mois mais toujours teinté de noir. Selon lui, le scénario d’une reprise en "W" apparaît le plus crédible et il prédit que le point bas en termes économiques sera atteint dans les économies développées au second semestre. Cela étant, "toute une série de raisons font que les économies avancées risquent d’enregistrer une croissance anémique, bien en dessous des niveaux historiques, pendant encore deux ans au moins".

Et pour cet économiste, la première raison qui est "susceptible de créer un ralentissement de longue haleine : les ménages ont besoin de diminuer l’effet de levier et d’épargner davantage, ce qui provoquera une contraction à long terme de la consommation".

Ensuite, le système financier — banques et institutions non bancaires — reste "dans un état grave". Pour s’en persuader, il suffit de se référer aux récentes annonces faites par Natixis qui va placer ses actifs toxiques estimés à 33 milliards d’euros dans une bad bank.

Autre phénomène qui pourrait limiter la recovery de l’économie, "le crédit, dont la croissance manque de solidité, ne pourra alimenter ni la consommation ni l’investissement".

"Troisième raison, les stocks excessifs constitués par les entreprises auront un impact négatif sur les profits, si la croissance reste anémique et si les poussées déflationnistes persistent. Résultat, elles sont loin d’accroître leurs dépenses d’investissement", souligne encore cet économiste.

Last but not least, "les coups de levier qu’a donné le secteur public, par le biais d’énormes déficits budgétaires et d’un endettement permissif, menacent d’inhiber l’investissement privé. Les effets de ces mesures d’incitation se dissiperont d’ici le début de l’an prochain, et le secteur privé devra consentir de plus gros efforts pour soutenir la croissance".

Et Roubini de conclure son analyse : "l’amélioration de l’économie réelle n’est probablement pas mûre pour les rebonds des marchés — bourse, matières premières et crédit — qui ont eu lieu dernièrement. Si tel est le cas, une correction ne devrait pas tarder".

Si le pire est passé, nous sommes loin d’être sortis du tunnel comme semblent le penser les marchés actions mondiaux et ceux qui en vivent, à savoir les banques d’affaires.

Restez prudent en investissant sur des valeurs saines
Donc je ne saurais que trop vous conseiller la prudence. Une prudence que j’applique évidemment dans ma stratégie de gestion en vous recommandant d’acheter deux sociétés dont les fondamentaux et la valorisation me semblent totalement décorrélés des fondamentaux, et surtout qui ont atteint un point d’inflexion, boursièrement parlant.
[NDLR : Pour profiter des deux recommandations de Jean, découvrez son système de sélection d’actions — mais n’attendez pas pour vous positionner : les seuils d’achat seront peut-être vite dépassés…]

Meilleures salutations,

Jean Chabru
Pour la Chronique Agora

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