La Chronique Agora

Le monde des petites valeurs semble préservé du pire de la crise

▪ L’un de mes amis, de retour d’un week-end à Mykonos, m’a raconté qu’aussi bien les restaurateurs que les loueurs de voitures exigeaient un paiement en espèces. Les cartes bleues sont proscrites de certains pans de l’activité : paiement en liquide exigé — histoire de pouvoir s’en mettre un peu de côté à l’abri du rouleau compresseur des impôts ?

▪ Le scénario du pire se met en place sur les marchés financiers…
Mais dans ce cas, si un pan de l’économie et de l’argent disparaissent des comptes, comment récupérer l’argent ?

Le déficit grec à 8,5% du produit intérieur brut est supérieur aux attentes, ce qui veut dire que l’Etat va devoir augmenter à nouveau les impôts. Mais cela signifie que les ménages consommeront moins. Et que les commerçants continueront à court-circuiter ce système pour maintenir leur pouvoir d’achat ! Autant de recettes fiscales en moins ! Comment voulez-vous qu’il y ait de véritable réduction du déficit dans ces conditions ?!

Certains gérants avec qui je me suis entretenu préfèrent carrément un haircut de l’ordre de 50% plutôt que cette paralysie politique actuelle.

Ce que dans le milieu nous appelons « haircut » signifie que l’on accepte un défaut de 50% : les créanciers s’assoient sur 50% des montants qu’ils ont investis. Ce serait un moindre mal car on ne voit pas comment la Grèce peut s’en sortir alors qu’elle est entrée dans le cercle vicieux de la récession tout en ayant des obligations de devoir taxer encore plus.

Nous sommes actuellement dans le scénario quasiment du pire… La valorisation actuelle des marchés intègre clairement des scénarios économiques très noirs, c’est-à-dire un scénario à la 2008 avec une révision à la baisse des bénéfices par action de l’ordre de 30%.

… Mais les dirigeants restent optimistes et confiants dans leurs activités
Or dans le monde des small caps, je ne ressens pas du tout ce genre de situation. Je vous l’ai déjà dit : lors de mes rencontres et réunions avec les dirigeants de small caps, les chefs d’entreprises restent optimistes et je ne ressens pas du tout une inquiétude exagérée pour leur activité à venir.

Tenez par exemple, récemment, je publiais sur le site Small Caps Confidentiel mon analyse de SQLI . La société, spécialisée dans le développement de technologies et de services Internet, s’est redressée de manière spectaculaire, et la direction continue d’être optimiste. Et d’après moi, ils ont parfaitement raison de l’être !

Les publications se sont succédé il y a quelques jours avec de bonnes surprises comme Le Bélier. Gérard Perrier Industrie a pris lui 12% sur de bons résultats. Le spécialiste dans la conception et la fabrication d’équipements électriques destinés aux fabricants de machines industrielles a vu son bénéfice net progresser de 51% au premier semestre et a surtout revu à la hausse ses prévisions de chiffre d’affaires annuel.

Autre boîte qui progresse sans que son activité soit a priori au coeur des préoccupations des marchés : Catering International Services (que vous connaissez sans doute mieux sous l’acronyme CIS) est le spécialiste du catering (nourrir, loger, servir des personnes expatriées à l’autre bout du monde, quelles que soient les conditions) en milieu hostile. Il prend 4,5% suite à de bons résultats, tout en confirmant ses prévisions de croissance à deux chiffres de son activité annuelle.

ESI Group, un spécialiste des progiciels destinés à la réalisation d’essais virtuels, prend 16,5% en cinq séances, tout simplement parce que sa perte nette a été réduite sur le premier semestre mais aussi parce que le groupe aborde le second semestre avec confiance.

▪ Découplage entre la vraie économie et les financiers
Non vraiment, ceux qui font la vraie économie ne paniquent pas. Ils restent prudents, c’est certain, attentifs aux changements, mais ils gardent une bonne visibilité sur leurs activités et restent optimistes et confiants. Il y a donc une véritable déconnexion entre la perception qu’ont les chefs d’entreprise et celles qu’ont les investisseurs.

Qui l’emportera ? Je pencherai plutôt pour le monde des entrepreneurs, ce qui me conforte dans mes prévisions d’un marché plus proche des 3 200 points que des 2 500 points. Mais… dans un contexte de panique et de flots de rumeurs, les marchés sont complètement déstabilisés et pour le coup, eux, n’ont aucune visibilité.

▪ Nouvelle vague de fusions-acquisitions à attendre ?
Un fait significatif, qui est sans doute le début d’une nouvelle grande vague de fusions-acquisitions (fusacq) — ce qui n’aurait rien d’étonnant vu les décotes boursières et donc les faibles niveaux de valorisations de certaines entreprises qui sont désormais des proies faciles.

Nous avons vu le retour des opérations financières avec le rachat par le Japonais Santen Pharmaceuticals de Novagali, un spécialiste français dans le développement de médicaments innovants en ophtalmologie. Le groupe nippon s’offre pour 98 millions d’euros un spécialiste des collyres dont le chiffre d’affaires n’est que de 0,6 million d’euros (je ne me suis pas trompé d’un zéro, je parle bien de 600 000 euros de chiffre d’activité annuelle). Une aberration…

Mais nous sommes là dans le monde des biotechnologiques, un secteur qui échappe complètement à la moindre valorisation et dans lequel les profanes n’ont pas leur place. C’est ainsi que n’étant ni un spécialiste du monde médical, ni un pharmacien de formation, je préfère m’abstenir de m’intéresser à ce secteur.

Et pour ce qui est des fusacq, si elles reprennent, nous aurons l’occasion d’y revenir en détail.

Première parution dans Small Caps Confidentiel le 04/10/2011.

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