La Chronique Agora

Méfiez-vous des conseillers financiers intéressés

Par Frédéric Laurent (*)

Un mois de réflexion pour l’achat de sa voiture, une semaine pour un téléviseur, mais seulement une demi-heure de rendez-vous à sa banque, avec un interlocuteur qui va vous vanter les mérites du dernier placement miracle. Cherchez l’erreur.

L’investissement de votre épargne, objet de sacrifices de toute une vie de travail, mérite bien un minimum de temps. Quel que soit l’investissement que vous choisirez — un contrat d’assurance vie, un portefeuille de titres, un investissement dans l’immobilier locatif –, il faut surtout qu’il réponde précisément à vos besoins. A qui donc se fier ?

L’ambiguïté de la rémunération du conseiller
De trop nombreux abus sont constatés avec les prétendus bons conseils, prodigués par les vautours de la profession. En cause : leur mode de rémunération.

Pourtant, dans les pays anglo-saxons, presque tous les conseillers financiers sont payés sur la base d’honoraires. C’est le même principe que pour les avocats : les honoraires sont facturés au temps passé.

Ce mode de rémunération, pourtant logique, n’arrive pas à percer dans l’Hexagone. Chez nous, les conseillers, qui doivent vivre de leurs prescriptions, ont trouvé un autre système : ils se rémunèrent sur des commissions provenant des produits souscrits. Du coup, on se doute que le conseil n’est plus forcément donné avec toute l’objectivité souhaitée.

Pire, les commissions elles-mêmes font souvent preuve d’opacité. Cela aboutit pour les clients à des ventes forcées, à des recommandations inadaptées.

Ayez toujours à l’esprit que ce n’est pas parce que vous vous adressez à une banque que vous devez lui accorder toute votre confiance aveuglément.

Des conseils pour le profit… des conseillers
En plein milieu de la crise la plus noire qu’ait connue notre société, n’avez-vous pas entendu votre conseiller de clientèle vous vanter que c’est le moment de tout investir sur un PEA ? Ce conseiller, généralement fraîchement sorti d’une école de commerce, n’a aucune expérience en matière de marchés financiers. Obligations et actions peuvent même se confondre dans son esprit. Surtout, ces jeunes banquiers subissent la pression de leur hiérarchie.

L’objectif de la direction : faire rentrer du contrat, que ce soit un contrat d’assurance vie, un PEA, un livret épargne, un Livret A ces derniers mois, un crédit à la consommation… Bref, tout ce qui se vend et qui rapporte à la banque, avant de vous rapporter à vous.

Les dirigeants donnent à leurs banquiers des objectifs souvent irréalistes et leur font miroiter primes, bonus ou variable sur leur salaire de base. Le portrait paraît caricatural, mais la sécurité de votre argent mérite que vous portiez attention à celui qui vous conseille. Tout est fait pour vendre, parfois même à l’encontre de vos propres intérêts.

Un système de commissions pousse-au-crime
Dans presque toutes les banques françaises, les conseillers de clientèle reçoivent des commissions. Avec pour principale logique, l’intérêt… de la banque. Ainsi, le conseiller va percevoir neuf euros pour 15 000 euros placés en fonds actions sur un contrat d’assurance vie, alors qu’il ne touchera que 0,90 euros pour placer la même somme en fonds en euros.

Pis, cette commission est récurrente, c’est-à-dire que la banque va toucher une commission pour chaque année de vie du contrat. Cette commission est beaucoup plus importante sur les fonds en actions.

En ce moment, il semble évident que les clients recherchent avant tout la sécurité, représentée ici par le fonds euro. Mais avec de telles carottes, bien souvent le conseiller sera, inconsciemment peut-être, amené à trouver les meilleurs arguments pour vous faire choisir, au moins en partie, les fonds actions.

En l’absence de formation spécialisée, ils vont avant tout chercher à répondre aux objectifs fixés par leur hiérarchie et… à conserver leur place en ces temps difficiles.

Repérez les mauvais signes
Soyez encore plus prudent que par le passé, car les banques doivent maintenant regagner de l’argent, c’est une question de survie. Un air hautain, surtout chez un jeune conseiller de 23 ans, est souvent signe d’inexpérience. Un argumentaire avec un phrasé mécanique peut cacher l’incompétence.

Prenez garde le jour où votre conseiller vous appelle pour vous proposer le "meilleur placement, sans risques". Il s’agit souvent de terminer un stock de produits financiers ou de vous passer une "patate chaude".

Malheureusement, trop souvent, les conseillers sont là uniquement pour placer le produit le mieux commissionné. Si vous avez le sentiment que c’est le cas, demandez à bénéficier des services de la banque privée de votre établissement (généralement réservés aux gros patrimoines).

Enfin, suivez régulièrement l’évolution des propositions que vous suggère votre interlocuteur, car un patrimoine se gère sur le long terme et la diversification est le garant de sa protection.

Meilleures salutations,

Frédéric Laurent,
Pour la Chronique Agora

(*) Diplômé d’un DESS de Gestion Internationale de Fortune, Frédéric Laurent exerce ses activités de conseil et de gestion depuis une vingtaine d’années. Il a choisi de se mettre efficacement au service de l’investisseur particulier – bien souvent mal conseillé par les institutionnels. C’est dans ce but qu’il a rejoint les Publications Agora en intervenant régulièrement dans la rubrique Patrimoine de Vos Finances – La Lettre du Patrimoine.

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