La Chronique Agora

McGovern contre Petraeus

▪ Nous continuons à tenter de démêler les bons et les brutes… et les truands.

Vous êtes probablement aussi dégoûté par les brutes et les truands que nous le sommes. Aujourd’hui, nous nous attardons donc sur le bon.

Oui, il y a des gens bien tout autour de nous. La vie privée en est pleine. Un bon jardinier. Un bon homme d’église. Même un bon banquier.

Mais dans la vie publique, un homme bon est difficile à trouver. On peut fouiller les institutions nationales de la cave au grenier, par exemple — y compris les placards à balais. On n’en trouvera pas beaucoup. Au lieu de ça, les vives lumières du "service public" attirent les bestioles, les nuisances et les parasites. Certains sont simplement pénibles. D’autres sont dangereux.

Nous avions promis de laisser la vermine pour demain mais nous ne pouvons pas nous empêcher de mentionner l’un d’entre eux, le général David Peatraeus. Il figure dans l’histoire d’aujourd’hui comme le monstre Cyclope : il représente le défi qui a engendré notre héros.

C’était à New York, au 92Y — qui se définit comme "un centre communautaire et culturel de classe mondiale — que le général Petraeus était censé s’exprimer.

Rappelons qu’en 2011, le général Petraeus était la star des ambitions américaines en matière de politique étrangère. C’était l’homme derrière l’opération Surge en Irak. A l’époque, il était moins clair qu’aujourd’hui que l’opération était un désastre. Elle a englouti des milliards de dollars. Elle a coûté la vie à des milliers de personnes (dont 1 000 soldats américains) et nombre des armes envoyées en Irak se sont retrouvées entre les mains de l’EI — y compris 2 300 Humvees, 7 400 mitrailleuses et 40 chars Abrams — qui aident désormais l’Etat islamique à prendre le contrôle de l’Irak !

▪ Il y a délit et délit…
L’événement à New York s’est produit trois ans plus tard, en 2014. Le général Petraeus était alors en disgrâce. Il était à la tête de la meilleure agence de "sécurité" aux Etats-Unis, la CIA. Pourtant, il avait donné le "livre noir" contenant les informations les plus sensibles du pays à sa maîtresse (qui écrivait elle aussi un livre pour expliquer combien il était formidable). On aurait pu penser que pour une telle offense, il se serait retrouvé devant un peloton d’exécution… mais non.

Quelqu’un, toutefois, l’avait percé à jour : Ray McGovern. En 2014, en dépit de son délit, Petraeus profitait encore de la gloire et de l’adulation d’un héros conquérant. Son aura était telle que les billets pour cette conférence étaient vendus 45 $ pièce — et l’un d’entre eux avait été acheté par le susdit McGovern.

Si McGovern a attiré notre attention, c’est parce qu’il y a quelques mois, il a assisté à un discours d’Hilary Clinton à l’université George Wahsington. Il a tourné le dos à celle qui était encore à l’époque secrétaire d’Etat, se faisant ainsi arrêter pour trouble à l’ordre public.

Mais McGovern n’était pas un manifestant ordinaire. Il est retraité de la CIA, où il préparait autrefois le "brief sécurité" quotidien du président. Désormais âgé de 72 ans, il se consacre à révéler les mauvaises utilisations qui sont faites avec les "informations confidentielles". Il n’a pas aimé la manière dont l’administration Bush a faussé les faits pour soutenir l’invasion de l’Irak, par exemple. Il a protesté contre l’utilisation de la torture et a renvoyé sa médaille de service à la CIA à son ancien employeur.

Suite à l’incident avec Hilary, il a dû être mis sur une liste. Même avant ça, ceci dit, les Renseignements devaient déjà s’intéresser à son cas lorsqu’il est arrivé au 92Y en 2014, en s’attendant à exercer ses droits constitutionnels à la liberté de parole.

Il voulait tout particulièrement poser quelques questions au général David Petraeus.

"Vous ne pouvez pas entrer, Ray", lui a dit un policier alors que McGovern tentait de passer la porte du centre culturel.

Ray expliqua qu’il s’agissait d’un forum public et qu’il avait acheté un billet. Il déclara à la police qu’il avait le droit d’entrer.

Tant et si bien que la police l’arrêté — une fois encore — pour trouble de l’ordre public ! Il a été retenu pendant une nuit, avant d’être relâché.

En revanche, Petraeus — qui avait commis un crime sérieux — n’a jamais été inquiété.

A suivre…

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