La Chronique Agora

Mario Draghi n’est pas le Père Noël

▪ On ne peut pas tout demander à la Banque centrale européenne — comme semblent le croire les hommes politiques, économistes et autres zinzins. Donc lui demander de créer de la monnaie en quantité illimitée pour :

1/ prêter en dernier ressort aux banques (contre collatéraux douteux) sur des appels d’offre de moins en moins conventionnels et sur des maturités de plus en plus longues ;
2/ acheter en dernier ressort la dette des Etats périphériques en émettant ex nihilo ;
3/ financer d’éventuelles moins-values sur des stocks de titres dépréciés…
… devient complètement absurde.

Il est vrai qu’il est très tentant pour les gouvernements de vouloir proclamer la fin officielle de la crise en demandant à la Banque centrale de masquer les vrais problèmes — ou du moins de les reporter dans le temps. De dire que c’est la faute de la BCE si on ne s’en sort pas — politiquement, rejeter la faute sur un économiste/financier vaut toujours mieux qu’assumer.

Mais la BCE n’est pas le Père Noël.

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Pourtant, Mario Draghi a donné des espoirs excessifs aux marchés. Il est allé jusqu’à affirmer que le financement de certaines dettes publiques ne serait pas de la création monétaire ! Mais ce que s’apprête à faire la BCE (cet après-midi ou à la prochaine échéance) est et restera du non-conventionnel de la même nature que les précédents LTRO. Car en achetant de la dette périphérique sur des maturités maximales de trois ans, c’est comme si la BCE faisait un nouveau LTRO de trois ans aux banques italiennes et espagnoles, entièrement destiné à acheter la dette de leurs souverains.

▪ Une nouvelle version du LTRO ?
La différence avec les LTRO passés, c’est que l’on va réussir cette fois à mettre en place une vraie déconnexion entre le risque bancaire et le risque souverain.

On avait, en effet, constaté que ces opérations avaient pu aggraver la crise en renforçant la corrélation entre le risque bancaire et le risque souverain puisque les banques italiennes et espagnoles utilisaient une bonne partie de cette nouvelle liquidité pour acheter de la dette souveraine nationale.

Mais il ne faut pas être dupe : on assistera à un transfert de risques avec une Banque centrale qui acceptera de prendre des pertes sur les papiers achetés, qu’elle pourra comptabiliser de deux manières :

– la plus orthodoxe serait d’imputer les pertes sur le capital (10,7 milliards d’euros à fin 2011) ainsi que sur les comptes de réévaluation qui intègrent les plus-values latentes accumulées depuis la création de la BCE (24,3 milliards d’euros à fin 2011) ;
– la plus vicieuse serait de recapitaliser par les Etats de la Zone euro à hauteur de leur poids dans le capital de la BCE. Ce qui pourrait revenir à financer cette resolvabilisation par de la création monétaire puisque la Banque centrale va monétiser la dette de certains des Etats qui la recapitalisent…

Rappelons qu’en quatre ans, le bilan de la Banque centrale européenne s’est accru de plus de 2 700 milliards d’euros, soit plus 100% (total du bilan de 1 450 milliards d’euros en juin 2008 et de 3 100 milliards d’euros en juin 2012). C’est 2 700 milliards d’euros de création monétaire (dont 1000 milliards d’euros de LTRO) ! Tout ceci pour quoi ? Pour un résultat désespérant au regard des primes de risques sur les emprunts d’Etat des pays périphériques et de l’absence de véritable circulation de la liquidité dans l’économie réelle.

▪ Ce que l’on aurait pu espérer
Si l’on voulait gagner du temps, il aurait alors fallu le gagner intelligemment :

l’idée de fixer des objectifs sur les niveaux de taux longs n’était pas forcément inadaptée : elle aurait eu le mérite de dissuader toute spéculation déstabilisante (voire injustifiée d’un point de vue fondamental) sur certaines dettes périphériques. Le coût pour la BCE aurait pu être très modeste puisque l’on imagine mal les marchés prendre le risque de tester la détermination de la Banque centrale ;

– la piste d’émissions directes de la BCE auto-souscrites pour financer certaines dettes souveraines périphériques aurait pu être efficace. Certes le bilan de la Banque centrale aurait continué à exploser mais les risques inflationnistes auraient été inexistants puisque la liquidité créée par la BCE aurait été confisquée par la BCE elle-même.

Dans ces deux types d’actions, la BCE aurait pu crédibiliser ses actions en luttant contre l’aléa de moralité en faisant varier les niveaux de taux d’intérêt plafonds ou les niveaux d’émission des dettes émises à la hausse en cas de relâchement des disciplines budgétaires des Etats financés et à la baisse en cas de rigueur budgétaire renforcée.

Mais jusqu’à présent, ce ne sont pas les voies choisies par le patron de la BCE ; et on ne peut pas tout lui demander…

Première parution dans le Billet du Trader du 06/09/2012.

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