La Chronique Agora

Marchés boursiers, lignes de swap… et aversion au risque

▪ Le marché boursier s’est envolé mercredi dernier après que la Fed et plusieurs autres banques centrales ont annoncé leur tout dernier plan dans le but de pousser à la hausse des marchés financiers. A première vue, les banques centrales ont simplement promis de réduire le coût d’emprunt de dollars. Mais si l’on regarde de plus près, les banques centrales se sont engagées dans des formes subtiles d’émission de monnaie.

Les mécanismes de transition qui aideront les marchés financiers sont appelés « lignes de swap« . Même si probablement la plupart des investisseurs ne comprennent pas exactement ce qu’elles sont ni pourquoi elles sont censées être si formidables, le Dow Jones Industrial Average a grimpé de près de 500 points immédiatement après que la Fed les a annoncées. Au même moment, les investisseurs ont écoulé leurs bons du Trésor « refuges ». Les professionnels qualifient ce genre d’action de marché « d’appétit pour le risque ».

Les investisseurs ont tenté de prendre encore plus de risque au cours des séances boursières de jeudi et de vendredi… mais ils n’ont pas pu garder le cap. Le Dow a grimpé de 80 points jeudi matin, avant de clôturer la séance sur une petite perte. Vendredi matin, les blue chips (les valeurs à forte capitalisation) se sont envolées de 170 points, pour finir en territoire négatif au moment de la clôture. Autrement dit, appétit pour le risque le matin, aversion au risque le soir.

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FRANCE 2012 : LA FAILLITE
Tout est en place pour des bouleversements économiques et sociaux comme on n’en avait plus vu depuis 1968… voire 1789.

Pour tout savoir — et vous protéger –, continuez votre lecture sans attendre  : nous sommes sur le fil du rasoir…

« Appétit pour le risque », « aversion au risque » sont devenues les deux nouvelles formules employées à tort et à travers par les présentateurs de CNBC. Mais j’aimerais vous proposer une troisième formule — « l’inclination vers le risque ». Ce trade semble être celui que la plupart des investisseurs choisissent ces temps-ci, mais il n’existe aucun terme consacré pour le qualifier.

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En d’autres termes, le monde de l’investissement est rempli d’actifs chers, libellés en monnaies douteuses. Certes, les actions sont risquées. Mais tout le monde sait ça. Ce que tout le monde semble ne pas savoir c’est que les bons du Trésor « sans risque » peuvent être tout aussi risqués, voire même plus risqués que les actions. Une obligation à 10 ans d’un Etat lourdement endetté semble très prédisposée au risque — en particulier lorsque cette obligation ne rapporte que deux malheureux pour-cent par an et est libellée dans une monnaie que la Réserve fédérale imprime activement et sans vergogne.

Si ça c’est « sans risque », donnez-nous alors s’il vous plaît plus de « avec risque »… en particulier parce que les nouvelles et superbes lignes de swap de la Fed ne font qu’augmenter les risques. Comme l’a clairement prouvé l’histoire récente, cette forme d’intervention de la banque centrale a tendance à produire beaucoup de volatilité… et pas grand-chose d’autre.

▪ Ainsi, il y a tout juste deux mois, la Réserve fédérale et plusieurs autres banques centrales ont annoncé une « action coordonnée » pour offrir des lignes de swap en dollar qui fourniraient une liquidité supplémentaire jusqu’à la fin de l’année. Les actions américaines ont gagné environ 3% à l’annonce de la nouvelle mais ont ensuite dégringolé de près de 10% au cours des deux semaines qui ont suivi.

Au cours de la crise de 2008, une suite d’annonces « d’interventions cordonnées » ont produit des résultats encore plus lamentables.

Un opérateur en Bourse du NYSE, Art Cashin, nous offre une rétrospective très instructive :

« Un ami et ancien opérateur, Terry Reilly, a établi la liste des actions coordonnées passées des banques centrales sur les swaps de prêts de dollars et la façon dont les marchés ont réagi : Lehman Brothers a disparu le 15 septembre 2008. Les lignes de swap ont commencé avec la Banque du Japon, la Banque du Canada et la Banque d’Angleterre le 18 septembre… [Avant l’annonce], le Dow était à 10 600 points et il gagnera 700 points au cours des deux jours suivants. Mais il inversera la tendance et clôturera à 8 450 points trois semaines plus tard ».

« Le 13 octobre 2008, la Fed supprime les limitations sur les lignes de swap et le marché s’envole de 930 points le jour suivant, passant de 8 451 points pour clôturer à 9 387 points. A nouveau, le marché rebroussera chemin et clôturera à 8 175 points au bout de deux semaines. Le 28 octobre, les lignes de swap ont été étendues avec les banques centrales de Nouvelle-Zélande, du Brésil, du Mexique, de la Corée et de Singapour. Le marché grimpe alors de 1 400 points en seulement cinq jours, passant de 8 200 à 9 600 points pour finalement se retrouver à 7 550 points le mois suivant ».

« La différence en 2011 est que nous n’avons pas eu de grande faillite d’une institution d’importance systémique — pas encore… Est-ce que cette réponse à la crise a été faite en vue d’une faillite imminente ? [Les banques centrales] sont-elles intervenues face à la menace d’une grande faillite systémique qui aurait été provoquée par un manque de liquidité ? »

« Oui » répond le King Report. « Il apparaît qu’une grande banque européenne a été sur le point de faire faillite », rapporte-t-il. « Les banques européennes, en particulier les banques françaises, reposent massivement sur le financement au travers des marchés monétaires. Il apparaît qu’une grande banque a eu des difficultés à financer ses besoins immédiats en liquidités. La cavalerie a été appelée à la rescousse ».

En outre, avance le King Report, des problèmes aux Etats-Unis pourraient également avoir rameuté la cavalerie. « Les inquiétudes de la Fed à propos de Bank of America ont probablement été un facteur essentiel dans la mise en oeuvre du dernier plan », observe King. « Si BAC avait chuté en dessous de cinq dollars, il aurait pu y avoir une avalanche de ventes parce que certaines institutions ne peuvent acheter ou détenir une action inférieure à cinq dollars. [NDLR : BAC a atteint 5,03 $ la veille de l’intervention de la Banque centrale.] Une action BAC en chute libre aurait pu générer un épisode ‘le roi est nu’ pour la banque. (Buffett en aurait été peiné). Il était donc impératif que quelqu’un fasse clôturer BAC au-dessus de cinq dollars mardi et qu’un plan soit mis en oeuvre pour faire monter le prix mercredi ».

Par conséquent, comme on l’attendait/l’espérait, les marchés ont fortement grimpé mercredi, permettant à BAC et à quelques autres institutions financières en difficulté de vivre un jour de plus pour se battre. Mais le combat est loin d’être terminé… et les institutions financières en difficulté ne vont probablement pas en sortir victorieuses, quel que soit le nombre de fois où la cavalerie de la Banque centrale s’engage dans la bataille.

Comme le conclut très pertinemment le King Report : « la crise ne sera pas résolue en réduisant les taux ni en fournissant encore plus de crédit facile. Le problème n’est pas la liquidité, qui a atteint un niveau record ; le problème est la solvabilité… La purge et la restructuration nécessaires n’ont pas encore eu lieu ».

Nous sommes d’accord. Préparez-vous à une autre série de trades « aversion au risque »… voire de trades « fuir le risque ».

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