La Chronique Agora

L'impasse de la Fed et des banques centrales

▪ Il y a quelques jours, les marchés attendaient fiévreusement les minutes de la Fed. En ce qui nous concerne, nous étions convaincus que la Fed ne ferait rien, car, à ce stade, tout ce qu’elle peut faire est nuisible.

Mais au fait, qu’est-ce qu’un taux directeur et à quoi sert-il ?
C’est le taux auquel empruntent les banques auprès de leur banque centrale. Il détermine, en principe, les autres taux des prêts qu’elles vont accorder à leurs clients.

La Fed pourrait baisser ses taux. Ils deviendraient alors négatifs. Vous avez besoin d’emprunter 100 $, monsieur Goldman Sachs ? Allez-y ! En prime, tous les ans, on vous donnera 1 $ supplémentaire. Depuis le début de la crise financière, on a déjà vu des pratiques absurdes mises en oeuvre. Celle-ci serait possible, après tout les Japonais l’ont fait.

Cela inciterait les banques à prêter. Car elles sont rétives. C’est pour cela qu’on voit autant d’émissions d’obligations d’entreprise… et qu’elles s’arrachent comme des petits pains, comme le disait Alexandra Voinchet dans MoneyWeek : " 10 minutes, c’est le temps qu’il a fallu à l’émission d’obligation d’Areva pour trouver preneur. Décidément, 2009 est l’année du crédit d’entreprise, qui ont multiplié le papier en quête de financement. Les volumes d’émission ont été record en début d’année."

C’est aussi probablement pour cela que le rebond boursier s’éternise. Les banques préfèrent se risquer sur les marchés actions, plutôt que de prêter à des entreprises qui pourraient faire faillite, ou à des consommateurs qui pourraient se trouver au chômage. Avouez d’ailleurs que c’est quand même un progrès considérable par rapport à la glorieuse époque des subprime, durant laquelle les banques prêtaient à des gens insolvables.

Pas de baisse des taux, car officiellement l’économie repart
Mais bon, l’économie repart. Enfin, c’est ce qu’on vous dit. Donc a priori, pas besoin d’inciter les banques à prêter.

Notons au passage que l’économie est repartie sans que les banques prêtent. C’est le mystère de la reprise sans emploi et sans investissement. En fait, c’est une reprise qui s’appuie uniquement sur les plans de relances et risque de se révéler un feu de paille.

Mais pas de hausse des taux, puisqu’il n’y a pas officiellement d’inflation
La Fed peut-elle monter ses taux, puisque — officiellement — l’économie repart ? Mais d’abord pourquoi voudrait-elle le faire ? Les banques centrales remontent les taux pour endiguer l’inflation et il n’y a pas d’inflation. En plus, si la Fed remonte ses taux, les banques arrêteront de se porter sur les marchés actions. Cela pourrait créer une nouvelle débâcle boursière.

Comment s’appelle une situation dans laquelle la seule action possible est nuisible ? Une impasse. Donc il est logique que la Fed ne fasse rien.

En attendant :
– Le rebond boursier dure.
– L’euro "monte" face au dollar. Car le dollar est devenu une monnaie de carry trade dans laquelle on emprunte pour pas cher pour replacer dans une monnaie dans laquelle les actifs rapportent plus.
– La Chine est agacée par la baisse du dollar et c’est pour cela que l’or monte en dollars.

Et à l’avenir, la Fed a intérêt à ce que le dollar baisse (sans pour autant trop fâcher la Chine) car quoi de plus confortable que de rembourser sa dette dans une monnaie de singe ?

La quatrième pilule de l’ordonnance Bernanke
N’oubliez pas qu’à la tête de la Fed se trouve un expert de la crise de 1929. Ben Bernanke a écrit un mémoire sur ses causes et ses remèdes. La pharmacopée comporte cinq étapes :

Etape 1 : baisse rapide des taux à 0
Etape 2 : maintien des taux à 0
Etape 3 : pratique des mesures d’assouplissement quantitatif
Etape 4 : ouvrir les guichets de liquidités aux banques
Etape 5 : dévaluer

Nous en sommes à l’étape 4. Il reste une case à cocher — et quand nous en serons à la dernière étape, un seul actif pourra vous protéger face à la dévaluation

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