La Chronique Agora

L'homme le plus stupide d'Amérique

En exclusivité, un extrait du Nouvel Empire des Dettes, la nouvelle édition — mise à jour et enrichie — du livre de Bill Bonner et Addison Wiggin : de la Révolution française à la Révolution financière, certaines choses ne changent pas…

Où s’était-il fourvoyé ? La question lui est probablement venue à l’esprit, peut-être même au moment où il montait sur l’échafaud en ce 21 janvier 1793. Les Bourbons avaient été la famille la plus brillante d’Europe. Ils avaient dirigé les pays les plus grands et les plus riches depuis Henri IV. Et à présent, ils siégeaient sur tous les trônes au travers de l’Europe. Mais, dans la langue même du peuple, Louis XVI se fit raccourcir. Il était censé être un souverain absolu. Ah… voici la dynamite ! Il le crut. Il avait encerclé le parlement avec des troupes et s’était mis le pays à dos. Et à présent, il n’avait plus aucun contrôle sur rien. Pas même le pouvoir de sauver sa peau.

Pauvre Louis ! Il avait déjà la tête dans le sac. Et la corde autour du cou. Il a dû se sentir l’homme le plus stupide de France.

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Nos analystes avaient prédit la catastrophe des subprime… la crise de l’immobilier US… la hausse spectaculaire de l’or… le krach boursier de 2008… l’effondrement du système bancaire et financier…

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Dick Fuld a dû se sentir aussi plutôt stupide. Sa compagnie avait survécu à la guerre civile, aux banqueroutes du chemin de fer à la fin du XIXe siècle, à la panique des banquiers de 1907, au krach de 1929, à la Grande dépression, à la Seconde Guerre mondiale, à la guerre froide ; Lehman Bros. avait survécu aux scandales, à la prohibition et au disco. Mais elle ne put sauver sa tête face à la plus grande explosion financière de l’histoire.

John Edwards gagna le titre de "l’homme le plus stupide d’Amérique" quand la presse eut vent qu’il trompait sa femme et se lançait dans la course à la présidence en même temps. Mais en 2007-2008, Edwards avait encore plus de défis quotidiens. En janvier 2007, l’industrie financière estima la valeur de Lehman Bros. — une compagnie qu’elle connaissait bien — à 48 milliards de dollars. Le 15 septembre 2008, l’offre s’effondra à zéro. Alors vinrent de plus inquiétantes nouvelles : la compagnie d’assurance la plus importante du monde, AIG, faisait faillite. Martin Sullivan l’avait mise au tapis, disaient les analystes. Elle avait besoin d’un renflouement de 85 milliards de dollars.

Personne ne fut présent pour sortir Louis d’affaire quand il en eut besoin. La France n’était pas trop grande pour échouer ; elle était trop grande pour renflouer. Et tout s’était si bien déroulé ! Quand Jacques Turgot était contrôleur général, il s’était débarrassé des frontières douanières intérieures, avait revu les contrôles des prix, et avait aboli les guildes de commerce et la corvée (le système de travail forcé pour bâtir les routes). Le système politique avait aussi été réformé, évoluant vers une démocratie parlementaire.

Mais en cours de route vinrent ces courageux Américains pour semer la pagaille. Ils amenèrent la France à entrer en guerre avec l’Angleterre. La France fournit l’argent, le matériel et les troupes — débarquant 5 000 soldats à Rhode Island et finalement gagnant la guerre en bloquant Lord Cornwallis à Yorktown.

"Le premier coup mènera l’Etat à la banqueroute", fut l’avertissement lancé par Turgot au roi. Il avait à peu près raison. En 1786, les Français étaient dans une situation désespérée, avec la moitié de la population de Paris sans emploi et une dette nationale égale à 80% du PIB. Les Français comptaient sur les Américains pour commencer à rembourser leurs sept millions de créances, mais les Etats-Unis aussi étaient à sec. Et, très vite, le crédit français devint si mauvais que le roi ne pouvait plus continuer à emprunter aux usuriers d’Amsterdam pas plus qu’à ses propres financeurs à Paris. En ayant emprunté trop, Louis n’avait plus de marge de manoeuvre. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était monter les marches de l’échafaud comme un vrai monarque.

Environ deux siècles plus tard, les têtes tombèrent à Wall Street. Mais qui fut le plus crétin ? Certes Dan Mudd et Dick Syron de Fannie et Freddie étaient toujours en piste. Même avec le vent dans le dos (ils empruntèrent de l’argent à un coût moindre que leurs concurrents parce que chacun savait que le gouvernement ne les laisserait pas tomber), ils ne pouvaient rester dans la course. Finalement, comme prévu, la Fed a dû intervenir et les sortir d’affaire.

Les 15 dernières années avaient été bien trop gentilles avec la finance. Wall Street était essentiellement — un pourvoyeur de dette ; et pendant l’explosion, nul ne refusait de prêter. Les profits financiers s’envolaient. Depuis 1980, les profits du secteur financier américain en part du PIB représentèrent jusqu’à 200%. Les industriels et les dirigeants auraient pu empocher la mise et se retirer dans leur manoir de Greenwich. Mais dans le dos de ce succès hors norme grandissait une monstrueuse bosse d’auto-illusion ; les maîtres de l’univers commencèrent à croire en leur propre rire grotesque. Les marchés financiers étaient parfaits, disaient les universitaires. Omniscients et clairvoyants, ils ne pouvaient faire erreur ! Les patrons des grandes compagnies financières ont dû croire qu’ils dînaient à la table des dieux ; ils avaient l’addition pour preuve.

Bien sûr, certains patrons de Wall Street furent plus malins que les autres. En se vendant à Bank of America, Merrill Lynch par exemple échappa à l’échafaud ; mais elle devint une pupille de la nation, à peu près comme Fannie et Freddie avant qu’ils ne soient absorbés complètement.

L’Ancien Régime à Wall Street était dominé par seulement cinq grandes compagnies d’investissement. En à peine quelques semaines, à l’automne 2008, leurs bombes de dettes ont explosé… et la totalité de l’industrie bancaire d’investissement indépendante a disparu.
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