La Chronique Agora

Les mythes de l'économie de marché

▪ Une question, cher lecteur : pourquoi les gens exigent-ils si souvent encore plus du même poison pour guérir de ce dont ils souffrent ? Est-ce parce qu’ils sont stupides ? Sont-ils trop occupés par leurs tâches quotidiennes pour remarquer la différence ? Ou bien leur ment-on constamment et sont-ils endoctrinés ?

Le plus probable est qu’il s’agit un peu des trois réponses à la fois. Aujourd’hui, nous nous pencherons sur le troisième point.

L’un des mythes les plus omniprésents, l’un des plus perpétués — soit par ignorance, soit par malveillance — par les médias dominants, est que le tumulte du marché auquel on a assisté ces dernières années est en quelque sorte le résultat d’une économie de marché qui se serait « dérégulée ».

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Elles pourraient être la clé des profits en 2011 : simplement, facilement et en toute simplicité. Mettez-les au fond de votre portefeuille, oubliez-les… et rendez-vous en fin d’année pour voir où en sont vos profits !

Tout est là

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Cet argument, vous le connaissez certainement. Voici à quoi il ressemble…

Jusqu’à l’intervention récente et héroïque de la Fed, le monde était constamment ballotté au gré des vagues sur la mer du capitalisme non régulé et du « laissez-faire ». Dérivant dans ce paysage marin froid, aride et impitoyable, où les règles étaient cyniquement mises à l’écart et la vigilance gouvernementale inexistante, nous, individus ignorants de tout, nous efforcions simplement de nous frayer un chemin du mieux que nous pouvions. Naturellement, nous avons rapidement perdu de vue l’horizon. Puis, les nuages de l’escroquerie capitaliste ont obscurci notre vision des étoiles, grâce auxquelles nous avions pu auparavant naviguer et tracer notre voie à travers les dangers de l’océan. Sentant notre vulnérabilité, les capitalistes rapaces s’approchèrent furtivement sous couvert « d’anarchisme de l’économie de marché » pour ébranler les marchés et faire chavirer notre petit navire sans protection.

Suivirent — en 2007-2008 — les douloureuses séquelles de cette grande période d’irresponsabilité de l’économie de marché. Il fallait en tirer des leçons. On dit alors que les régulateurs avaient échoué à nous protéger (principalement de nous-mêmes). On avait autorisé les marchés à « se déréguler », et le résultat fut une escroquerie à grande échelle. Le système entier était en danger de s’effondrer sous le poids de ses propres régimes libéraux. Bientôt, les experts à chaque coin du bateau réclamèrent à grands cris un pilotage central, une direction, du calme. Ceci, nous dit-on, et non sans agiter un doigt moralisateur, est ce qui arrive aux économies de marché mixte, modernes, lorsqu’elles deviennent frelatées par les caprices aveuglants du capitalisme de marché libéral.

▪ Ce serait une jolie histoire, avec un remède sans doute facile…si seulement elle était vraie. Hélas…

« Toutes ces affirmations [à propos du fait que nous vivons dans une économie de marché] sont fausses », affirme Jeffrey A. Tucker, vice-président du Ludwig von Mises Institute et auteur de l’excellent ouvrage Bourbon for Breakfast : Living outside the Statist Quo [« Du bourbon au petit-déjeuner : vivre hors du statist quo« , NDLR]. « Nous vivons la 100e année d’une économie fortement régulée ; et même 50 ans avant cela, le gouvernement régulait fortement le commerce ».

M. Tucker continue : « le dispositif de planification mis en place pour la Première Guerre mondiale a établi des salaires et des prix, a centralisé la politique monétaire au travers de la Réserve fédérale, a présupposé la primauté de la propriété par rapport à l’ensemble des revenus au travers de l’impôt sur le revenu, a considéré connaître le niveau d’intégration horizontale et verticale que les entreprises devaient avoir, et a interdit la création de dynasties intergénérationnelles via les droits de successions ».

Contrairement à ce que les interventionnistes vous font croire, le gouvernement n’a pas le moins du monde annulé son influence et arrêté de contrôler notre vie. C’est tout le contraire.

L’existence même de la Réserve fédérale va à l’encontre de toute notion de capitalisme de marché. « Que le gouvernement autorise un faussaire en chef est une attaque directe au système monétaire sain d’une économie de marché », observe M. Tucker.

Le « temple alchimique », comme le décrit judicieusement M. Tucker, a utilisé son monopole sur la création de monnaie pour injecter des milliers de milliards de dollars de crédit dans le soi-disant système de « laissez-faire » au cours des années 1990 et au début des années 2000. Ceci a conduit, inévitablement et avec la connivence directe des government sponsored enterprises (entreprises de statut privé mais sous convention publique), Fannie Mae et Freddie Mac, à l’expansion non viable du secteur des prêts hypothécaires. En réalité, le gouvernement est intervenu pour encourager — et pendant un certain temps même récompenser — le « mauvais investissement » endémique via la création et la distribution d’argent que le libéralisme n’aurait jamais toléré. Et ils ont le toupet de reprocher au capitalisme de marché qui n’a jamais existé l’implosion qui a suivi !

On est alors en droit de s’interroger : pourquoi ceux qui soutiennent l’histoire fictive racontée plus haut se demandent pourquoi, aujourd’hui, la tempête financière à laquelle l’Etat a donné naissance n’est pas encore terminée ? Si l’intervention gouvernementale est le remède aux crises et non leur cause, alors certainement avec Bernanke aux manettes de la Fed, Obama qui aboie des ordres depuis la barre du bateau et Krugman déclamant son charabia keynésien depuis la chaire éditoriale du New York Times, nous aurions déjà dû voir la remarquable reprise qu’ils nous ont promise l’été dernier. Et pourtant, les prix de l’immobilier continuent de chuter — 1% par mois, au dernier comptage. Le chômage est au plus haut et la création d’emplois n’est même pas capable de suivre le rythme de la croissance démographique. Entre-temps, la fameuse donnée statistique souvent prise pour référence par les keynésiens — la croissance du PIB — est plus faible que lorsque Bernanke a déversé ses désormais célèbres 600 milliards de dollars du programme QE2.

Ô reprise, reprise ! Où es-tu reprise ?

Ils disent que le capitalisme de marché « s’est déréglé » ; cela implique que si nous pouvions ne serait-ce qu’élire un groupe de bureaucrates omniscients et tout-puissants pour, d’une certaine façon, dresser cette bête sauvage, nous nous porterions tous certainement mieux. Mais le capitalisme de marché n’est pas un animal que l’on peut domestiquer ; il en est de même pour les centaines de millions d’individus qui effectuent des milliers de milliards d’interactions individuelles et de transactions quotidiennement — et qui constituent ce capitalisme de marché. Dire que le capitalisme de marché devrait être apprivoisé revient en fait à dire que les individus qui le composent devraient être dressés ; qu’ils devraient être taxés, régulés et menés en troupeau comme des animaux incapables de réfléchir par eux-mêmes.

Ceci est — selon nous de façon assez évidente — l’exact opposé de la liberté et de la prospérité pour lesquelles les hommes et les femmes se battent. En tant que tel, il s’agit de quelque chose auquel il faut librement s’opposer.

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