La Chronique Agora

Une leçon d’investissement de l’ex-président de Pixar

Comment l’innovation surgit-elle dans l’entreprise ? Edward Catmull, du studio Pixar, l’explique dans son livre Creativity Inc.

Edward Catmull était président du studio de production de film Pixar.

Cette société a été lancée par Steve Jobs, après son expulsion de chez Apple à la fin des années 1980.

Catmull et Jobs ont d’abord connu le succès avec le film Toy Story en 1996. Ce succès a mis l’entreprise sur les rails, et en a assuré l’avenir. Par la suite, 1001 Pattes, Le Monde de Nemo ou encore Cars ont été de grands succès.

Si vous avez de jeunes enfants ou des petits-enfants vous connaissez peut-être aussi des succès tels que Vice-Versa, Rebelle ou Coco.

Le studio continue, d’année en année, de produire des films « familiaux ».

Dans son livre Creativity, Inc., M. Catmull explique comment ils sont parvenus à monter une entreprise qui dépend si fortement de la nouveauté et de la créativité…

Ce sont des choses qui sont beaucoup moins faciles à capter et à contrôler qu’un brevet, ou une innovation sur une chaîne d’assemblage.

Catmull explique entre autres qu’il a lui-même été fortement inspiré par un prédécesseur bien particulier : le célèbre Walt Disney.

Celui-ci avait, avant Pixar, monté un empire grâce à la technologie de la bande dessinée et du dessin animé.

Comme l’indique M. Catmull, le succès de Pixar suivait le modèle de Disney.

Cependant, les produits de Pixar — comme ceux de Disney auparavant — n’ont pas la prévisibilité d’un ordinateur… ni la solidité d’une carrosserie.

Le succès des projets dépend à 100% des goûts des spectateurs …

 

Pour assurer le succès de Pixar, M. Catmull et ses partenaires devaient essayer de libérer la créativité des équipes… tout en contrôlant le produit fini pour s’assurer qu’il soit de qualité.

En gros, ils devaient trouver le moyen de favoriser la création et l’échange d’idées au sein du groupe.

Et cela dans un environnement de travail souvent intense.

À la sortie de Toy Story 2, par exemple, ils avaient modifié des éléments du film quelques mois avant la sortie en salles. L’équipe avait travaillé 7j/7 afin de respecter la date annoncée.

À la fin du projet, un tiers des membres de l’équipe souffrait de troubles physiques liés aux tâches répétitives qu’ils avaient dû effectuer pour le montage dans le temps imparti.

La créativité versus la “mort par le processus”

Comme le décrit en détail Edward Catmull dans son livre, il n’existe pas de moyen “magique” de s’assurer d’avoir toujours de bonnes idées, ou que les produits soient toujours appréciés des spectateurs.

Vous ne pouvez pas en contrôler la réception…

Vous faites de votre mieux… et puis vous priez pour que les résultats soient à la hauteur de vos espoirs.

Cependant, Catmull donne aussi des conseils et émet des conclusions.

En particulier, il met en garde contre la gestion par les process

Selon lui, les process — les systèmes d’organisation ou de répartition du travail dans une équipe — prennent souvent le dessus sur les objectifs de l’entreprise.

Les gens en général aiment les process.

Les routines et les procédures éliminent la nécessité de la réflexion sur le sens d’une tâche.

  1. Catmull décrit par exemple une procédure appliquée dans les réunions.

Au début, le management attribuait une place à chaque membre de l’équipe lors des réunions, afin qu’elles se déroulent de manière plus fluide.

Cependant, ce système d’attribution des places a rapidement pris de plus en plus d’ampleur. La proximité des gérants représentait un statut.

Par la suite, la structure des réunions a été modifiée afin d’essayer de les démocratiser.

Cependant, la pratique des attributions des places a perduré longtemps après qu’il soit apparent qu’elle n’avait pas d’intérêt… et même qu’elle avait un côté pervers.

Cela en raison d’une incapacité de l’équipe à lâcher cette “tâche” de l’attribution des places, qui avait pris beaucoup d’importance.

Il a fallu une intervention directe des dirigeants pour interdire formellement l’attribution des places pour enfin éradiquer cette procédure.

Les procédures — la gestion d’une activité par des listes de tâches — nuit beaucoup à la créativité, à l’échange d’idées, explique Edward Catmull.

Une leçon aussi pour nos investissements

Dans un système de procédures, une personne, ou un comité de personnes, réfléchissent. Les autres n’en ont pas l’autorité.

Au début, une structure a besoin de beaucoup de centralisation. Parce que la structure est si fragile qu’il faut absolument adhérer à une vision unique pour réussir. Dans une structure plus évoluée, cette même centralisation nuit car elle empêche aux améliorations “organiques” d’avoir lieu…

Passé un certain point, il n’y pas d’individu unique qui puisse assurer sa croissance…

L’entreprise, pour s’agrandir encore plus, a besoin de pouvoir incorporer les innovations et idées qui proviennent naturellement à travers la structure.

Prenez conscience en regardant un investissement que les plus grandes innovations n’auront pas lieu de manière “planifiée,” décidée par la direction, mais qu’elles peuvent surgir de manière soudaine et inattendue — si tant est que le management le permette.

 

Pour vous inscrire à la lettre de Henry Bonner, c’est ici

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile