La Chronique Agora

Le plomb s'emballe (1)

Par Isabelle Mouilleseaux (*)

J’étais hier soir plongée dans ma documentation sur le chauffage solaire thermique. L’idée est d’assurer une partie du chauffage grâce aux rayons solaires gratuits ! La chaleur qu’ils génèrent peut être immédiatement exploitée pour chauffer mon eau ou les pièces de ma maison. Mais je peux aussi accumuler cette chaleur afin qu’elle me soit restituée ultérieurement. Ce qui est encore mieux.

Et là, qu’est ce que je découvre ?
Que les accumulateurs ne sont en réalité rien d’autre que des grosses piles de plomb. Et qu’elles doivent être renouvelées souvent. L’information n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd !

Je connais parfaitement la situation actuelle du marché du plomb, hyper tendue. Si donc la demande pour les accumulateurs devait se développer dans un proche avenir, ce dont je ne doute pas (je crois au boom du solaire), les tensions sur le marché de plomb n’en seraient que plus vives !

Le plomb est sur une tendance haussière depuis juillet 2006. Il cotait alors 1 000 $ la tonne contre 3 850 $ environ ces derniers jours, soit une hausse de 285% ! Rien que depuis le début de l’année, son cours est passé de 1 600 $ la tonne à 3 860 $ : +140% en neuf mois ! Pas mal non plus…

Certains en ont déjà bénéficié
En mai dernier, alors que le plomb cotait aux alentours de 1 800 $ la tonne, je mettais son objectif à 3 000 $. Lorsque nous avons atteint les 3 000 $ en juillet, j’ai fixé un nouvel objectif, allant jusqu’à 4 000 $. Nous n’en sommes plus très loin. Le plomb cotait 3 860 $ la semaine dernière ! Je vous dirai plus loin mon nouvel objectif…

Même chose du côté de Simone Wapler, rédactrice de L’Investisseur Or et Matières, qui a permis à certains d’entre vous de bénéficier à plein de cette hausse : en effet, elle recommandait en mai dernier dans son rapport spécial sur les métaux l’achat d’un support plomb à 14,50 euros. Il vaut aujourd’hui 27 euros, soit 68% de gains… et à mon avis, les performances ne vont pas s’arrêter là.

Pourquoi ? Parce que la demande explose et que l’offre patauge. Voyons cela de plus près…

Hausse de la demande de plomb : une tendance lourde
Regardez : depuis le début de l’année, la demande chinoise de plomb s’est accrue de 23% ! Entre 1996 et 2006, elle est passée de 100 000 tonnes à 600 000 tonnes. Elle a été multipliée par six ! Au niveau mondial, la demande s’est accrue de 4% depuis le début de l’année.

Plusieurs secteurs d’activité en forte croissance tirent la demande de plomb :

Le plomb est incontournable dans l’automobile 
Les trois quarts de la production de plomb sont absorbés par l’industrie automobile, pour la fabrication des batteries. Avec deux poids lourds qui dopent littéralement le marché automobile : la Chine et l’Inde !

Avec un PIB qui croît de 10% l’an, le marché de l’automobile en Chine se développe à toute vitesse. 8 000 autos neuves par jour en Chine : les ventes ont été multipliées par trois en cinq ans. Et la tendance est clairement exponentielle. L’Inde et le Brésil suivent… L’Iran aussi, avec un beau succès de la Logan de Renault ! La Logan se vend comme des petits pains chauds au sortir du four…

Sans plomb, les avions restent cloués au sol !
Même constat pour les avions dont le nombre va exploser dans les vingt prochaines années dans notre ciel. Il faut bien faire démarrer les avions (et tous les autres engins d’ailleurs). Et pour cela, le plomb et indispensable.

Le plomb est aussi utilisé pour gainer les câbles souterrains et sous-marins, y compris les fameux câbles en fibres optiques transocéaniques. Indispensables à l’Internet très très haut débit ! Or ce secteur est en fort développement et dope lui aussi la demande de plomb.

Et puis il y a le boom prévisible du chauffage solaire dont je vous parlais plus haut, qui pourrait bien venir s’ajouter d’ici peu… Bref : cela fait déjà quatre ans que l’offre ne suffit pas à satisfaire la demande. Et 2007 ne devrait pas déroger à cette tendance.

Pourquoi l’offre ne suit-elle pas ?
Aujourd’hui, ce sont les Chinois qui assurent un tiers de la production. Mais la croissance de leur production de plomb métal ne cesse de décélérer. Passant d’un rythme effréné de +25% en 2005, à seulement +12% en 2006. Et la croissance ne devrait plus être que de 7,4% cette année. Décélération alors que la demande explose !

L’Australie assure 22% de la production mondiale.

Certes, le plomb, à l’opposé du brut par exemple, ne manque pas. On pourrait ouvrir de nouvelles mines de plomb. Le problème, c’est que le "syndrome Erin Brockovitch" fait des ravages. Qui accepterait de voir une mine de plomb, métal hyper-toxique et polluant, s’ouvrir non loin de chez lui ? Personne !

Ce n’est donc pas le plomb qui manque. Ce sont les permis d’exploiter les mines de plomb qui sont refusés.

Voyez ce qui se passe en Australie : vous êtes au courant du scandale de la pollution au plomb de l’eau du port de l’Espérance. Les autorités locales ont fait fermer la mine de Magellan en mars dernier pour mener des investigations. Mine qui représente 3% de la production mondiale de plomb ! Ce n’est pas rien… Voilà qui ne fait qu’exacerber les tensions déjà fortes.

2007 sera une nouvelle année déficitaire
L’offre sera une fois encore cette année inférieure à la demande sans cesse croissante. Et c’est comme cela depuis 2003. Sauf qu’aujourd’hui, et à force de puiser dedans, les stocks sont presque vides ! Forcément, cela met le feu aux poudres et le plomb s’envole.

La suite dès demain…

Meilleures salutations,

Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora

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