La Chronique Agora

Jusqu'où va la crédibilité ?

** Incroyable la dose de crédibilité qu’ont certaines personnes. On dirait qu’elle est infinie. Aussi mauvais soient leurs conseils… aussi peu qu’ils en sachent… les gens continuent de leur demander leur avis.

* Ou, pour dire les choses autrement… incroyable ce que les gens sont prêts à croire.

* On pourrait penser — après 50 000 milliards de dollars de pertes — que les gens seraient un peu plus prudents dans leurs choix. Qui prendrait au sérieux les pensées d’Alan Greenspan, par exemple ? Pourtant, les journaux continuent de rapporter ses remarques avec le plus grand sérieux.

* Et qu’en est-il de tous les économistes qui affirmaient que puisque "les Etats-Unis ont l’économie la plus dynamique et la plus flexible au monde", on ne pouvait pas se tromper en achetant des actions américaines ? Ceux qui poussaient les investisseurs à faire des "affaires" alors que le Dow n’était que 10% plus bas que son sommet ? Ou des autorités de régulation — dont Tim Geithner — qui ont complètement manqué la plus grande arnaque en pyramide de tous les temps alors qu’elle se tenait juste sous leur nez ? Ou des analystes qui pensaient que la dette des produits dérivés rendait le monde financier plus sûr en "distribuant le risque plus largement" ? Ou ceux qui, comme Henry Paulson, étaient d’avis que la crise des subprime était "contenue" à 100 milliards de dollars de pertes ? (Coût actuel des renflouages : 12 800 milliards de dollars !)

* Comme le dit notre ami Nicholas Taleb, c’est comme si tous ces gens avaient eu un accident en car scolaire — alors qu’ils étaient en état d’ivresse.

** Et au lieu de les mettre en prison — on leur donne un nouveau car scolaire à conduire ! Kevin Philips, auteur du livre Bad Money : Reckless Finance, Failed Politics, and the Global Crisis of American Capitalism ["De l’argent corrompu : finance imprudente, échecs politiques et crise globale du capitalisme américain", NDLR.] avertissait de l’explosion imminente d’une "multi-bulle" de 25 ans. Les bulles ont commencé dans les années 80, déclare-t-il, alors que le secteur financier représentait entre 10% et 12% de l’économie américaine, avant de grimper au taux "indiscutablement handicapant" de 20% à 21% du PIB au milieu de la décennie actuelle.

* Qui faut-il en blâmer ? Henry Paulson, dit-il… et Ben Bernanke… et Alan Greenspan.

* Un article de Reuters : "Phillips appelle Paulson un initié de Wall Street qui n’avait que ses propres intérêts en tête, et Bernanke un académicien essayant de refaire la Grande Dépression des 1930 à mauvais escient. A eux deux, ils ont formé une mauvaise équipe au mauvais moment et doublé le déficit de la Fed, dit-il".

* "On voit Bernanke essayer de créer une bulle de renflouage reflationniste, qu’il ne peut décrire comme une bulle, tout comme Greenspan ne pouvait décrire la bulle des prêts hypothécaires comme une bulle. Ce que nous voyons, c’est Bernanke tentant de regonfler une bulle en douce", a déclaré Phillips à Reuters.

** Pendant ce temps, Nouriel Roubini — qui avait en grande partie raison sur cette crise — déclare que [Jim] "Cramer est un bouffon".

* "Il faisait partie de ceux qui ont affirmé à six reprises consécutives que ce rebond de marché baissier était un rebond de marché haussier, et il s’est trompé. Après toutes ces histoires […], il devrait simplement se taire, parce que c’est franchement éhonté… Il n’est pas un analyste crédible. Chaque fois qu’on se trouvait dans un rebond de marché baissier, il annonçait qu’il s’agissait d’un marché haussier — et il se trompait".

* Il y a deux ans, Roubini avertissait que les Etats-Unis se trouvaient confrontés à leur pire récession de ces quatre dernières décennies. Il souligne que le rally actuel sur Wall Street ne fait que suivre le schéma d’autres ralentissements majeurs.

* "Une fois que les gens reviendront à la réalité, les choses tourneront mal à nouveau", déclare-t-il.

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