La Chronique Agora

Jusqu'où ira le marché du café ? (1)

Par Isabelle Mouilleseaux (*)

Le moka ? Un vrai plaisir…
Je déguste à l’instant où je vous écris un divin moka d’Ethiopie. Son parfum est très doux, fruité, presque fleuri même, avec quelques touches chocolatées. Et dire que ce petit nectar que je savoure pousse à 2 000 m d’altitude. J’essaye d’imaginer l’ambiance là-bas… et jusqu’à son arrivée dans ma tasse !

Le marché du café s’est retourné
En mars dernier, j’écrivais que le marché du café sortait de sa torpeur. A l’époque, le cours du café arabica était revenu à 111 cents la livre ; j’expliquais que le marché (alors en baisse) était en train de se retourner et qu’il y avait une carte à jouer.

Mon conseil était le suivant : "première résistance à franchir : les 125 cents qui, si elle était dépassée, nous permettrait de viser à moyen terme les 137 cents. L’objectif à très long terme restant 318 cents".

La réalité ? Le café s’est effectivement retourné à la hausse et a atteint plus de 140 cents courant octobre. Une hausse de +26% depuis mars.

Le café, l’un des plus gros marchés du monde
Le café est la seconde marchandise la plus échangée dans le monde après le… pétrole. On boirait 12 000 tasses de café à la seconde dans le monde !

A l’origine, cette plante vient d’Ethiopie (province de Kaffa) et a gagné rapidement l’Arabie (où on le nomme K’hawah). Aujourd’hui il est produit surtout dans les pays de l’hémisphère sud. Dix pays font 79% de la récolte. Quatre d’entre eux font 60% de la production : le Brésil, suivi par le Vietnam, la Colombie et l’Indonésie.

En ce qui me concerne, plutôt arabica que robusta 
Le robusta qui nous vient du Zaïre contient beaucoup de caféine. Les fermiers l’aiment bien car il est robuste en cas de choc climatique et résiste bien à la sécheresse. Il peut être cultivé à moindre altitude. Le Vietnam et l’Indonésie en produisent beaucoup.

L’arabica, considéré comme meilleur, représente 60% de la production de café. Il nous vient des hauts plateaux d’Amérique Latine (Brésil, Colombie…), d’Afrique de l’Est, d’Inde et de Papouasie Nouvelle-Guinée.

Traditionnellement, l’arabica est utilisé pour les produits plus chers, le robusta est utilisé plutôt dans des mélanges (comme remplisseur) ou pour des produits à prix plus bas (cafés instantanés).

Après des années de vaches maigres, le bout du tunnel ?
En 1998 le cours du café arabica touchait un point haut à 300 cents la livre. Trois ans plus tard, l’arrivée fracassante du Vietnam sur le marché et la croissance des cultures brésiliennes ont conduit à une surproduction massive qui entraîna le café dans une crise dramatique. Chômage, faillite, le marché est ravagé et les cours s’effondrent à 50 cents la livre en 2001. Une catastrophe…

Il faudra attendre 2004 pour voir le marché sortir de la crise — qui aura au moins eu un avantage : le prix du café était tellement bas que cela a dopé fortement la demande. Une nouvelle demande est née, a pris goût au café et s’y est habituée. C’est grâce à elle que le café sort aujourd’hui de l’ornière.

Incontestablement, la demande de café s’envole
Car la demande n’est pas seulement en hausse dans les grands pays industrialisés comme aux Etats-Unis ou en Europe (notamment en Allemagne, gros consommateur de café). Elle explose depuis peu aussi en Asie. Et ça, c’est nouveau ! C’est à tel point que l’Indonésie, pourtant quatrième plus grand producteur mondial de café, a importé cette année 80 000 tonnes de café étant donné sa production en baisse ! Et elle prévoit d’ores et déjà d’en importer 120 000 tonnes l’an prochain !

L’offre essaie de suivre le rythme
Face à cette envolée de la demande, l’offre suit le rythme ! Depuis plusieurs années, la production mondiale annuelle dépasse les 100 millions de sacs (un sac = 60 kg) soit six à sept millions de tonnes. Et cette production ne cesse d’augmenter (en hausse de 20% entre 1997 et 2005 grâce à l’utilisation de techniques plus sophistiquées, engrais, pesticides…).

Mais voilà : à force d’artifices, le Vietnam atteint le rendement record de 10 tonnes à l’hectare contre 2,5 tonnes en Indonésie par exemple. Revers de la médaille : la qualité du robusta a très fortement baissé ; et les acheteurs rejetteraient les sacs à leur arrivée en Europe tant la qualité serait mauvaise ! Le Vietnam est allé trop vite, trop loin…

Et voilà que la météo s’en mêle
Autre constat : le niveau des stocks mondiaux de café est en baisse, atteignant à peine 10% de la production mondiale. C’est peu…

Et voilà que La Niòa fait son grand retour ! Car le marché du blé n’a pas le monopole des caprices de Dame Météo. Assailli de toutes parts par la sécheresse, son cours s’est envolé cet été de 4 $ à 10 $ le boisseau ! Le café va-t-il suivre la tendance du blé ? Une chose est certaine, la sécheresse menace le Brésil…

Et où va le marché du café aujourd’hui ? Nous verrons cela dès demain…

Meilleures salutations,

Isabelle Mouilleseaux
Pour la Chronique Agora

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