▪ Vendredi, c’était la fête nationale aux Etats-Unis. Nous aimons le "Pays de la Liberté". C’est-à-dire que nous apprécions l’hypocrisie. Après tout, c’est "l’hommage que le vice rend à la vertu". Sans elle, la vertu ne serait guère récompensée.
Les esprits libres et les marchés libres sont eux aussi des vertus. Personne ne se soucie d’eux non plus. Pas aux Etats-Unis. Les écoles sont là pour menotter les esprits. Et les autorités sont là pour emprisonner, tabasser et ligoter les marchés.
A cet égard, nous avons été particulièrement amusé, cette semaine, par Mme Janet Yellen, geôlière en chef des marchés boursiers américains. Le chiffre le plus important, dans un marché de libre-échange, c’est le prix du capital — le coût nécessaire pour emprunter l’épargne de quelqu’un d’autre : le taux d’intérêt. Tous les autres chiffres ou presque dépendent de lui. Ce chiffre doit être "découvert" grâce au libre échange. S’il est enchaîné… et fouetté comme un prisonnier que l’on torture… il vous dira ce que vous voulez entendre, et non la vérité.
Quoi qu’il en soit, la semaine dernière, Mme Yellen nous a donné un tel exemple d’humour carcéral que les dieux ont dû en tomber par terre, se tenant les côtes pour ne pas les rompre.
"Il devrait être clair à ce stade que selon moi, il est essentiel de travailler à construire la résilience du système financier afin de minimiser les possibilités d’instabilité financière et les dommages potentiels qui en résulteraient. Cette concentration sur la résilience diffère d’une bonne partie du débat public, consistant souvent à s’interroger sur le fait qu’une classe d’actif en particulier subit une ‘bulle’ et à savoir si les décideurs devraient tenter de faire éclater cette bulle. Puisqu’un système financier résilient peut supporter des événements inattendus, l’identification des bulles est moins critique".
Mme Yellen a transformé les marchés sauvages et robustes d’une économie libre en bibelots de cristal ornant une étagère |
▪ La résilience, vraiment ?
En abaissant les taux d’intérêt… et en promettant autant de crédit supplémentaire que les spéculateurs le désirent… Mme Yellen a transformé les marchés sauvages et robustes d’une économie libre en bibelots de cristal ornant une étagère. Le système dépend désormais d’une chose si monstrueuse qu’elle ne peut se prolonger bien longtemps encore : du crédit illimité à taux zéro. Sans cette lourde intervention, tout le système se brise en milliers d’éclats.
Mais Mme Yellen est prête :
"Néanmoins, certains outils macro-prudentiels peuvent être ajustés de telle manière qu’ils pourraient permettre d’améliorer plus encore la résilience à mesure que les risques émergent".
Cela de la part de quelqu’un qui a manqué la plus grosse menace des ces dernières décennies. L’économiste Robert Hall affirme que les années depuis 2007 ont été "un désastre macro-économique […] d’une ampleur sans précédent depuis la Grande dépression".
A présent, Mme Yellen fait un cocktail de torture statistique et d’improvisation politique si macro-imprudent que même son propre quartier général — la Banque des règlements internationaux — a dû dire quelque chose :
"Dans l’ensemble, il est difficile d’éviter le sentiment d’une troublante déconnexion entre la vigueur du marché et les événements économiques mondiaux sous-jacents… Les marchés financiers sont euphoriques […] et pourtant, les perspectives macro et géopolitiques sont toujours extrêmement incertaines".
"La politique", continue la BRI, "a peu de marge de manoeuvre".
Selon la BRI, 710 000 milliards de dollars de produits dérivés sont en cours actuellement. La dette publique totale des économies du G7 a augmenté de 40% depuis le début de la crise. La dette des entreprises n’a jamais été si élevée… et n’a jamais crû si rapidement. Les prix à la consommation sont peut-être en train de grimper. Tout ça est le produit de la planification centrale et d’un marché qui n’est pas libre. Au lieu de permettre aux taux d’intérêt de s’exprimer franchement, Mme Yellen les a bâillonnés…
Quelle place l’histoire lui donnera-t-elle ? Nous n’en savons rien. Mais d’un bout à l’autre de la courbe des rendements, les taux d’intérêt se recroquevillent, gémissent et mouillent leur pantalon quand ils entendent venir Mme Yellen.