▪ La semaine dernière, nos jeunes collègues de Floride nous ont mis sur la sellette.
"Qui sommes-nous ?" ont-ils demandé. "Que faisons-nous ? En quoi sommes-nous différents des autres ? Que pensons-nous que d’autres ne pensent pas ?"
Nous ne sommes pas les seuls à offrir des opinions. Ni les seuls avec des points de vue alternatifs… mais commençons déjà par examiner la gamme d’opinions disponibles.
D’abord, il y a le camp "les autorités doivent savoir ce qu’elles font… et puis j’ai des choses plus importantes à penser". C’est de loin le groupe le plus important. M. et Mme Tout-le-Monde. Le lumpeninvestoriat.
Il peut y avoir quelques grognements et plaintes, mais la plupart des gens comptent sur les autorités pour gérer l’économie, la politique étrangère, l’avenir et le gouvernement lui-même. Ils s’attendent bien à quelques erreurs de temps en temps… mais ils croient aussi qu’on peut faire confiance au système pour produire un résultat acceptable — même s’il n’est pas toujours idéal.
Dans ce camp, les gens n’ont pas la capacité d’influencer la politique publique et guère de marge de manoeuvre dans leur vie privée. Ils touchent des salaires, des pensions, des allocations. Ils ont besoin d’emplois, de prêts immobiliers. De prêts étudiants. D’assurances. Ils ont peu de capital à investir ou protéger. Ils dépendent si lourdement du "système" qu’ils ne peuvent pas même se permettre de penser que quelque chose pourrait mal tourner. Ils suivent le mouvement.
Lorsqu’on passe sa journée devant la télévision, on en arrive à avoir toutes sortes d’opinions étranges |
A l’autre bout du spectre des idées, on trouve les points de vue insatisfaits, marginaux, dissidents, "alternatifs". Lorsqu’on passe sa journée devant la télévision, on en arrive à avoir toutes sortes d’opinions étranges. Il y a un secteur entier dédié aux idées insensées. Vous voulez croire qu’Obama est musulman ? Vous voulez penser que les Illuminati, les Rothschild ou les Rockefeller dirigent le monde ? Vous voulez tout savoir du "moteur infini" de GM qui — si le secret était connu — mettrait tout le secteur de l’automobile au chômage ? Eh bien, c’est un segment du marché. Mais ce n’est pas le nôtre — que d’autres répondent à cette demande.
(Il y avait autrefois aux Etats-Unis un journal appelé le Weekly World News. Peut-être est-il toujours en activité ? On le trouvait dans les épiceries, juste devant la caisse… avec des titres alléchants comme : "l’enfant secret d’Obama" ou "cet homme de 150 ans passe enfin son bac". Notre édition préférée montrait la photo gigantesque d’un avion écrasé sur la surface de la Lune. "Un bombardier de la Deuxième Guerre mondiale retrouvé sur la Lune", était-il intitulé. "Une erreur de pilotage", selon les experts).
Mais c’est l’argent… l’économie… et la finance… qui nous intéressent. Nous essayons de les comprendre. Nous essayons de voir ce qui arrive avant que ça n’arrive. Et nous y mettons tout notre sérieux.
▪ Dans quel camp êtes-vous ?
Contrairement à l’opinion "grand public" — selon qui les autorités contrôlent la situation — quasiment tous les analystes sérieux voient qu’un problème colossal est en train de se développer. La situation actuelle (avec des taux d’intérêt zéro, voire négatifs… et une dette qui se développe bien plus rapidement que le PIB) ne peut pas durer. Elle a un début — qui date des années 80. Elle doit aussi avoir une fin. La majeure partie des suppositions se concentre désormais sur quand et comment cette fin se produira. Récemment, l’un de nos lecteurs a résumé les trois grands points de vue, ainsi qu’un point de vue mineur :
"Le camp de la déflation :
Harry Dent est en ligne avec la théorie du cycle économique autrichien : l’impression monétaire cause des bulles financières, fausse l’économie et est donc contre-productif.Comme Bob Prechter (je ne l’ai pas suivi récemment mais son argumentation semble similaire), [Dent] parie sur la déflation et la dépression. Lutter contre le désendettement et la démographie revient à tenter de faire face à un tsunami […]. Dans un tel environnement, le dollar US gagnerait du pouvoir d’achat et l’or connaîtrait une nette sous-performance (Harry le voit de retour sur les 700 $ en 2018-2019). Le cash/T-Bonds/bons à court terme sont les placements de choix. Les taux resteront bas pendant très longtemps.
Le FMI n’est pas une autorité élue et la majorité de la population ignore même que le Fonds joue un rôle dans la création d’inflation La thèse de Jim Rickards, ‘éliminer la dette par l’inflation via une émission massive de DTS après que la Chine ait rejoint le club’, est également très crédible — les devises mondiales sont massivement diluées par l’émission de DTS qui ne servent qu’aux pouvoirs en place. Au lieu d’un nouvel étalon-or, c’est la solution [donnant plus de flexibilité aux élites]. Les citoyens sont exclus/interdits de DTS. Leur pouvoir d’achat diminue. Ils ne savent pas qui accuser ; le FMI n’est pas une autorité élue et la majorité de la population ignore même que le Fonds joue un rôle dans la création d’inflation. Il peut en outre prétendre qu’il doit sauver le monde (dans le cadre du renflouage de la Grèce, etc.).
Le camp de l’hyperinflation :
John Williams, de ShadowStats, a vraiment fort à faire pour défendre ses idées. Il a raison sur le ‘mensonge de l’IPC’ et l’état réel de l’économie actuelle, mais quiconque investit sur ses idées va se retrouver à court de capitaux pour rester en jeu. Peter Schiff et Mike Maloney sont sur la même ligne. Le problème avec eux étant qu’ils ont un conflit d’intérêt en ce qui concerne leur activité professionnelle. Mais je n’ai pas de doutes [sur] leur intégrité : ils font/vivent ce qu’ils disent.Le camp de la déflation à l’hyperinflation :
Je me rappelle d’un entretien avec Nassim Taleb sur Bloomberg TV en 2009 où il avait dit : ‘nous irons de la déflation à l’hyperinflation sans passer par l’inflation’."
Nous sommes d’avis que Taleb a raison. En 2009, nous avions prédit "Tokyo… puis Buenos Aires". Il n’y aura probablement pas d’arrêt, entre temps, pour laisser place à des niveaux d’inflation modérés.
L’inflation, comme l’a observé Milton Friedman, est un phénomène monétaire. L’hyperinflation, en revanche, est un phénomène politique. Elle est causée par les autorités mêmes auxquelles la population croit pouvoir faire confiance. Lorsqu’elles sont menacées, elles se protègent en imprimant dans des proportions qu’on n’avait plus vues depuis la Guerre de Sécession.
Il y a des moments où imprimer de l’argent semble la meilleure voie à suivre — surtout pour les gens ayant une planche à billets. Cela ne fait peut-être pas beaucoup de bien au citoyen moyen, mais ça sort les autorités du pétrin.
C’est une longue histoire, en tout cas… et qui va devoir attendre : pour l’instant, nous sommes dans un ralentissement à la japonaise, long et lent. Et on dirait qu’on va y être encore longtemps.