La Chronique Agora

Guerre contre la pauvreté : l’heure du cessez-le-feu ?

▪ Les derniers chiffres du chômage américain ont été publiés la semaine dernière. Ils étaient pires que prévu.

Ces mauvaises nouvelles n’ont guère eu d’effet sur les actions (les investisseurs pensaient que c’était de bonnes nouvelles, mais ils n’en étaient pas tout à fait sûrs. D’un côté ça semblait garantir plus d’argent facile de la part de la Fed… d’un autre côté, on aurait dit que l’économie est vraiment plus faible qu’on le pensait généralement).

Pendant ce temps, la semaine dernière, c’était le 50ème anniversaire de la Guerre contre la pauvreté. La date est passée sans cérémonies. On n’a pas pavoisé ni fait de discours. Les vétérans des deux côtés ont pris leur argent et tenu leur langue. Mais ça n’a pas empêché qu’on se torde les mains et qu’on se mette la rate au court-bouillon.

La guerre continue donc. Mais comme dans bon nombre des guerres décidées par les autorités, nous ne savons pas de quel côté nous devrions être. Nous n’avons rien contre les pauvres. D’un autre côté, nous n’avons rien contre les riches non plus. Les gens devraient pouvoir décider par eux-mêmes de ce qu’ils veulent dans la vie.

Mais sous le gouvernement de Lyndon Johnson, les riches se sont mis en tête qu’il fallait exterminer la pauvreté… ou au moins gagner un avantage politique en faisant semblant d’essayer. C’est ainsi que, le 8 janvier 1964, LBJ a déclaré la guerre :

"Aujourd’hui, cette administration, ici et maintenant, déclare une guerre inconditionnelle contre la pauvreté aux Etats-Unis".

C’était il y a 50 ans et 20 000 milliards de dollars.

▪ Il y a pauvre… et pauvre

Jésus-Christ avait prévenu qu’éradiquer la pauvreté ne serait pas facile. "Les pauvres seront toujours avec vous", avait-il dit. Pour l’instant, on dirait qu’il avait raison. Les pauvres sont toujours avec nous. A peu près autant de personnes, par rapport au reste de la population américaine, sont pauvres aujourd’hui qu’à l’époque de Johnson. Mais attendez. Tout dépend de la définition qu’on donne du terme "pauvre". En l’occurrence, un article du Wall Street Journal, rédigé par Robert Rector, semble montrer que les "pauvres" sont trop riches pour leur bien.

Aux Etats-Unis, les autorités dépensent 9 000 $ par an par personne pauvre. Ceci, ajouté à d’autres sources de revenus, donne au pauvre moyen une vie plutôt riche. Selon Rector, il…

"… vit dans une maison ou un appartement en bon état, équipé de l’air conditionné et du câble. Son foyer est plus grand que celui du Français, de l’Allemand ou de l’Anglais moyen non-pauvre. Il a une voiture, plusieurs téléviseurs couleur et un lecteur DVD. Plus de la moitié des pauvres ont un ordinateur et un tiers possèdent des téléviseurs écran plat grand format. L’immense majorité des pauvres Américains ne sont pas sous-nourris et n’ont pas subi la faim ne serait-ce qu’une journée lors des années précédentes".

Pas trop mal ?

Oui, mais il y a plus, dans la vie, que le confort matériel. En tentant d’exterminer la pauvreté matérielle, les autorités ont créé une nouvelle sorte de pauvreté qui est bien pire.

Durant les années 80 et 90, nous vivions dans une zone de guerre — un "ghetto" dans le nord-ouest de Baltimore. Là aussi, l’argent circulait — du moins en quantité suffisante pour acheter des gadgets et de la drogue. Tout le monde avait la télévision. Et tout le monde avait de l’alcool et des drogues. C’était jour de fête chaque fois que les allocations tombaient. Mais l’endroit n’était guère agréable à vivre.

Quand on paie les gens à ne pas faire grand’chose… c’est ce qu’ils font. Ensuite, après avoir fait si peu pendant si longtemps, ils ne peuvent plus rien faire d’autre.

Recevez la Chronique Agora directement dans votre boîte mail

Quitter la version mobile